Parole*

Parole *

Quelle perte de temps, me direz-vous.  Quoi? Les éditeurs et libraires réclament la libération d’Asli Erdogan et Necmiye Alpay. La belle affaire. Des”énervés” (bonjour, je me présente: je suis une “énervée”), réclament leur libération. Quelle ingérence dans les affaires des autres! Et surtout: Quelle naïveté! Après tout, la réplique à l’Union européenne de l’autre Erdogan, Recep de son prénom, après une timide évocation de ses…euh…ses dérives? Taisez-vous ou je vous balancerai les 3 millions de malheureux que vous me payez pour enfermer chez moi.

Alors pour  une ou deux écrivains, plus des journalistes, des profs, des fonctionnaires et autres anonymes en Turquie, vous pensez vraiment que les élus européens mèneront la charge au nom de valeurs éculées auxquelles ils ne croient plus depuis longtemps? Et vous pensez vraiment qu’une poignée d’anonymes – misérables gouttes d’eau dans un océan d’indifférence – vous pensez  vraiment que vous n’auriez pas intérêt à vous taire, à vous occuper de vos propres affaires et à nous laisser vaquer aux nôtres?

En fait, je ne crois rien du tout. Dans le sens où je ne crois pas du tout à l’inévitable, au destin, au poids insurmontable du passé et autres tueurs de la pensée et de son indispensable alliée, l’imagination.

Du coup, ne reste que la phrase de Romain Gary, lorsqu’il a écrit: “Sans imagination, l’amour n’a aucune chance.”

Alors, peut-être qu’au fond, je persiste tout de même à croire en quelque chose qui ne s’appelle ni realpolitik ni si Dieu le veut. Une chose sans laquelle l’humanité n’aurait pas survécu malgré ces affectés du bonnet qui ont besoin de l’abaissement des autres pour se trouver grands.

* en anglais, le mot “parole” a aussi le sens de “libération conditionnelle”. Évidemment, c’est de l’inconditionnelle qu’il s’agit ici.

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