24 septembre 2025

Un camp de mouhajeddin dans les montagnes du Pamir, un français y tourne un documentaire et durant tout ce rêve, j’aurai l’impression d’y avoir été durant le tournage, les familles se réfugiant dans des cavernes, le camp lui-même, les deux petits garçons en haillons observant tout, travaillant à la fabrication de munitions, remplissant les balles de poudre, les combattants partant, revenant, le vieux camion déglingué qu’il faut constamment réparer, la conclusion qui n’en est pas une — quitter cette position pour une autre, oui ? non ? — la saleté, la pauvreté, les extrêmes de chaud et de froid, le sentiment de la quotidienneté éternelle de tout ça.

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Ce qui ne saurait être en contradiction plus totale avec la visite de l’Australienne et de la Sud-Africaine en après-midi hier, chargées de cadeaux et de gâteaux, désolées, désolées d’avoir rater mon anniversaire.Profusion de carnets de note de qualité (bien autre chose que mes cahiers premier prix de chez Netto), une toque en cuir et en fourrure fabriquée par une artisane locale douée avant l’effondrement de l’industrie du cuir, une écharpe magnifique crocheté à la main par la Sud-Africaine…

Mais au réveil, après avoir lu sur les années de la présidence Clinton dans l’histoire des Etats-Unis, version Howard Zinn *, mes premiers souvenirs sont du local minuscule sur le boulevard St-Laurent à Montréal, local que se partageaient les “gars” de l’accueil des déserteurs américains refusant de faire la guerre au Viet-Nam, et des “filles” du Women’s Lib anglophone, calqué sur le mouvement américain et dont pas une des femmes, par ailleurs charmantes, ne semblaient le moindrement conscientes de l’existence de leurs consoeurs francophones, ni de la réalité de ce prolétariat travaillant dans les usines dont leurs papas étaient sans doute les directeurs pour les Américains.

Le local du MLF (mouvement de libération des femmes) n’existaient pas à ce moment, les réunions se tenaient chez les unes et les autres. Certaines d’entre elles étaient très proches du FLQ (Front de Libération du Québec), fortement infiltré par la Gendarmerie royale du gouvernement fédéral. Les autres (dont moi-même) nous activant auprès de travailleuses du textile ou des buanderies, avant les “Événements d’Octobre” en 1970 (voir wikipedia pour les détails).

Maintenant, j’habite dans cette petite ville désindustrialisée du sud-ouest en France d’où j’observe l’autre face que l’Amérique reprenant le haut du pavé — celle qu’elle n’a jamais caché à ses “ennemis” dont elle avait si grand besoin pour maintenir le commerce florissant de son industrie militaire, comme l’écrivait Hannah Arendt au moment de la guerre du Viet Nam **— la guerre d’Irak de Bush étant ouvertement célébré dans tous les médias comme “effaçant l’humiliation de la débandade vietnamienne.” L’Irak ne s’en est pas remis encore.

Quant au climat en France ces jours-ci, qu’en dire ? Tout le monde semble déjà accepter comme inévitable que le prochain gouvernement sera celui du méprisable FN rebaptisé RN de Le Pen; apparemment, la corruption de ceux qu’on ne connait pas encore semble préférable à la corruption de ceux qui ont déjà prolongé leur séjour trop longtemps. Les humains peuvent être incroyablement obtus lorsqu’ils s’encroutent dans les ornières.

**Ou comme le disait Lawrence Korb du Département de la Défence sous Reagan, devenu un critique des ventes d’armes : “C’est devenu un jeu d’argent: une spirale absurde dans laquelle nous exportons des armes seulement pour nous retrouver à devoir en developper de plus sophistiquées pour combattre celles que nous avons répandons à travers le monde.”

Et c’est ainsi que vont les choses.

*Howard Zinn, A People’s History of the United States, Harper Perennial Modern Classics, 2015 edition

*

A muhajeddin encampment in the Pamir mountains, a Frenchman is filming a documentary and throughout this dream, I will have the feeling that I was there during the filming, the families sheltering in the caverns, the two boys in rags observing everything, working at preparing explosives, filling the bullets with gunpowder, the fighters leaving, returning, the old jalopy in constant need of repairs, the conclusion that wasn’t one — to leave this position for another, yes? no? — the filth, the poverty, the extremes of heat and cold, the feeling of the eternal daily grind of all this.

Which couldn’t be in shaper and total contradiction with the visit from the Australian woman and the South-African one yesterday afternoon, loaded down with pastries and gifts, absolutely repentant over the fact of having missed my birthday. A profusion of quality notebooks in lieu of my usual cheap ones from Netto, a cap made of fur and leather made by some clever local artisan before the leather industry collapsed, a magnificent scarf hand-crocheted by the South-African…

But upon waking from the dream in Afghanistan, having read last night of the Clinton years in the history of the United States, in Howard Zinn’s version*, my first recollections were for the tiny office on St-Lawrence Boulevard in Montreal, a space shared with the “guys” greeting the American draft dodgers refusing to go to war in Vietnam, and the “girls” from the English speaking Women’s Lib Movement, a carbon copy of the American one whose members, charming as they were didn’t seem the least bit aware of the existence of their French-speaking sisters, nor of the realities of the proletariat working in the factories of their their daddies were probably the managers for Americans.

The MLF (mouvement de libération des femmes) had no space it could afford at the time, the meetings took place in one member’s home or another. Some of the women were very close to the FLQ (the Quebec Liberation Front) heavily infiltrated by the federal government Royal Mounted Police. The others (myself included) were activists with the textile workers and the women working in commercial laundries. Prior to the “October Events” in 1970 (see wikipedia for deatils).

Now I live in a small deindustrialized town in the Southwest of France from where I observe America’s other face re-appearing in full force – the one it never hid from its “ennemies”, the ones it needed so badly to maintain the flourishing business of its military industry, as Hannah Arendt wrote at the time of the Vietnam war** – Bush’s war in Irak being openly celebrated in all the media as “erasing the humiliation of the Vietnamese rout.” Irak has not recovered from it yet.

As for the mood in France, these days, what can I say ? Everyone seems to be accepting already as inevitable that the next government will be that of Le Pen’s despicable FN relabelled RN; apparently the corruption of those you don’t know yet seeming preferable to the corruption of those who have overstayed their welcome. Humans can be incredibly obtuse when they get into a mind rut.

**Or as Lawrence Korb said – an official from Reagan’s Department of Defence turned critic of arm sales: “It’s become a money game: an absurd spiral in which we export arms only to have to develop. more sophisticated ones to counter those spread out over the world.” **

And so it goes.

**Howard Zinn, A People’s History of the United States, a Harper Perennial Classi, 2015 edition.

2 comments

  1. And on and on it goes each individual, rich or poor , whose consciousness is but a few feet away from its belly button. In general. Woke up with the Beatles. Let it be. For what it’s worth

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