5 juin 2022

“Mais arrêtez de nous embêter avec cette guerre qui ne nous concerne absolument pas en France!” dit la dame . (J’ai relu trois fois pour m’assurer que je n’avais pas sauté un mot.) Peut-être qu’il existe une planète du nom de France quelque part dans l’espace ? Les ondes venues de la Terre y parviennent? C’est vrai, c’est trop embêtant à la fin, on peut comprendre que madame ait mieux à faire de son temps que de lire ces horreurs au sujet d’un monde à cent milliards d’années, aux confins de sa galaxie.

(Je suis certaine que, si elle habitait la France située sur la planète Terre, elle serait d’accord avec Macron qu’il ne faut pas humilier Poutine puisqu’il faudra négocier, un jour ou l’autre. Même le fait de mentionner des négos et la nécessité d’être poli avec un attaquant détruisant un pays voisin et proclamant son inexistence, tuant ou enlevant ses citoyens, est une obscénité. Et la preuve que ce dénommé Macron n’a pas la moindre notion de ce qui se passe en-dehors de sa très haute opinion de lui-même. Au Québec, dans mon enfance, on l’aurait baptisé de “‘ti-Joe connaissant” et ça n’était pas un compliment.

“Ne pas humilier Poutine”…et on se demande encore de quoi ces deux-là ont bien pu deviser durant leurs causeries de gens ‘bien élevés’ qui n’appellent jamais les choses par leurs noms ?(Comme on aimerait entendre un rapport ‘fuité’ d’un interprète.)

Et puis, ça veut dire quoi, “ne pas humilier” quelqu’un qui ne respecte rien ni personne ? Cet homme comprend la peur, il comprend le chantage, il comprend la force, et l’exercice brutal et sans réserve du pouvoir . Alors, expliquez un peu, Monsieur Macron, au lieu de faire des bruits inutiles avec votre bouche: comment entendez-vous éviter “l’humiliation” à Poutine?

(Soit dit en passant, je suis certaine que vous n’êtes pas le premier petit vaniteux qu’il croise dans sa carrière d’autocrate, et s’il n’a pas déjà identifié vos failles, n’oubliez pas que le monsieur a fait du judo.)

*

Rangeant de vieux papiers, je tombe sur deux citations du romancier ukrainien Andreï Kourkov.

La première : “Les idéalistes fous n’existent plus en tant que classe. Restent les pragmatiques forcenées…”

Et celle-ci :

“Naie pas peur. C’est dangereux d’avoir peur.“*

*

Cela dit, puisqu’il est question de menace nucléaire dans tout ça et que Monsieur Macron en parle avec son bagout et son inconscience habituels, j’aime bien ces deux entretiens avec Bernard Laponche, ingénieur “pilier de la lutte contre l’atome”, publiés sur Reporterre. Et s’il y a quelque chose à craindre, ça se trouve surtout du côté de notre dépendance en continu sur des leaders sans autre perspective que celle de la contemplation de leur propre nombril.

*Andreï Kourkov, Le Pingouin, éditions Liana Levi, 2000

(Illustration: cette photo apparaît dans mon Manuel de langue russe à l’usage des francophones, Moscou 1977. Malgré le gentil sourire, on se prend à s’interroger sur le sort ultime de la colombe, servant ici de faire-valoir, vouée au sacrifice, comme d’habitude.)

*

“Will you stop bothering us with this war that does not concern us in the least here in France!” writes the lady. (I read three times to make sure I hadn’t jumped over a word.) Maybe there’s a planet called France out in space? Radio waves reach it from planet Earth? She’s right, it’s really too much of a bother, the lady has better things to do with her time than to read those horrors about a world a hundred billion light years away, at the other end of her galaxy.

(I’m sure that if she lives in the France located on planet Earth, she would agree with Macron that “we mustn’t humiliate Putin” because, after all, there’ll be need to negotiate at some point. Even bringing up the topic of negotiations and being polite with the attacker destroying a neighbouring country is obscene. And proof the man does not have the slightest notion of anything going on outside the high opinion he has of himself. In the Québec of my childhood, he would have been called a “littl’ Know-it-All” and it wasn’t considered a compliment.

“Mustn’t humiliate Putin”…and people still wonder what those two found to talk about during their cozy tea-time chats between well-brought up people who never call things by their name ? (And wouldn’t we just love to hear a leaked report from an interpreter.)

Besides, what does it mean, ‘not humiliating’ someone who respects nothing and no one? That man understands, fear, he understands blackmails, he understand force, and believes in the exercise of blunt, brutal power. So, explain: instead of making useless sounds with your mouth, Monsieur Macron, tell us how you intend to avoid “humiliation” for Putin?

(In passing, I’m sure you are not the first little vain one he has met in his career as an autocrat, and if he hasn’t identified your weak points already, don’t forget the man trained in judo.

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Sorting through old papers, I come across two quotes from Ukrainian novelist Andrey Kurkov.

The first : “Crazy idealists don’t exist as a class anymore. There remain fierce pragmatists…

And this second one:

Don’t be afraid. Being afraid is dangerous.”*

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That said, when talk veers toward the nuclear threat and since Macron yammers about it with his usual glibness and unawareness, I very much appreciate the two interviews published by Reporterre with engineer Bernard Laponche, French “pillar in the fight against the atom” (In French but I suppose an automated translation system would convey the essentials.)If there is anything to fear, it is mainly our ongoing dependency on leaders with no other perspective than the contemplation of their own navel.

*Andrey Kurkov, Death and the Penguin, Vintage Books 2003

(Illustration: the photo appears in my copy of a Russian Language Manual for French-speakers, published in Moscow in 1977. Despite the sweet smile, one has to wonder about the dove’s ultimate fate, used here as a vanity prop, to be sacrificed, as usual.)

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