sans titre / untitled

Ma copie est en anglais alors je résume ici ce qui vient avant l’ouverture du roman :

Un major de la milice est en voiture lorsqu’il aperçoit un milicien, debout avec un pingouin. “Amène-le au zoo,” ordonne-t-il. Quelque temps plus tard il revoit le même au bord de la route, toujours avec le pingouin. “Kess tu fous? Je t’avais dit de l’amener au zoo,” dit-il.C’est chose faite, camarade major,” dit le milicien, je l’ai amené au cirque aussi. Et maintenant, nous allons au cinéma.”

Le Pingouin d’Andreï Kourkov existe en traduction française.*

*Andreï Kourkov Le Pingouin, traduction de Nathalie Amargier, Liana Levi, 2022

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Je passe sur les plus récentes images de cette guerre à laquelle nous sommes conviés en tant que spectateurs pendant que d’autres font, défont, détruisent, violent, tuent (mais ne ressuscitent pas les morts qu’ils ont causés). Ni mon chagrin ni mon indignation sont de la moindre efficacité en la matière et s’il y a une déferlante de réfugiés – ukrainiens et autres – en quelque part, elle semble soigneusement éviter notre petit bled dans le sud-ouest de la France.

Je me contente donc de partager cet extrait de l’histoire récente de la Russie, telle que présentée aux fonctionnaires chinois par leurs dirigeants: “…Staline…était un leader modernisateur dont les purges sont aller trop loin, mais au départ, elles étaient ‘en quelque sorte une nécessité’ étant donné les menaces auxquelles l’Union soviétique était soumise.”

Avis à ceux et celles qui croient aux appels à la “paix” des leaders chinois, ceux-là même qui font disparaître les ouïgours dans un silence édifiant de nos valeureux défenseurs de la démocratie à la sauce entrepreneuriale.

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Entre 2004 et 2018, j’ai écrit un roman par année, en moyenne. J’en ai adressé quelques-uns à des agents littéraires, sans trop y croire. Ils et elles n’y ont pas cru non plus. L’humanité ne s’en portera pas plus mal.

J’écris, encore et toujours, chaque jour. Mais depuis, j’ai perdu le goût et l’envie de porter des écrits de fiction de leur premiers balbutiements à leurs conclusions. J’écris comme une façon d’être. D’autres personnes vivant seules gardent la radio ou la télé allumée pour l’illusion d’une présence humaine. Personnellement, je note ce qui me passe par la tête. Si j’étais le moindrement portée sur le mysticisme, je dirais que c’est l’équivalent d’une méditation zen où on regarde défiler ses pensées comme s’il s’agissait de nuages. Je note des nuages, en somme.

On peut le comprendre aussi comme un lent désistement d’une manière de vivre – qui n’empêche en rien l’amour constant que j’éprouve pour les livres bien écrits. Et si l’on envisage l’écriture comme le mouvement musculaire transférant des mots depuis le cerveau jusqu’à la page ou à l’écran, alors oui, j’étais, je suis, et je continuerai sans doute d’être un écrivain (ce mot, pour moi, décrivant la fonction de la personne qui écrit, et non pas celui ou celle qui l’exécute, je ne vois pas l’intérêt de le “genrer”.)

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This, prior to the opening of the novel:

A milita major is driving along when he sees a militiaman standing with a penguin.

Take him to the zoo,” he orders.

Some time later the same major is driving along when he sees the militiaman still with the penguin.

What have you been doing?” he asks. “I said take him to the zoo.”

“We’ve been to the zoo, Comrade Major,” says the militiaman, “and the circus. And now we’re going to the pictures.”**

**Andrey Kurkov, Death and the Penguin, translated by George Bird, Vintage, 2003

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I’ll pass on the latest images of the war to which we are invited as spectators while others do, undo, destroy, rape, murder (but do not ressuscitate the ones they have killed). Neither my sorrow nor my indignation are of any use to anyone in this matter and if there is a surge in refugees – from Ukraine or elsewhere – it is carefully avoiding the tiny town where I live in southwestern France .

So I’ll settle for sharing the following excerpt of the recent history of Russia, as presented to Chinese civil servants by their leaders: “Stalin…was a modernizing leader whose purges went too far but initially ’were something of a necessity’  given the threats to Soviet rule. »

A notice to all who believe in China’s calls for “peace”, the very same ones who “disappear” the Uighurs amid the edifying silence of our entrepreneurially-minded defendors of democracy.

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Between 2004 and 2018, I wrote on average one novel every year. I sent some of them to literary agents, without too much conviction. They weren’t convinced either. I don’t consider this a loss for humanity.

I still write every day. But I’ve lost all desire to build and maintain a piece of fiction from first murmurs to their conclusion. I write as a way of being. Other people who live alone keep the radio or the TV running to create the illusion of a human presence. Personally, I jot down what goes through my head. If I were the slightest bit inclined toward mysticism, I would say it’s the equivalent of a zen meditation where you’re supposed to watch the thoughts drifting by in your head, as if they were clouds. So you might say I’m jotting down clouds.

It can also be seen as a slow withdrawal from a way of life – which does not in any way affect my abiding love for well-written books. And if writing is considered as a muscular movement transferring words to a page or screen, then, yes, I was, I am, and probably will continue to be a writer.

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