10 décembre 2025

Pendant que je parlais, une vieille femme, lippue comme une sorcière, s’appliquait des cadenas sur les lèvres, j’avais beau lui dire d’arrêter, elle en plaçait un autre qui lui attrapait la langue aussi, et ça me donnait la nausée. (La dernière image dont je ne souviens avant de m’endormir est celle de quelqu’un appliquant du ruban adhésif sur la bouche de la secrétaire de presse de la Maison Blanche.)

Et voilà ce qu’il me reste des rêves de la nuit.

En fait, je me suis réveillée et je me suis enfoncée une oreiller sur la tête “non, non, je ne me lèverai pas aujourd’hui !”

Puis, je me suis levée et j’ai constaté que quelqu’un avait consulté ce que j’ai noté le 7 octobre dernier. Moutons aux yeux effarés…euh…aux bunkers ? Aux collines ?

*

Oui, et pour l’essentiel hier soir, nous étions six au Tir’Chaille* et nous avons partagé des silences (longs, accablés) et des rires désolés aux anecdotes des culs-de-sac administratifs systémiques rencontrés par les uns et par les autres. Que reste-t-il de représentatif dans une démocratie qui ne représente qu’une minorité des habitants d’un territoire ? Des six, deux ne votent plus du tout, l’une n’a pas le droit de vote dans ce pays (moi-même) et les trois autres n’en peuvent plus de voter, non pas “pour”, mais “contre” un choix encore pire.

Nous avons convenu de nous revoir quand même parce que, dans le poème de René Char, l’ouragan allait sans doute venir, mais ça n’est plus une vague éventualité, nous sommes déjà dans les ressacs avant le tsunami, la moindre des choses, c’est de ne pas sombrer seul.

Oui, le texte que j’ai traduit hier est de ceux qui foutent le mouron de l’impuissance. Boudu que nous pouvons êtres cons ! “Ah mince et purée de pois secs, peut-être qu’on n’aurait pas dû faire ça, hein ?”

*Tir’Chaille : le mot a diverses significations, mais dans la langue du territoire d’origine de Rustine, ça signifie “lance-pierre”, comme celui de David contre Goliath, par exemple, dans les temps plus rustiques de moyens rustiques de guerre. Ce tir’chaille-ci fait cantine libre tous les jeudis, hébergements d’urgence et réparations de vélos.

*

While I was talking, an old woman with hanging lips like those of a witch, was applying locks to her lips, no matter how much I told her to stop it, she was putting on new ones that grabbed at her tongue also, and it made me nauseous. (The last image I recall before falling asleep was of someone applying masking tape to the mouth of the White House press secretary.)

And that’s what remains of the dreams of the night.

In fact, I woke up and covered my head with the pillow “no, no, I won’t get up today !”

Then, I got up and saw that someone had consulted what I jotted down last October 7th. Sheep with frightened eyes…uh…to the bunkers ? to the hills ?

*

Yes, and essentially last night, there were six of us at the Tir-Chaille* and we shared silences (long, heavy) and sad laughter of recognition to the anecdotes of blind administrative alleys experienced by the one and the other. What is left that is representative in a democracy that no longer represents the majority of the inhabitants of a territory? Of the six, two no longer vote at all, one has no right to do so in this country (myself) and the three others are fed up of constantly having to vote, not “for” but “against” an even worse choice. ,

We agreed to meet again anyway because if in the poem by René Char, the hurricane would probably come eventually, but still remained a vague eventuality, we are already in the surf preceding the tsunami and the least we can do is not sink alone.

Yes, the text I translated yesterday, is one that makes you sick with helplessness. Such shmucks we can be! “Oh golly gee, I guess we shouldn’t have done that, huh ?”

*Tir’Chaille: the word has different meanings but in the talk of the area Rustine comes from, it means a slingshot – a bit like that David used against Goliath, maybe, in the more rustic days of rustic means of war. This tir’chaille offers a free canteen on Thursday, emergency shelter and bicycle repairs.

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