6 septembre 2025

Le cahier dans lequel j’ai fait cette expérience de noter mes rêves depuis le 1er janvier, est presque terminé. Je ne sais pas si je continuerai de la faire de façon aussi systématique quand il sera terminé. Deux rêves, la nuit dernière, avant une longue période de réminiscences de mes 4e et 5e années de vie, déterminantes pour tout ce qui suivit. Dans le premier rêve, la situation d’une femme sous emprise faisait l’objet d’une analyse par deux chercheuses en sciences sociales, après une séance d’abus verbaux particulièrement cruels, la femme en question disait qu’elle aimait encore, éventuellement, elle se libérait de l’influence de cet homme à un prix très élevé pour son statut professionnel et sa santé, mais disait “c’est ce qu’il en a coûté, c’est comme ça, et c’est tout”; puis, un petit être (enfant, petit chat ? petit chien? ça n’était pas clair) mourrait, et celui dont il avait été l’ami, le compagnon et le confident se foutait de lui sur les réseaux sociaux, j’en était très choquée et je tentais de rattraper dans un texte qui me valait des moqueries cruelles parce que “le respect n’était plus de mode.”

Ce qui ne fait pas le moindre doute, quand un criminel avéré comme Netanyahou, traite les familles des otages et leurs manifestants de “fascistes”, parce qu’ils s’opposent à la destruction monstrueuse des habitants de Gaza, destruction dans laquelle seront aussi emportés les otages et les soldats qui auront participé à ces actions. Dans ce dernier cas, destruction soit par la mort dans un combat inacceptable, soit destruction de toute probité personnelle. Comme l’écrivait Hannah Arendt, ils seront condamnés à vivre le restant de leur vie avec le criminel qu’ils auront accepté de devenir, en connaissance de cause des gestes qu’ils auront posés.

*

Longue période d’éveil au milieu de la nuit, avec des réminiscences de ma 4e et de ma 5e année de vie, déterminantes pour la suite de mon parcours. Mon père au travail, mes deux soeurs à l’école, longues journées avec une femme, notre mère, qui souhaitait visiblement se retrouver seule, enfin. Occasion, notamment, d’un premier doute au sujet de Jésus : lors de l’une de ses fulgurances, elle m’avait conduite dans la chambre que je partageais avec mes soeurs en claquant la porte si fort derrière elle que le crucifix au mur s’en était détaché. Tombant au sol, le bras gauche du Christ en croix s’était cassé et j’étais restée un long moment à le regarder en me disant que la moindre des choses serait qu’il se répare, n’est-ce pas ? Et il n’en faisait rien ! S’il n’était même pas fichu de réparer son propre bras, comment compter sur lui ? Premier pas dans mes “dérives” théologiques…

*

Ouvert Assomption de Françoise Morvan à la 4e section. J’ai le livre en deux copies car j’en avais commandé un à offrir à une amie – qui me l’a rendue, car elle n’avait pas aimé. Ce qui est désarçonnant – parfois même, affligeant – lorsqu’on s’aperçoit qu’on a affublé quelqu’un de qualités qui lui sont étrangères – projection de nos propres désirs. C’est souvent le cas. La déception est forte, chaque fois.

Cette Section IV – Orée d’Armoise – s’ouvre sur

Humilité

Passé l’Assomption fini la gloire de l’été

Dit le prêtre en soutane à reflets roux

Et la femme au foulard soupire

On entre dans l’humilité de septembre

Les mains posés sur son chiffon de laine 

Lustré d’usage et portant une odeur de cire

Elle s’incline vers l’autel d’où l’or ruisselle

Sur la soie mauve du foulard

Puis un souffle de vent chasse un nuage

Et le soleil disparaît du vitrail

Les flammes des cierges flageolent

Légers soupirs espoirs des vies déçues.

Françoise Morvan*

*Françoise Morvan, Assomption, Editions Mesures, 2019

3 comments

  1. “la moindre des choses serait qu’il se répare” …
    Au delà du sourire bienvenu, je me souviens qu’enfant, j’ai été terriblement choqué quand j’ai compris que les adultes n’avaient pas toujours raison, ni un regard juste sur le monde.
    A qui faire confiance, alors, et à quoi bon grandir ?

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