16 août 2025

J’avais dû placer mes deux enfants (I garçon, 1 fille) en pension parce qu’avec mon travail, je ne pouvais pas m’occuper d’eux, j’allais les récupérer, je disais au garçon de se préparer à rentrer à la maison, la fille, elle, refusait, elle m’en voulait terriblement et je ne savais pas quoi faire pour l’atteindre; puis, une foule ingérable dans laquelle j’étais supposée écrire un texte, le soumettre, le faire approuver dans une bousculade, ambiance à la fois de kermesse et d’insurrection, les gens commençaient une tâche, la laissaient en. plan, j’en pouvais plus, un peu d’ordre ! un peu de suivi ! c’était impossible, ingéré et ingérable.

L’ambiance “pour de vrai”, qu’on le veuille ou non. Dernières images hier soir : celles de cette mise en scène immonde des retrouvailles scénarisées “rencontre entre vieux copains”, puis la scène immonde du “point de presse” où Poutine se payait la tête des journalistes houspillés, bousculés comme du bétail, ordonnés d’en finir “thanks for asking! ” “move on !” “time’s up!” — et je ne sais même pas encore ce que nous sommes sensés savoir des résultats officiels produits dans ce capharnaum sorti tout droit de l’enfer.

Apparemment, Jeffrey Epstein, le pédophile condamné qui fut le grand copain de Trump pendant des années, aurait dit à son sujet : “Moi, je suis un pervers assumé, lui c’est un type sans aucun scrupule”. Crimes sexuels et autres, le jugement s’applique tout aussi bien aux deux ordures qui se sont rencontrés hier en Alaska.

*

Alors. Raison garder par temps insensés. L’asile psychiatrique, c’est ici, c’est maintenant et c’est partout, ne pas oublier que tout comme dans les asiles psychiatriques soviétiques, la plupart des patients ne sont pas fous et la majorité du personnel est soit criminel et ravi de l’être, ou terrorisé à l’idée d’être basculé dans le camp des malades.

Nous sommes, à bien des égards dans le récit de Boulgakov, nous sommes dans Le Maître et Marguerite de Boulgakov. Dans ma copie* en bas de la page où le malheureux Sans-Logis s’empare d’une petite icône en papier crasseuse dans une cuisine communautaire qui l’est tout autant, il y a un poème de Mandelstam dans son mot à mot qui dit : “Nous resterons ensemble à la cuisine/Le pétrole blanc a une odeur douce. //Un couteau pointu et une miche de pain./Si tu veux, remplis le primus à bloc,//Ou, sinon, rassemble des ficelles/Pour attacher le panier avant l’aube//Pour que nous partions à la gare/Où plus personne ne puisse nous trouver.

Ou, personnellement alors, dans la nouvelle pas encore terminée, débutée dans Le Grand Livre des Soins Prescrits, intitulée Rostov pour ce cadran en bakelite ivoire dont le patient de la chambre (57 ? c’est bien ça ?) affirme qu’on a volé les aiguilles ainsi que la moitié des heures.

Tenir. Tenir. Tenir. Tenir.

*Mikhaïl Boulgakov, Le Maître et Marguerite, traduit du russe par André Markowicz et Françoise Morvan, éditions inculte/dernière marge 2020 pour la traduction française

*

I had had to put my two children (1 boy, 1 girl) in a boarding school because, with my job, I couldn’t take care of them, I had gone to pick them up, I was telling the boy to prepare his stuff for coming home, the girl refused, she resented me something awful and I didn’t know what to do to reach her; then, an unmanageable crowd in which I was supposed to write a text, submit it, get it approved in the crush, the mood was a mix of a fair and an insurrection, people would start a task, drop it before it was done, I couldn’t take it anymore, a bit of order ! a bit of follow-through ! It was impossible, unmanaged and unmanageable.

The mood “for real”, whether we want it or not. Last images last night: those of that despicable scene of the staged “reunion of old buddies”, followed by the despicable “scrum/press conference” where Putin was making fun of the journalists being nagged, driven like cattle, ordered to get it over with “thanks for asking!” “move on!” “time’s up!” — and I haven’t even seen yet what it is we are supposed to have learned of the official results in that capharnaum straight out of hell.

Apparently, Jeffrey Epstein, the condemned pedophile who was Trump’s great friend for years would have said concerning him: Myself, I’m a pervent, him, he’s a man without any scrupules.” Sexual crimes and others, the judgment applies just as well to the two scumbags who met yesterday in Alaska.

*

So. Staying sane in crazy times. The psychiatric asylum is here, it is now, and it’s everywhere, never forgetting that, just like psychiatric asylums of the Soviet era, most of the patients are not crazy, and most of the staff is either a criminal and delighted to be so or terrorized at the thought of being dumped into the patient category.

In many respects, we are in Boulgakov’s tale of The Master and Margarita. In my copy (see reference above), at the bottom of the page where the poor Bezdomny grabs a grubby paper icon in a just as grubby communal kitchen, there is a word for word rendition of a poem by Mandelstam that reads: “We will stay together in the kitchen/the white oil has a soft smell.//A sharp knife and a loaf of bread./If you want, fill up the primus stove,//Or, otherwise, gather up some strings/To tie the basket before dawn/So that we can leave for the station/Where no one will be able to find us.”

Or then, in the unfinished short story begun in the Great Book of Prescribed Care, titled Rostov for that alarm clock made of ivory-colored bakelite about which the patient in room…(57? Is that right?) claims the hands have been stolen, along with half of the hours.

Holding on. Holding on. Holding on. Holding on.

2 comments

  1. Oui, “tenir, tenir, tenir”
    Et oui aussi, a lire la presse quotidienne , les malheurs des autres nous offrent d’ appréciables distractions …quoique la majeure partie du temps, nos petits ennuis nous retiennent de considérer les soucis des autres.
    (Je ne vous inclue pas dans les “nous” qui émaillent ce commentaire, l’égoïsme commun ne me paraissant pas vous caractériser. )

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    • D’une manière ou d’une autre le “nous” fait partie du décor, mais vous avez raison, à rester attentif à ce qui se passe plus loin que le bout de son propre nez, ça relativise l’importance de bien des soucis plus personnels 🙂

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