Un petit arbre dans un pot de terre cuite vernissée, style bonsai, avec des feuilles qui ressemblaient à un jade gris-brun; puis il y avait une fête entre amis, un truc sympa où l’une des personnes chantait, les autres appréciaient, j’étais restée en retrait, sans participer, à la fin le compagnon de l’une des personnes présentes venait vers moi et me prenait dans ses bras en me demandant pourquoi je me tenais à l’écart et je lui disais à quel point c’était dur parfois de vivre sans le moindre contact physique, sans aucun témoignage physique d’affection, il n’était pas du tout question de séduction dans son embrassade, simplement d’affection, justement, de confiance et de réconfort, du calme que procure la proximité d’un humain manifestant de l’affection, il y avait aussi un jeune ado, à l’âge de la transition, d’apparence encore quelque peu androgyne, et je me disais à quel point la présence d’une figure paternelle lui serait nécessaire pour négocier le passage de l’enfance vers cette autre chose inconnue, c’était une impression très forte de ce manque, du poids de l’absence, de sa présence silencieuse comme le nid que cet ado devrait s’y creuser, si on peut le dire ainsi.

Au réveil, le petit arbre en pot inspiré par le chapitre 6 dans le Slobodian (Le Capitalisme de l’Apocalypse) où il est question de ces communautés privées où l’on doit se soumettre à un cahier des charges allant jusqu’à préciser la hauteur autorisée des arbres. Ensuite, bien sûr, l’évidence de cette obligation faite à tant d’humains de vivre sans compagnon ou compagne fiable, et parfois même sans la présence d’amis véritables et chers à proximité, le sort d’un nombre incalculable de gens qu’on noie dans les sollicitations “d’amitié” et “d’amours” plus ou moins tarifées, en leur vantant le “chatbot” pas cher du tout et toujours présent, à toute heure du jour et de la nuit pour te dire à quel point il te comprend, et à quel point tu as raison, personne merveilleuse que tu es…

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L’illustration : C’est le cahier garant de ma santé mentale ces jours-ci. Quand je me mets à secouer la tête en pensant à ce que m’écrit ma fille dans sa dinguerie, la secouer comme ferait un cheval tentant de déloger de son oreille une guêpe qui s’y serait introduite, je sors le cahier et je lui écris ce que je lui dirais si elle était en mesure d’entendre – et de tenir – un discours sensé dans une conversation normale. Le lira-t-elle un jour ? Peut-être, comment savoir. Pour l’heure, il m’aide à garder “les pendules à l’heure” dans ma propre tête, puis de me remettre à mes occupations du jour.

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A small tree in a varnished earthenware pot, bonsai style, with leaves resembling a greyish-brown jade; then there was a gathering of friends, something friendly where one of the people sang, the others were appreciative, I had stayed behind without joining in, at the end the companion of one of those attending came toward me and embraced me asking me why I was staying aside and I told him how hard it was at times to live without the least physical contact, without the least physical expression of affection, there was nothing about seduction in his embrace, affection plain and simple precisely, something about trust and comfort, the calm you experience from the proximity of a human displaying affection, there was also a young teenager, at the age of the transition, still somewhat androgynous in appearance and I was telling myself how much he would need the presence of a father in negotiating the passage from childhood to that other unknown thing, it was a strong impression of this lack, of the weight of absence, of its silente presence like the nest this young one would have to carve out in it for himself, if I can put it in these terms.

Upon waking, the small tree in a pot inspired by chapter 6 in the Slobodian (Crackup Capitalism) where he writes about those gated communities where one must submit to a series of rules even specifying the height of trees you are allowed to plant. Followed, quite obviously, by the evidence of that obligation so many humans have to live without a dependable companion, and sometimes, even without the presence of true and dear friends nearby, the fate of a countless number of people who are drowned in pressing invitations to “friendships” and “loves” of a more or less paying character, while telling them all about how wonderful the chatbot is, and not that expensive either, and constantly available, both day and night to tell you how well he understands you, how right you are, you wonderful person you.

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Illustration : This is the notebook insuring my mental health these days. When I start shaking my head, thinking of what my daughter writes to me in her madness, shaking my head the way a horse does when it tries to get rid of a wasp that’s buzzing in its ear, I take out the notebook and write to her what I would say if she were in a condition to hear – and to hold – a conversational exchange in a sensible discourse. Will she read it some day? Perhaps, who’s to know. For the time being, it helps me keep the clocks running at the right time in my own mind and then, to get back to my daily occupations.