11 juillet 2025

Pour une raison que j’ignore, une personne en France et une autre aux Etats-Unis ont consulté les quatre chroniques publiées ici en mai 2018. Le 4 mai, avant le triple pontage avec remplacement de la valve aortique, j’avais noté ce qui suit sous le titre “Algorithmiquement vôtre” :

“Ceci, au détour d’une note de bas de page dans La société autophage*:

“À bien des égards, Leibniz fut l’un des idéologues majeurs de la modernité capitaliste, et de ses pires aspects en particulier. Ainsi il rêvait d’une “langue universelle”, simple système de signes univoques, qui éliminerait de la vie sociale toute ambiguïté. On peut y voir une anticipation de la cybernétique et de la logique binaire. Les structures de domination disparaitraient derrière des structures mathématiques.”

*Anselm Jappe, La société autophage, capitalisme, démesure et autodestruction, éditions la découverte, 2017

C’est Leibniz qui serait ravi par les LLM (Large Language Machines) constituant ce qu’on appelle les chatbots.

(On s’en approche, Gottfried. Pas tout à fait dans la boîte encore, mais ça approche !)

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La photo ci-haut est probablement celle que j’enverrais aujourd’hui à ma fille pour son 56e anniversaire si le merveilleux monde de la cybernétique n’était pas venu intensifier sa tendance héréditaire à la perte de contact avec la réalité et à rendre le monde entier responsable de ses malheurs. Je lui aurais dit comment le petit chat dont elle a sauvé la vie lors de sa visite l’année dernière a bien grandi et répond toujours à son nom, Rosa, avec un miaulement bien spécifique. Rosa aime bien s’installer sur le pas de porte pour observer son domaine. Je lui aurais indiqué comment la cuisine a maintenant un comptoir des plus utiles, fabriqué par un copain avec des restes de matériaux utilisés chez lui – peint en blanc, tout comme la table, avec un reste de peinture fourni par une copine. La toile cirée, montrant des signes d’usure, découpée pour fournir des napperons. Les petites choses de la vie, grâce à l’amitié, sans besoin de s’inventer de naissances légendaires et de mères odieuses comme celles des contes des frères Grimm ou des jeux vidéo. Avec les meilleurs voeux de santé, de créativité, et de solidarité avec les autres. Nous en aurons tous énormément besoin, vu les horreurs on ne peut plus réelles que l’humanité s’autorise à ce tournant dans son histoire.

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Rien d’autre à dire pour l’instant.

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For some unknown reason, one person in France and another in the United States looked up the four entries I made here in May of 2018. On May 4th, prior to the triple bypass and replacement of the aortic valve, I had jotted down what follows under the title “Algorithmically yours” :

“This, at the turn of a note in La société autophage* :

“In many ways, Leibniz was one of the major ideologues of modern capitalism and of its worse aspects in particular. Thus, he dreamt of a “universal language”, a simple system of unequivocal signs that would eliminate all ambiguity from social life. One can see in it an anticipation of cybernetics and of binary logic. The structures of domination would disappear behind mathematical structures.” 

Anselm Jappe, La société autophage, capitalisme, démesure et autodestruction, éditions la découverte, 2017

(We’re getting there, Gottfried. Not quite a wrap yet but close.)

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The photo above is probably the one I would send to my daughter today for her 56th birthday if the wonderful world of cybernetics had not increased her inherited tendency to lose contact with reality and blame the whole world for her woes. I would have shown her how the little kitten whose life she helped save during her visit last year has grown and still answers to her name, Rosa, with a very specific miaow. Rosa loves to settle down in the doorway to survey her domain. I would have shown her that the kitchen now has a most useful counter, built by a buddy with left-over materials he used in his place – painted white, as was the table, with leftover paint provided by another friend. The oilcloth that was showing signs of age, cut out into place mats. The small things of daily life, thanks to friendships, with no need to make up legendary births or horrific mothers like those in the Grimm brothers’ tales or in video games. With best wishes for a healthy and creative year in solidarity with others. We will all have a tremendous need of it, seeing the horrors humanity is allowing itself at this juncture in its history.

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Nothing else to say for the time being.

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