(Camille Messager – je l’intitule “Nouveau Monde”)

Rêves : tout le monde était pressé d’apprendre quelle était la dernière phrase-rengaine parce que d’utiliser celle de la veille te désignait comme terriblement dépassé; un coureur d’élite qui s’appelait François, juste avant une compétition, avec une autre personne, je partais lui acheter une bouteille d’huile d’olive pour ses crampes, en route je croisais une vieille dame qui venait chaque année l’applaudir, elle était ravie de me voir et, en souriant, elle me prenait les deux mains dans les siennes, je lui demandais si ell aimerait un café “oh oui”, disait-elle, avec l’autre personne je me rendais dans le commerce où j’achetais un café pour la dame et j’hésitais entre deux bouteilles d’huile pour finalement choisir la plus petite des deux.

En me levant ce matin, je fais tomber des bouts de papier sur lesquels je gribouille des notes; sur l’un, une phrase entre guillemets, une citation, donc, mais d’où? qui se lit “si l’horloge donne l’heure, le temps, lui, loge hors de l’horloge.”

La vieille dame dans le rêve ressemblait à Catherine, une femme qui agit en soutien à un musicien palestinien, récemment, j’ai appris qu’elle se battait contre un cancer agressif.

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La journée d’hier presque entièrement bouffée par un Que Faire ? concernant la lettre reçue par mail, illustration parfaite du cercle vicieux – toute réponse étant interprétée comme un autre exemple de tes talents de manipulatrice, et tout silence aussi. D’une façon ou d’une autre, preuve est faite qu’on est dans son tort.

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Et puis, la doxa du jour, selon Washington: l’Ukraine est responsable de la guerre déclenchée contre elle par la Russie (de un) et de deux, qu’il y a plein plein plein de fric attendant les Américains qui laissent tomber les sanctions et ré-investissent en Russie, en plus de se partager le gâteau ukrainien avec tous ces merveilleux oligarques russes qui ont tant souffert durant cette guerre interminable ouin ouin ouin.Nul besoin d’y mettre des gants : il est question de fric, de boucou boucou boucou de fric alors, hein ? Pour le président américain, manipulé comme une marionnette-chaussette par Poutine, les mots “deals juteux” déclenchent un réflexe conditionné : les Ukrainiens n’avaient qu’à pas se battre. Vite, à la curée avec les russes !

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Puis j’écris ce qui, j’espère, seront mes derniers mots ici à ce sujet : jamais en 78 ans et 5 mois d’existence, je n’avais reçu une communication plus blessante et insultante que cette invitation à franchir la supposée “porte” qu’on maintenait “ouverte” à des retrouvailles pour me sauver, notamment, de mes “tendances à l’auto-destruction”, offre dont je ne comprends d’ailleurs pas pourquoi on voudrait “garder la porte ouverte” à une créature aussi abjecte que celle décrite dans les termes scatologiques de ce message. Bonne route à l’expéditrice, qu’elle la poursuive comme bon lui semble, j’en ferai autant de la mienne. Après pareille missive, il faudrait que je sois en état de sénilité de type démence avancée pour imaginer qu’il soit encore possible de retrouver avec elle des terrains d’entente et d’affection que j’avais cru que nous avions déjà partagés et comme, à la longue, les larmes se tarissent…

Et je mets des heures pour trouver le sommeil avec l’impression qu’il s’approche à grande vitesse le moment où la parole libre sur les réseaux sociaux sera un souvenir pour nostalgiques bien “dépassés” après un message de Jean-Marc Adolphe de les humanités disant qu’il se retrouvait viré de facebook pour des publications “non conformes aux critères de la communauté”. Info à vérifier aujourd’hui, il lui arrive de réagir avant le signal du départ. Il n’empêche : tout le monde a intérêt à se munir de copies de ce qui lui tient à coeur ailleurs que sur le “cloud” et de rester branché sur le stylo-sur-papier et sur l’utilisation de l’ordi strictement comme dactylo sophistiquée. Pour internet, mails, et réseaux bourrés de mensonges spectaculaires, ça devrait tenir, comme instruments de surveillance, qui dit mieux ? “L’accélération propre à notre temps atteint aussi la fabrication de la vérité qui, à ce rythme, devient pur fantôme,” écrivait Camus. En 1950.*

Reste l’amitié. Essentiel. Un réseau comptant des contemporains et aussi des gens droits d’il y a longtemps, longtemps, longtemps et jamais “dépassés”.

*Albert Camus, L’Homme Révolté, Gallimard, Folio 1951

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Dreams : everyone was anxious to learn the catchphrase of the day because using the one from yesterday made you appear terribly dépassé; a world-class racing champion by the name of François, just before the competition, with another person, I was off to buy a bottle of olive oil he used for his cramps, on the way, I ran into an old woman who came to cheer him every year, she was delighted to see me, smiled, and held my two hands in hers, I asked her if she would like a coffee “oh yes,” she said, with the other person I went to the grocery store where I bought a coffee for the woman and hesitated between two bottles of olive oil of different sizes, before settling on the smallest of the two.

When I got up, I knocked over a bunch of scraps of paper on which I scribble notes; on one, a sentence in quotation marks, a quote then, but from where ? it reads “if the clock tells the hour, time itself resides outside the clock.”

The old woman in the dream resembled a woman I know by the name of Catherine, who is active in a group supporting a Palestinian musician; I heard recently that she was battling an aggressive cancer.

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Yesterday, the day was almost entirely swallowed up by a What to Do ? about a letter received by email, a perfect example of a Catch 22 of the damned if you do, damned if you don’t. You answer, your response is considered more “gaslighting”, you don’t, the same. One way or the other, you are in the wrong.

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Also, the word of the day, according to Washington being that Ukraine was responsible for the war against it by Russia (for one) and secondly, that there were piles of money to be made by Americans who dropped the sanctions and re-invested in Russia, besides splitting the Ukrainian cake with those wonderful Russian oligarchs who’ve suffered so grievously because of this endless war wah wah wah. No need to put on gloves; it’s about money, lots and lots and lots of money, OK? For the American president, manipulated like a sock puppet by Putin, the words “juicy deals” set off a conditioned reflex: the Ukrainians just had to stop fighting, it’s stampede time with the Russians!

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Then I write what I hope will be my final words here on this topic : never before in 78 years and 5 months of existence had I received a communication as wounding and insulting as this so-called “door kept open” to a reconciliation supposed to save me from my “self-destructive tendencies”, among other things – the reason for such an offer being incomprehensible, why one would “keep an open door” to a creature as abject as the one described with the scatalogical terms used in this message? Safe travels to the sender, may she follow her own path as she sees best, I’ll do the same on mine. After such a letter, I would have to be in a state of advanced senile dementia to imagine it still possible that we ever meet again on the grounds of interests and affection I believed we had once shared, and since, over time, tears become unavailable for shedding…

And I spend hours attempting to find sleep with the feeling that the moment is fast approaching when free speech on social media will be a memory from the past. No later than yesterday, Jean-Marc Adolphe of les humanités claimed he had been booted off facebook for publications “not respecting community standards”. Information I’ll check today, since he sometimes takes off from the starting blocks before the starting gun. Still: the days are fast approaching when everyone will be well advised to keep copies of stuff they care about elsewhere than on the “cloud” and to stay connected to pen-on-paper as well as to the use of a computer strictly as a sophisticated typewriter. As for internet, emails and such, I expect they’ll carry on, such great surveillance tools, who has better ? “The acceleration typical of our time also touches the fabrication of truth which, at this rate, will turn into a ghost”, Camus wrote. In 1950.

There remains friendship. Essential. A network made up of contemporaries and also of righteous people from a long long time ago, yet never “dépassé“.