7 janvier 2025

Rêve : “J’ai tellement hâte que mes parents se séparent, ensemble, ils sont infects, alors que séparément, ils sont super gentils avec moi”, dit la gamine à quelqu’un, pendant que je visite quelqu’un d’autre, notant qu’il a recouvert ses étagères de papier journal, comme les miennes, mais que ses livres ne ressemblent pas du tout aux miens – beaucoup de Jean Genet, entre autres, ah bon ?

Le reste du rêve s’estompe parce que les yeux qui s’ouvrent vers 4 heures du matin refusent de se refermer. À laquelle des pensées qui bouillonnent s’amarrer ?

Artonef, hier soir. Aucune envie de dessiner, je feuillette des livres d’art, des images de montagne me retiennent, je m’en sers pour griffonner les données essentielles de huit scènes différentes dans L’Horloger, puis je feuillette des vieux Télérama, en tirant des pages en relation avec ce récit, ou alors, concernant Poutine et l’Ukraine et ce, en relation avec l’extrait de vidéo vu hier où un Américain, connu apparemment, interroge Zelensky sur les coûts d’une négociation de “paix” et dit, d’une voix d’enfant inconscient et gâté que, bien sûr, le pardon sera difficile mais…Et Zelensky réplique, le pardon ? Le PARDON ? Non mais…et chacun de ses mots résonnent devant cette inconscience tranquille et sûre d’elle-même affirmant que ce serait à l’offensé, toujours, de pardonner l’offense. Surtout, surtout, que ma vie tranquille ne soit plus dérangée par ces histoires. De tout temps, n’est-ce pas, Caïn a tué son frère Abel, qu’est-ce qu’on y peut, c’est la vie, c’est la mort, c’est comme ça, soyez raisonnable, voyons, c’est vous qui acceptez qu’on tue les vôtres par refus de vous plier aux ordres du criminel,

et toute cette veulerie jolie et lénifiante.

Jolie, lénifiante, souriante , agréable, raisonnable, le passé, c’est le passé oublions par pitié, soyons amis, ou du moins, faisons semblant pour la galerie, pour les photos pleines de sourires, n’est-ce pas qu’ils sont bien, il est tellement un bon soutien de famille, et elle, si adorable et le bébé si adorable aussi…et cetera, et cetera, les photos demeurent, voyez-vous, ainsi que les cartes de Noël et les meilleurs voeux à l’occasion de votre anniversaire. Toute la mousse et l’écume, faisons des bulles de savon ensemble, que le monde pense que nous sommes sans soucis, heureux et unis comme des jumeaux siamois. Car au final, dans cette version des choses, c’est ce que les autres croient qui compte, et non pas ce qui est vrai.

Une autre entrevue m’a importé tout autant hier: celle de la comédienne Kim Yaroshevskaya qui a maintenant 102 ans, née à Moscou en 1923, orpheline à l’âge de cinq ans lorsque sa mère s’est suicidée pendant que son père disparaissait dans les prisons, élevée jusqu’à l’âge de 10 ans par sa grand-mère qui avait survécu aux horreurs en Ukraine mais mourut de cancer après avoir confié l’enfant à des parents éloignés à Montreal où Kim (nom-acronyme en l’honneur des Jeunesses communistes internationales) ne parlant ni le français ni l’anglais au début, développa un personnage à la télévision pour une émission pour enfants. J’ai particulièrement apprécié sa réponse à la question concernant une “âme russe” imaginaire qu’elle a tout simplement rejeté, la jugeant insignifiante. Des âmes individuelles ? Très certainement, c’est ce qui rend chacun de nous précieux, mais une âme collective ? Une telle chose n’existe pas. Et sa vision sur les horreurs du passé, formant le sous-bassement de la personnalité sur lesquelles on ne doit pas constamment s’attarder au risque de ne pas vivre le présent. Une vision bien différente de la relation au traumatisme que celle se réclamant éternellement du rôle de la victime. Un socle, pas une excuse. Et l’équilibre fragile entre les deux.

*

Dream: “I’m so looking forward to my parents separating, together, they are unbearable, whereas separately, they are super nice to me,” says the kid to someone, while I’m visiting someone else who has covered his shelves in newspaper, like mine, but whose books don’t resemble mine at all a lot of Jean Genet, among other things, oh ?

The rest of the dream fades away because of eyes that open at 4 AM and refuse to close again. Which of the swirling thoughts to latch onto ?

Artonef, last night. No desire to draw, I leaf through art books, images of mountains hold my attention, I use them to scribble out essential elements for eight different scenes in L’Horloger, then I leaf through old Téléramas pulling out pages relative to this tale or about Putin and Ukraine this last because of a video excerpt I saw yesterday where an American, who is known apparently, was querying Zelensky on the costs of a “peace” negotiation and said, with the voice of a unaware child life has spoiled that, of course, forgiving will be difficult but…And Zelensky replies, forgiving ? FORGIVING ? What the…and each of his words resonate in front of this quiet and self-assured unawareness that states the offended one, always, must be the one to forgive the offender. But mostly, mostly, may my quiet life no longer be distrubed by these affairs. From all times, yes? Cain has killed his brother Abel what can we do about it, that’s life, that’s death, be reasonable, please, you are the one accepting that yours be killed off by your refusal to bend to the orders of the criminal.

and all that pretty soothing cowardice.

Pretty, soothing, smiling, pleasant, reasonable, let bygones be bygones by golly gee, let’s be friends, or at least, pretend that we are for the gallery, for the smiley-smiley photos, aren’t they nice, is he a wonderful provider, isn’t she a darling of a woman and the baby, so adorable…etc etc etc, the photos remain, you see, the Christmas cards and best wishes on your birthday. All the froth and foam, let’s blow bubbles and let the world think we are carefree and happy and united like Siamese twins. Because what really counts in this version is what other people think, not what is true.

Another interview mattered just as much to me yesterday: that of the actress Kim Yaroshevskaya who is now 102 years old, born in Moscow in 1923, orphaned at five when her mother committed suicide while her father was in jail and disappeared there, raised until the age of ten by her grandmother who had survived the horrors in Ukraine but died of cancer after entrusting the child to distant relatives in Montreal where Kim (named for Kommunisti Internazhional Molodyets – my Russian transliteration is lousy) speaking neither French nor English at first, developed a TV character for a children’s program. I especially loved her response to the interviewer’s query about some imaginary “Russian soul” or other which Kim simply batted into insignificance. Individual souls ? Certainly, that’s what makes everyone of us precious, but a collective one ? No such thing. And her vision concerning the horrors of the past, as forming the underpinning of a personality on which one must not constantly keep one’s eyes at the risk of not living the present. A very different view of the relationship to trauma than the one of those forever claiming the role of the victim. A grounding, not an excuse. And the fragile equilibrium between the two.

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