
Rêves : un homme (que je suis supposée connaître dans le rêve) m’invite à manger au restaurant La Cantine, endroit où des étudiants cuisiniers préparent des plats de qualité à bas prix, il veut y commander un plat à base de dinde, je commande autre chose; suivi d’un rêve que j’ai oublié; puis l’ombre gigantesque d’un lynx se profile à flanc de montagne, est-ce un vrai, ou un effet de loupe causé par une ombre dans une goutte d’eau ?; puis, je travaille dans un bureau, quelqu’un vient me dire qu’on a déposé quelque chose pour moi à la réception, il s’agit de l’une de ces enveloppes pour les transmissions inter-départementales, elle contient des lettres et le reste d’une pelote de fil à tricoter de couleur rouille, avec les aiguilles.
Ce dernier rêve mérite que je m’y attarde car il fait référence à un événement réel bien qu’à peine croyable : c’était en 1975, je travaillais comme traductrice pour la compagnie ferroviaire Canadian Pacific, nos bureaux se trouvaient au-dessus de la gare Windsor à Montréal. Effectivement, quelqu’un était venu me dire qu’une femme (un nom espagnol qui ne me disait rien) me réclamait en bas dans la salle des pas perdus de la gare. Intriguée, j’étais descendue et j’avais trouvé une femme d’un certain âge, tenant un paquet et une feuille portant mon nom. Elle m’apportait, disait-elle, les vêtements que m’avait tricotés Rosa – une jupe et une veste dans ce fil de coton de couleur rouille qui m’avait bien plu. Mais il y avait des années de cela ! Oui, m’a dit la dame, elle était une amie de la famille, Rosa était retournée au Chili après ’73, mais elle n’avait pas oublié qu’elle me “devait” ces vêtements qu’elle avait tricotés là-bas, et confiés à cette femme, avec mon nom et mon lieu de travail précédent. Cette femme s’était renseignée, on lui avait dit que je travaillais dorénavant au Canadian Pacific et voilà, elle était venue s’acquitter de sa mission. De Rosa, elle ne pouvait rien me dire, si ce n’est qu’on était sans nouvelles d’elle depuis des mois.
Voilà.
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Hier, pendant plus d’une heure, l’amie m’a raconté les jours, puis, les heures qui ont précédé l’annonce du suicide de son ami. Comme si elle examinait chaque fragment des derniers moments dans leur histoire, espérant retrouver celui qui permettrait de reconstituer un vase fracassé. Le besoin de comprendre, impossible à combler; le suicidé a gardé les réponses pour lui.
J’écoute, parce qu’il n’y a rien d’autre à faire.
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Deuxième nuit d’attaques russes contre Kyiv; l’indifférence/distraction des Occidentaux – y compris au déploiement de troupes nord-coréennes en Europe ! – est une occasion à ne pas rater. Aux Etats-Unis, Trump et ses appuis se déchaînent – le commentateur Tucker Carlson comparant Trump au papa qui viendra corriger sa fifille (Kamala Harris) quand il entrera à la maison (Blanche), oui une fessée sévère pour la mauvaise fifille dit-il, comme le malade profond qu’il est. Ça passe, comme tout le reste, dans la déferlante des bassesses.
Pour une raison que j’ignore, mes pensées ce matin sont sur la ville sous-terraine qu’habite l'”Ogresse” dans les récits entourant L’Horloger des Brumes.
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Dreams : a man (I’m supposed to know him in the dream) invites me for a meal at La Cantine, a place where student chefs prepare quality meals at low cost, where he wants to order a dish based on turkey, I order something else; followed by a dream I’ve forgotten; then a gigantic shadow of a lynx on a mountain side, is it a real one or the magnifying glass effect of a shadow reflected in a raindrop?; then, I’m working in an office, someone comes to tell me something was left for me at the reception desk, it consists of one of those inter-departmental envelopes, it contains letters I don’t read and the rest of what remains of a ball of rust-colored yarn, with the knitting needles attached.
This last dream deserves I spend some time on it since it refers to a real although barely believable true event: it was in 1975, I worked as a translator for Canadian Pacific railways, our offices were above Windsor station in Montreal. True enough, someone came to tell me a woman (with a Spanish name I didn’t know) was asking for me down in the station. Intrigued, I went down and found an older woman, holding a parcel and a piece of paper with my name on it. She was bringing me the clothes Rosa had knitted for me, she said – a skirt and vest in that rust-colored cotton yarn I had liked. But that was years earlier! Yes, she said, she was a friend of the family, Rosa had gone back to Chili after ’73, but she hadn’t forgotten that she “owed” me these clothes which she knitted over there and gave over to the woman along with my name and my preceding place of work. This woman had enquired and been told of my new place of work, so she had come to acquit herself of her mission. About Rosa, she couldn’t tell me a thing, other than the fact the family had been without news of her for months.
Voilà.
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For over an hour yesterday afternoon, my friend went over the days, then the hours that came prior to the news of his suicide. As if examining each fragment of the last moments in their story, hoping to find the one that would allow a reconstitution of the smashed vase. The need to understand, impossible to satisfy; the one who committed suicide kept the answers to himself.
I listen, because there is nothing else to be done.
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Second night of Russian attacks against Kyiv; the indifference/distraction of Westerners -including to the deployment of North-Korean troops in Europe! – is an opportunity not to be misses. In the United States, Trump and his supporters lash out – the commentator Tucker Carlson comparing Trump to a daddy who’ll give a good spanking to his daughter (Kamala Harris) when he comes home (to the White House), yes a severe spanking for the bad bad girl, he says, deeply sick man that he is. His words stream by like all the rest, in the flow of vileness.
For some reason, my thoughts this morning are on the underground city where the “Ogress” lives in the tales around L’Horloger des Brumes.