14 avril 2024

Un peu après minuit, je me réveille avec l’impression d’entendre une voix de femme parlant en anglais (comme celle d’une reporter à la télé). J’allume l’ordi: l’Iran a commencé son action de représailles contre Israël avec quelques centaines de drones et de missiles. Je suis les infos à partir de trois sources : Haaretz, The New York Times et Reuters. Il est maintenant 2h30 et je vais tenter de dormir. À date, les drones et les missiles ont été interceptées; il y aurait eu de légers dommages à l’une des deux bases militaires dans le Negev (soit celle de Nevatim près de Beersheva ou celle de Ovda près d’Eilat). Tout le monde en alerte maximale, l’Arabie Saoudite vient d’exprimer sa “profonde inquiétude” appelant “toutes les parties en cause d’exercer ‘la retenue maximale’ et d’épargner la région et ses habitants des dangers des guerres.”

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À 8h10 : 297 des 300 drones et missiles lancés par l’Iran auraient été abattus par Israël ou ses alliés; un garçon de 10 ans d’une communauté Bédouine blessé par des retombées; de “légers dommages” rapportés à la base aérienne de Nevatim. Réunions (ONU, G-7) prévues aujourd’hui. Je n’entends personne affirmer qu’il ne faut pas “humilier” l’Iran. Pourtant, les choses n’en resteront certainement pas là.

Pendant ce temps, le chef des armées en Ukraine, Oleksandr Syrskyi, signale que la situation s’est “sérieusement détériorée sur le front ces derniers jours”, alors qu’on détecterait des signes d’une offensive majeure de la Russie qui se prépare.

Je ne suis pas analyste de géo-politique. Nul besoin de l’être pour avoir conscience de la gravité de tout ce qui se joue dans notre époque. Moi, dans ma bulle poreuse d’être, en ce moment, je me souviens d’une nuit dans le désert sur la base d’Ovda en construction, d’un carnet d’arpenteur à couverture orange abandonné par son propriétaire et des poèmes de Mandelstam en version anglaise que j’y notais. Je me souviens du bruit des sirènes et de ce que devient le temps lorsqu’on est suspendu à la question – y aura-t-il riposte ? Oui ? Non ? Nous tombera-t-elle dessus ? C’était le 7 juin 1981 à Tel Aviv, et nous attendions de savoir si l’Iraq répliquerait à la destruction de son réacteur nucléaire en construction.

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Le temps, ce mystère. On mesure des durées, non pas ce qui les cause. Sur la “flèche du temps”, nous sommes 43 ans plus tard, dans ce que Mandelstam nomme dans un poème “le brouillard événementiel.”

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A bit after midnight, I wake up with the impression of hearing a woman’s voice speaking in English (like that of a reporter on TV). I turn on the computer : Iran has launched a retaliatory action against Israel with hundreds of drones and missiles. I follow the information from three sources : Haaretz, The New York Times and Reuters. It is now 2:30 AM and I’m going to attempt to get some sleep. Thus far, the drones and missiles have been intercepted; “slight damage” reported at one of the two military bases in the Negev (that would be either Nevatim near Beersheva or Ovda near Eilat). Everyone is on high alert, Saudi Arabia just expressed its “deep concern” calling “on all parties to exercise the ‘utmost levels’ of restraint and spare the region and its people the dangers of wars.”

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At 8h10 : 297 of the 300 drones and missiles launched by Iran are said to have been struck down by Israel or its allies; a 10 year old boy from one of the Beduin communities, wounded by debris; “slight damage” reported at the Nevatim Airbase near Beersheva. Meetings (UN, G-7) scheduled for today. I don’t hear anyone saying there should be no “humiliating” Iran. Yet, things will definitely not to stop there.

Meanwhile the Commander-in-Chief of the Ukraine’s Armed Forces signals a “significant deterioration of the situation on the front” while signals are detected of a large-scale offensive being prepared by Russia.

I am not an analyst of geo-politics. No need to be one in order to be aware of the seriousness of all that is playing out in this period. Myself, at this moment in my porous bubble of being, I remember a night in the desert on the construction site of the Ovda airbase, a land surveyor’s notebook with an orange binding abandoned by its owner, in which I noted English translations of poems by Mandelstam. I remember the sound of sirens and of what happens to time when it appears suspended on a question – will there be a retaliation ? Yes ? No ? Will it land on us ? It was in Tel Aviv, on June 7th 1981 and we were awaiting to find out if Iraq would respond to the destruction of the nuclear reactor it was building.

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Time, that mystery. We measure durations and not what causes them. On the “arrow of time”, we are now 43 years later in what Mandelstam calls in one of his poems “the fog of events”.

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