
Je viens de remplir deux pages de cahier de tout ce dont j’ai marre en ce moment. Je ne reprendrai pas la liste ici parce que je cherche surtout, plus que tout, non pas à baigner dans la mare des marre marre marre mais à en sortir. Chose des plus difficiles. Ces jours-ci, les meilleurs moments de la journée tournent autour de la découverte de bourgeons sur des plantes dont je n’étais pas certaine qu’elles aient survécu, et de la vue des mésanges voltigeant sur le pommier dans la cour.
Le sentiment du trop-plein de conneries s’est concrétisé hier lors d’une promenade le long de la rivière, en constatant que des jeunes désoeuvrés avaient systématiquement cassé les branches sur presque tous les arbres récemment plantés le long du sentier longeant la berge. Sur la vingtaine d’arbres, onze avaient été ainsi amputés; de ce nombre, six s’emploient à repartir en dressant une branche le long du moignon de leur tronc. Ce sont les mêmes jeunes qui ne trouvent rien de mieux à faire que de fracasser les oeufs des canards sauvages; comme il est trop tôt pour cette “activité”, ils s’en prennent aux arbres, entre insultes aux passants (ou offre d’achat de substances diverses et variées).
Marre. De la méchanceté gratuite, marre du simplisme, marre de l’impossibilité d’avoir des conversations débouchant sur autre chose qu’une véritable ritournelle de plaintes sans solutions et/ou d’indignations encore et toujours axées sur le truc immédiat qui choque, qui fâche, sans jamais prendre le temps de s’arrêter, de réfléchir…Je suis certaine que ça n’est pas de cette agitation frénétique et sans résultats que parlait Stéphane Hessel lorsqu’il écrivait “Indignez-vous“.
Voilà. L’écriture personnelle s’en ressent, et comment. Je patauge, mes personnages aussi.
Deux rencontres cet après-midi dont je n’attends pas grand chose: l’une avec cette Ivoirienne pour laquelle ne se dessinent aucunes solutions et qu’il faut bien tenter d’accompagner vers une sortie de crise, quelle qu’elle soit; l’autre avec d’autres que préoccupent les inepties du Maire et de son équipe, pendant que le RN, sourire goguenard en coin, attend tranquillement son heure. Et tous de dire “oui, mais, critiquer le Maire, c’est faire le jeu du RN”…alors que ne pas critiquer le Maire permet au RN de se réserver pour les élections; il semble assez évident que le silence fait l’affaire des ineptes de tous côtés. Le centre-ville se désertifie un peu plus chaque semaine, les “grandes surfaces’ discount et autres poussent comme des champignons en périphérie et cetera et cetera et cetera.
Voilà. Comme le chantait Lhasa de Sela lorsqu’elle était vivante, “la tête est pleine mais le coeur n’a pas assez.” Le constat ne s’applique pas seulement à moi, peu s’en faut.
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I’ve just filled two pages in a notebook with everything I’ve had enough of these days. I won’t repeat the list here because what I’m looking for, more than anything, is not wallowing in the murky waters of kvetching, but to find a way out of it. Most difficult. These days, the best moments in the day occur when I discover new buds on plants I didn’t think had made it through the winter, and the sight of chickadees dancing in the backyard apple tree.
The feeling of just-too-much-crap solidified yesterday when I went for a walk along the river, when I saw how young guys with nothing much to do systematically broke off the branches on almost all of the trees recently planted along the path on the shore. Of the twenty or so trees, eleven had been amputated; of that number, six were attempting to start over by growing a branch along their amputated stump. These are the same young ones who find nothing better to do with their time than to smash the eggs of the wild ducks: since it is too early for this “activity”, they take out their energy on the trees, on insults to passersby (or on offers to buy various illicit substances).
Fed up. With gratuitous evil, pure and simple, fed up with simplistic stuff, fed up with the impossibility of having conversations leading into anything other than constant repetitions of complaints with no solutions and/or indignations constantly focussed on the most immediate shocking occurrence causing anger, without ever taking the time to stop, to think…I’m sure all this frenzied and useless agitation is not what Stéphane Hessel was writing about when he said “Be outraged”.
Voilà. Personal writing suffers from this, and how. I’m floundering and so are my characters.
Two meetings this afternoon from which I’m not expecting much: one with the woman from the Ivory Coast for whom no solutions are appearing and who we must attempt to accompany as best we can toward some exit, whatever it will be; the other with other people preoccupied by the Mayor and his teams’ nonsense while the elected members on the far right, with a smirk on their faces, quietly await their turn. And everyone says, “yes but, criticizing the Mayor plays into the hands of the RN”…whereas not criticizing the Mayor allows the RN to keep its powder dry for the elections: it seems rather obvious that silence suits de dummies on both sides. Every week, the downtown area becomes more deserted, while the “shopping centers” be they discount or other, sprout like mushrooms on the periphery etc etc etc.
Voilà. As Lhasa de Sela sang when she was alive “the head is full, but the heart does not have enough“. This does not apply only to me, far from it.