( Fond du 4e de couverture, Contes d’Exil)

Ce matin, en apercevant des images des parures extravagantes du roi et de sa reine en Angleterre (dont les couronnes à l’apparence de pots de chambre posées sur leurs têtes), je pense à ce passage lu hier dans À l’Est des Rêves de Nastassja Martin :

“Un matin de janvier à Tvaïan, Ivan s’inquiète car le prix des zibelines est passé de 7 000 roubles à 5 000 roubles. Nous buvons le thé, et il s’emporte un peu. Souvent je pense à la tiotka (la tante, expression humoristique pour une jeune femme très apprêtée) qui se balade dans les rues de Milan, rouge à lèvres, ongles peints et cigarette entre les doigts. Elle porte sur elle un manteau cousu avec des zibelines que j’ai tuées. Ça me rend triste pour les zibelines. Et triste qu’au bout de la chaîne ce soit elle qui nous fasse vivre. Qui nous permette tout juste d’acheter de la farine, du sucre et des clopes. Tu sais ce qui serait vraiment drôle ? Tu sais à quoi je pense quand je déprime ? Qu’au lieu que cette fille porte du Chanel numéro 5 sur son manteau, elle exhale le parfum des zibelines mortes. Le parfum de la viande rancie qui sèche. Ivan saisit une peau, me l’envoie par-dessus le feu. Je la porte au nez en composant sur mon visage une mimique d’extase, nous éclatons de rire. Ça, ce serait vraiment drôle, dit encore Ivan. Ça, ça me plairait.”*

Evidemment, ça n’est même pas la fin de l’histoire, car braconnage et dérèglement climatique s’en mêlant, les zibelines ne sont pas les seuls animaux à se raréfier en Sibérie où les rives des rivières s’effondrent avec le dégel des sols et les saisons se confondant les unes avec les autres d’une journée sur l’autre.

Ce matin, je lis aussi que certains économistes commencent à remettre en question le modèle économique (et la pensée qui le sous-tend) menant ainsi au coeur de la catastrophe. Sans blague. Déjà ? Ça ne fait que près de cinquante ans qu’on voit venir le désastre…

Pendant que la gabegie gagne de plus en plus en Russie, chaque oligarche de conséquence se dotant de sa petite armée privée…ce qui n’empêche nullement les leaders occidentaux de vouloir maintenir Poutine en poste, intérêts financier et politiques l’emportant sur le simple bon sens. Alors pour ce qui est de Even et des zibelines, vous pensez bien…

*

This morning at the sight of images of the extravagant get-ups of the king and his queen in England (whose crowns look like chamber pots resting on their heads), I think of this excert read yesterday in Nastassja Martin’s À l’Est des Rêves :

“One January morning in Tvaïan, Ivan is worried because the price of sable has gone from 7 000 rubles to 5 000 rubles. We drink our tea and he gets a bit annoyed. I often think of the tiotka (the aunt, a humoristic expression for an overdressed young woman) who is strolling down the streets in Milan, with red liptick, painted nails and holding a cigarette. She is wearing a coat made of the sables that I killed. It makes me sad for the sables. And sad that at the end of the chain, she be the one keeping us alive. The one allowing us to buy nothing but flour, sugar and cigs. You know what I would find really funny ? You know what I think about when I’m depressed ? Instead of that girl wearing Chanel number 5 on her coat, that she exhale the perfume of dead sables. The perfume of rancid drying meat. Ivan grabs a skin and throws it to me over the fire. I bring it up to my nose mimicking extasy and we burst out laughing. That, that would be really funny, Ivan says again. That, that would please me.”

Of course, that’s not the end of the story, because poaching and climate upheavals combined, sables are not the only animals becoming scarce in Siberia where the shores of rivers are collapsing with the thawing of the ground and seasons mixed together one day over the next.

This morning, I also read that some economists are staring to question the economic model (and the thought underlying it) leading straight into the heart of the catastrophy. No kidding. So soon? It’s only been fifty years since we’ve seen the disaster coming…

Meanwhile disorder spreads more and more in Russia, each consequential oligarch putting up his own little private army…while this in no way impedes Western leaders wanting to maintain Putin in position, financial and political interests overriding plain common sense. So when it comes to the Even people and sables, you know…