
Hier, j’ai travaillé sur une portion de Là où s’amusent les enfants en rapport avec l’aîné des trois frères dans l’histoire. Il a quatorze ans et j’ai utilisé du “matériel” – entièrement révisé – concernant un gamin qui m’avait confié les abus sexuels que lui imposaient d’autres gamins de son école. J’en avais fait rapport, et à l’école, et à la gendarmerie. La convocation des parents n’avait servi qu’à enfoncer le gamin davantage quand ils avaient refusé de reconnaître que leur enfant puisse être impliqué dans un racket d’échange de “faveurs” sexuelles contre divers “avantages”.
Une amie, institutrice dans cette même école où je faisais des accompagnements scolaires, tente, chaque année, d’avoir des conversations avec les jeunes qui lui sont confiés, sur le thème “se respecter, se respecter les autres”. Elle s’entend souvent répliquer par les filles: “oui mais, si je ne laisse pas faire, il me tape”.
Les bien-pensants feront la moue en se disant que ça se passe comme ça parce que cette école est en zone dite “prioritaire” (sont-elles encore affublées de ce vocable, supposément ‘non-stigmatisant’, comme si l’intention sous-jacente n’était pas stigmatisante en diable ? Je ne sais pas.)
Demi-confidences, demi-aveux, et, parfois, arrêt sur image quand une gamine de 9 ans, en révisant avec moi un poème, ‘découvre’ pourquoi elle bloque toujours sur le nom de l’auteur – son prénom est le même que celui de son tonton qui lui a fait “des choses”.
Oui, je comprends tout à fait que les révélations, hier, de l’identité de douze soldats russes responsables de viols d’hommes, de femmes et d’enfants en Ukraine, ont orienté ma réflexion dans cette direction.
Je comprends aussi à quel point “ces choses” sèment le malaise chez les adultes qui voudraient tellement qu’il n’en soit jamais question, que ça ne se produire jamais, qu’on puisse les oublier à jamais. Comme s’il suffisait de couvrir la plaie béante d’un tissue fleuri pour que la vérité disparaisse, elle aussi.
(Je ne sais pas quelle direction je prendrai aujourd’hui, en matière d’écriture. L’après-midi sera presque entièrement occupé par un autre trajet dans la ville voisine pour une autre visite médicale.)
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Yesterday, I worked on a portion of the French version of Where the Children Play relative to the eldest of the three brothers in the story. He is fourteen years old and I used some “material” – totally revised – about a kid who had confided in me concerning sexual abuse imposed on him by other kids in his school. I had reported the fact to the school and to the gendarmerie. The convocation of the parents had only managed to sink the kid even deeper since they refused to acknowledge that their child could be involved in a rackets of exchanges of sexual “favors” against various “advantages”.
A friend of mine, a teacher in this same school where I did coaching, attempts every year to hold conversa-ations with the children under her care, on the theme “self-respect and respect for others’. She often hears the girls respond with: “yes but, if I don’t let him, he slaps me.”
The self-righteous will grimace and say things are like that in this school because it’s in a “priority zone” (is this still the way they are designated, with this supposedly “non-stigmatizing” label, as if the underlying stigmatization didn’t bleed through like hell ? I don’t know.)
Semi-confidences, semi-admissions and, sometimes, sudden freeze-frame moments when a nine-year old girl, revising a poem with me, “discovers” why she keeps on blocking on the name of the author – he has the same first name as that of her uncle who “did things” to her.
Yes, I totally understand thaat yesterday’s revelation of the identity of twelve Russian soldiers who raped men, women and children in Ukraine, sent my thoughts in this direction.
I also understand how “these things” make adults deeply uneasy since they would so much wish they were never mentioned, never happened, were forgotten forever. As if all you needed to do was cover up the gaping wound with flowery fabric for the truth of the matter to disappear also.
(I don’t know in what direction writing will take me today. The afternoon will be almost entirely taken up by another medical visit in the neighbouring town.)