
Terminé la lecture de L’internat de Serhiy Jadan*. Relu l’introduction de Françoise Morvan aux Contes de Bretagne** et le conte de L’homme juste – en traduction française, le breton m’étonne, même à le regarder sur la page parce que je n’y vois rien auquel mon oeil se raccroche. (Ce que je veux dire par là: si je lis un texte en allemand, par exemple, j’y reconnaîtrai des tournures ou même des mots que je retrouve en anglais, alors que si je lis Ur wez a oa un denik keaz hag ez oa a-newez ganet d’ezhan ur mab...je suis totalement perdue. Aussi perdue que devant le kurde ou le hongrois.)
Les langues. Et je revois l’image vers la fin de L’Internat quand le soldat présente un morceau de charbon à Pachka en lui demandant de lui dire ce que c’est. Et Pachka regarde le morceau de charbon et y distingue comme des incises en forme de…””de fougère”, dit le soldat. Des fougères d’il y a des millions d’années de cela.
Des strates de choses vivantes. Ce que deviendront nos milliards de tonnes de plastique enfoui sous la strate suivante, mystère.
Dans le récit que j’intitule Concours de Circonstances, un des personnages vient de traduire un bout the poème de Bertold Brecht – sorte de Frères humains qui après nous vivez de Villon, en mode moitié du 20e siècle.
Où le récit va s’arrêter, je ne sais pas. Je ne le sais jamais d’avance. (Comme j’ai dit au ministre, un jour, qui voulait voir mon plan pour son discours : “Je sais ce que vous voulez dire. Vous aurez le plan une fois que j’aurai écrit le discours.” Vrai, ce sont les mots et les intentions qui dictent le déroulement, il me semble, et pas le contraire – mais ça, c’est parce que je suis pas une ingénieure, et le ministre en question, l’était.)
*Serhiy Jadan L’internat, traduit de l’ukrainien par Iryna Dmytrychyn, Les Éditions Noir sur Blanc, 2022
**Françoise Morvan, Contes de Bretagne d’après la collecte de François-Marie et Perrine Luzel, les Éditions Mesures, 2020
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Finished reading Serhiy Jadan’s The Orphanage. Re-read François Morvan’s introduction to Contes de Bretagne (Tales from Brittany) and the tale The Just Man – in French translation, the Breton surprises me even to look at on the page because I don’t see anything in it my eye can grasp. (What I mean by this: if I read a text in German, for instance, I’ll recognize in it phrases or oeven words I find again in English, whereas if I read Ur wez a oa un denik keaz hag ez oa a-newez ganet d’ezhan ur mab.. I’m totally lost. As lost as in front of Kurdish or Hungarian.)
Languages. And comes to mind the image toward the end of The Orphanage when the soldier hands a piece of coal to Pashka and asks him to say what it is. And Pachka looks at the piece of coal and distinguishes in it incisions shaped like…”ferns”, says the soldier. Ferns from over a million years ago.
Strata of living things. What will become of our billions of tons of plastic buried under the next strata : a mystery.
In the story I’m calling A Set of Circumstances, one of the characters has just translated a piece of a poem by Bertold Brecht – a kind of mid-twentieth century version of François Villon’s fifteenth century Epitaph.
Where the story will stop, I don’t know. I never know in advance because I never write according to a plan. (As I once told the Minister who wanted to see the plan for his speech: ‘I know what you want to say. You’ll have the plan once I’ve written the speech.” It seems to me the words and intentions dictate the flow and build the plan, not the other way round – but that’s because I’m not an engineer, while said minister was of that profession. )