Mémoire/Memory

Peut-être que les concepteurs de cette plateforme se sont dit que les personnes ne recevant pas de visiteurs avaient besoin d’encouragement. Raison pour laquelle au départ de la page vide, dorénavant, s’affiche une question. Ce matin : ‘quel est votre dessin animé préféré ?’ Hier: ‘Avez-vous déjà rencontré un animal sauvage ?’ (À cette question, la réponse serait oui, une ourse noire enseignant à son petit comment soulever des pierres plates pour manger les insectes qui se trouvent en-dessous. Quand le vent a tourné, elle a senti ma présence, s’est dressée pour humer l’air; apparemment, elle a décidé que je ne représentais aucun danger, et à poursuivi sa leçon.)

Mais ça n’est pas cela que je veux noter ce matin. Dans les toutes dernières pages de Charlotte Delbo La vie retrouvée *, j’avais souligné alors, et je relis hier soir, cette notion de “la mémoire profonde et la mémoire ordinaire”. Perception d’une très grande justesse, la mémoire profonde s’exprimant, dans la plupart des cas, dans ces rêves “incompréhensibles”, ‘sans queue ni tête”, à moitié oubliés au réveil, ou, occasionnellement, par une sorte de déchirure dans le déroulement habituel des jours. Mais aussi, pour d’autres, par ce sentiment de dédoublement à l’état éveillé, ou d’une déchirure dans la perception du monde ‘ordinaire’, convenu; de cet autre qui évolue à un autre niveau et enregistre ce que la mémoire ordinaire occulte; une réalité dans un angle mort de la vision, hors d ce qu’on nous a enseigné comme étant là où nous devons poser notre regard.

Certains artistes parviennent à saisir des bribes de ce qui émerge des profondeurs, avec plus ou moins de talent; d’autres s’en tiennent à la vie à la surface, de façon géniale ou triviale, c’est selon.

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-5° ce matin. Ça caille sur le marché – 6 oignons, 1 celeri-rave, 6 clémentines; total : 5€75 Si Z ne se décide pas finalement à me payer ce qu’elle me doit, à la fin du mois, il n’y aura que ce qu’il faut pour le loyer de janvier, et rien d’autre.

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Je jette un regard sur des textes de l’année dernière, dont l’un qui s’intitule “Voix des ancêtres lointains”.

*Ghislaine Dunant, Charlotte Delbo La vie retrouvée, Grasset 2016

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Perhaps the people who created this platform told themselves that people who didn’t have visitors needed encouragement. Reason for which at the start of each empty page nowadays, there’s a question recorded. This morning; “What is your favorite animated cartoon?” Yesterday: “Have you ever met a wild animal? (To which question, the answer would have been yes, a black bear teaching her bear cub how to lift flat stones to eat the insects underneath them. When the wind turned, she sensed my presence, raised up on her hind legs and sniffed the air; apparently, she decided I was not a threat, and went on with her lesson.)

But that’s not what I want to jot down this morning. In the final pages of Charlotte Delbo La vie retrouvée, I had underlined at the time and read again last night, this notion of “deep memory and ordinary memory”. A most apt perception, deep memory expressing itself, usually, in those “incomprehensible dreams, you can’t make heads or tails out of, half forgotten upon waking, or occasionally, as a sort of rip in the unfolding of the ‘ordinary’, consensus-based world; of that other unfolding at another level, recorded by what ordinary memory hides; a reality in the blind spot of vision, outside what we where we were taught to put our attention.

Some artists manage to capture some scraps risen from the depths with more or less talent; others concentrate on the surface world, either with genius or in a trivial way, depending.

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-5° this morning. Bracing cold at the market – 6 onions, 1 celery root, 6 clementines, total: 5€75. If Z does not finally come up with the money she owes me, at the end of the month, there will be enough to pay the rent in January, and nothing else.

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Writing : I’m looking at texts written last year, among them one titled “Voices of Faraway Ancestors.

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