2 décembre 2022

“Liberté d’expression” – de ce qu’on semble en comprendre en ce moment, c’est le mot d’ordre pour l’irréfléchi. La première expression qu’inspire un fait ou une déclaration – allez hop, c’est la compétition à qui éructera le mot ou la phrase la plus incendiaire, la plus vulgaire, la plus “spontanée”.

Dans ce contexte, le spontané est le synonyme actuel de “libre”. De la même façon que la signification du mot “valeur” semble se restreindre à ses significations autour de l’argent. À se demander, dans toute cette ‘spontanéité’ à quoi il a servi aux humains d’acquérir des capacités de réflexion. La “liberté d’expression”, c’est aussi le droit de se taire, le temps de réfléchir.

Je n’ai pas de télé et ça ne me manque pas du tout. À l’occasion, sur facebook, je découvre des extraits d’émissions où la vulgarité et le manque de respect pour les autres sont non seulement de mise, mais servent de moyens pour faire taire ceux ou celles que les braillards ne veulent pas entendre. Des espèces de pugilats où l’on se permet de traiter d’autres humains de “cafards”. Le pire n’est pas qu’on laisse libre cours à ce genre de propos, ni même aux expressions mensongères des propagandistes pro-Kremlin, mais le fait qu’on ne leur oppose pas assez des opinions construites, sérieuses et indéniables.

Je ne suis pas Française. Je n’ai pas vécu la période des “événements” en Algérie (car, apparemment, il ne fallait pas l’appeler par son nom de ce qu’elle était, une guerre.) Mais lorsque je lis les déchaînements provoqués alors en France, la censure impitoyable, les tortures infligées ainsi que les exécutions, j’ai l’impression qu’en toutes circonstances, les “Nous n’oublierons jamais” servent de baillon à la mémoire véritable. Une triste vérité, pas seulement en France, bien évidemment.

Je viens de commander Les enfants de la guerre aux éditions Mesures. Récits qu’ont inspiré à Françoise Morvan des photos recueillies au moment de la Première Guerre Mondiale, celle qui devait être la dernière des dernières. Les récits. À hauteur humaine. Loin des déclarations pompeuses des uns et des borborygmes ‘spontanés’ des autres.

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Tranquillement – et dans certains cas seulement – je transfère une partie du contenu d’une de ces chroniques à la page facebook de mon avatar. Tentatives de rapprochement entre certains aspects de la personne plus privée et de son ‘apparence’ publique. Mais comme aucun de mes noms ‘officiels’ ne me correspondent particulièrement, je crois bien que Maria Damcheva restera le porte-drapeau pour les ‘autres’.

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“Freedom of expression” – of what this seems to mean at the moment, it’s the call to thoughtlessness. The first expression inspired by a fact or a declaration – and bombs away, the competition is on as to who will spew out the word or the sentence that’s the most incendiary, the most vulgar, the most “spontaneous”.

Spontaneous, apparently, being the current synonym for “free”. Just as the meaning of the word “value” seems restricted to its usages around money. Given all this ‘spontaneity, it’s enough to make you wonder of what use to humans was the acquisition of capabilities for reflection. “Freedom of expression” is also the right to keep silent long enough to think.

I don’t own a TV and don’t miss it at all. Occasionally on facebook, I discover excerpts from programs where vulgarity and lack of respect for others are not only expected, but serve as means to silence those the loudmouths do not want to hear. A sort of boxing match where one is allowed to call other humans ‘cockroaches’. The worst is not the fact of allowing such talk, nor even of repeating the lies of pro-Kremlin propagandists, but the fact that so few constructed, serious and undeniable opinions are expressed against them.

I am not French. I did not live through the period of the “events” in Algeria (because, apparently, they were not to be called by their name which was a war. But when I read about the outburst in France, the pitiless censorship, the inflicted tortures and executions, I get the impression that in every circumstance the “We Shall Never Forget” serve to gag true remembrance. A sad truth, and not only in France, quite obviously.

I have just ordered “Les enfants de la guerre” (War Children) from Editions Mesures in Paris. Tales inspired to Françoise Morvan by photos collected at the time of the First World War, the one that was supposed to be the very Last of the Last ones. Tales. At human level. Far from the pompous déclarations of some and the ‘spontaneous’ rumblings of others.

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Slowly – and in some specific cases only – I’m transferring parts of the content of these columns over to the facebook page of my avatar. Attempts at bringing together certain aspects of the more private person and of her public ‘appearance’. But as none of my ‘official’ names resemble me particularly, I do thinkk that Maria Damcheva will remain the standard bearer for them all.

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