5 août 2022

La légende servant de point de départ dans la nouvelle de Tchekhov: celle de ce moine, vêtu de noir et dont le mirage se reproduit à l’infini dans l’espace… Pour moi, cette image évoque la vue de ces femmes vêtues de noir dans le désert du Sinaï; la “raison officielle” en étant qu’on doit pouvoir les reconnaître de loin pour éviter de les tuer – le meurtre d’une femme y emportant une vendetta beaucoup plus longue que pour le meurtre d’un homme…C’est bien gentil, mais je note aussi que, sous les chaleurs écrasantes du désert, ce sont elles qui doivent les subir le plus; alors, peut-être, en utilisant la même logique, on devrait couvrir les hommes pour les rendre plus faciles à cibler.

Bref, du grand n’importe quoi, et dans l’humidité et la chaleur du voile noir leur couvrant la bouche, ces femmes n’ont que des moignons pourris à la place des dents.

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les crimes de guerre sont inadmissibles, de part et d’autre – c’est pourquoi on les appelle des crimes. Il n’en demeure pas moins que je m’interroge sur la pertinence et le libellé du rapport qu’Amnistie internationale vient de publier concernant les crimes de guerre attribués aux forces ukrainiennes et, notamment, l’utilisation d’écoles et d’hôpitaux et/ou des tirs à proximité de zones résidentielles dont les civils n’ont pas été évacués.

Les crimes de guerre attribués à l’envahisseur russe ne sont pas détaillés; le rapport cite des incidents et des morts survenus suite au déploiement de forces ukrainiennes. Pas un mot concernant l’occupation par les forces russes de la plus grande centrale nucléaire en Europe pour y stocker en toute impunité armes et munitions, avec leurs troupes intervenant en toute impunité dans ses alentours. Apparemment, il ne s’agit pas d’un crime de guerre, pour Amnistie? Pourquoi, le cas de figure n’apparaît pas sur la liste répertoriée des agissements prohibés??

J’avoue ne pas comprendre l’espèce d’angélisme hors-sol du rapport, ni l’opportunité de le publier à ce moment-ci. Amnistie Internationale fait enquête et fait rapport au gouvernement ukrainien: fort bien. Mais il faut venir d’une autre planète pour ne pas voir l’utilisation qui sera faite de ce rapport (c’est déjà le cas, d’ailleurs) par tous les amis du kremlin qui étaient déjà au taquet au moment où j’écrivais ces lignes. Accompagnés des “objectifs” – “les deux côtés se doivent de respecter et cetera…” Ils et elles seraient joli(e)s à voir en zone de combat, ça oui.

Les enquêteurs ont fait leur boulot, en appliquant les critères qui sont les leurs. La difficulté se pose au niveau du processus décisionnel – le quand, le comment et le pourquoi – de la publication d’un rapport et ce, pour deux raisons: la première étant qu’il est impossible de prétendre à quelque objectivité que ce soit alors que l’attaquant se refuse à pareille enquête sur ses propres agissements; une phrase affirmant que le rapport ne les dédouane pas pour autant est un bien piètre cache-misère face à des affirmations documentées concernant les défensurs; alors, quelle était l’urgence de publier ce rapport ?

On est aussi en droit de se demander – vu le nombre de petits villages ciblés par les attaquants – quelles étaient les possibilités d’abri pour les défenseurs et si les civils avaient vraiment la possibilitié d’évacuer sans se faire tuer directement, ou emmenés de force dans des camps sous contrôle de l’attaquant. De cela, il n’est fait aucune mention lorsqu’est soulevé la proximité des civils de certains zones de tir.

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Commandé Ombres de Chine hier à la librairie. En attendant, ce poème, écrit par Tu Fu en 759, lors d’épisodes militaires qui firent quelques 20 millions de morts en Chine; paru dans sa traduction,sur la page facebook d’André Markowiz :

Pensant à mes frères une nuit de pleine lune

Tambours de guerre les voyages cessent

 Une oie sauvage crie à la frontière.

 L’automne cette nuit la rosée blanche

 La lune aussi brillante que chez moi.

 Mes frères — dispersés dans le pays

 Sont-ils morts ou vivants — qui peut me dire ?

 J’envoie des lettres toutes sont perdues

 Et les combats n’ont pas connu de trêve.

Tu Fu,  759

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Heureuse hier d’avoir des nouvelles d’une amie ukrainienne dont la fille suit maintenant des cours de français avec d’autres jeunes de son âge, après une fuite précipitée depuis Odessa, et des mois passés sans autre compagnie que sa parenté rapprochée.

et un peu d’air plus frais, ce matin; hier, il n’y avait pas que les plantes qui se flétrissait.

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The legend inspiring Chekhov short story: that of the monk dressed in black whose mirage reproduces itself ad infinitum through space…For me, the image evokes the sight of those women dressed in black from head to foot in the Sinai desert; the “official reason” being that they must be seen from afar so as to avoid someone murdering them – the murder of a woman carrying a longer vendetta than the murder of a man…That’s all very nice, but I also note that, given the unbearable heat in the desert, the women are the ones most heavily subjected to it; so perhaps, the same logic might suggest covering the men in black to make them easier to target…

In other words, the great anything-goes and because of the heat and humidity behind the veil covering their mouths, the women’s teeth are nothing but rotten stumps.

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War crimes are inadmissible on both sides – that’s why they’re called crimes. That said, I have to wonder on the pertinence and the wording of the Amnesty International report just published concerning war crimes attributed to the Ukrainian forces and, notably, the use of school and hospitals and/or firing close to residential areas from which civilians have not been evacuated. Not a word about the Russian forces occupying the biggest nuclear power plant in Europe as a stocking zone for weapons and ammunition, with their troops operating in full impunity in the vicinity. Apparently, this does not constitute a war crime for Amnesty? Why, because the situation does not appear on the list of prohibited actions ?

None of the war crimes attributed to the Russian invader are detailed; the report describes only incidents and deaths that resulted during deployment of Ukrainian forces, with a blanket statement of blame addressed to russia.

I fail to understand the angel’s view from above in the report, as well as the pertinence of publishing it at this time. Amnesty International investigates and reports its findings to the Ukrainian government, well and good. But you really have to be sitting on another planet to fail to see how this report will lbe used (as is already the case) by all of the Kremin’s friends who are hard at work as I write these lines. Accompanied by the “objective ones” – you know, both sides must respect etc…” They would make for a pretty sight in a combat zone, that’s for sure.

We can also ask ourselves – seeing the number of small villages targeted by the attackers – what real possibilities existed as shelters for the defenders and if the civilitans truly could be evacuated without being directly killed or taken forcibly to camps under the attackers’ control. There is no mention of these matters when speaking of the proximity of civilians in some active shooting zones.

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Waiting for the arrival of the book ordered yesterday – Ombres de Chine – Chinese poems in a translation by André Markowicz, I re-read the one published on his facebook page. Written by Tu Fu in the year 759 when the war raging in China is said to have caused the death of 20 million people. Tu Fu writes of the war drums putting an end to travelling; of letters sent to lost friends, and never answered. Of the fighting showing no respite.

I was glad to hear from a Ukrainian friend yesterday; her daughter now following French classes with other youngsters her own age, after a rushed escape from Odessa, and months spent with no one other than her immediate relatives for company.

and a bit of cooler air this morning; not only plants were wilting yesterday.

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