Fragile

L’un des deux pommiers dans le jardin est très malade. Il suffit de s’appuyer sur le tronc pour sentir lâcher ses racines.

J’aurai besoin d’aide pour l’enlever, retourner le sol. Je compte y planter un figuier.

Non, je ne crois pas que nous en sommes là avec le système politique aux Etats-Unis, mais que la pourriture soit avancée, personne ne peut encore en douter. À partir d’un certain point, elle semble se nourrir d’elle-même (et d’une sorte de tétanisation qu’elle provoque dans les esprits incrédules.)

C’est tout le paradoxe, en fait, entre fragilité et résilience face à un phénomène de destruction.

*

chaque corps est le registre d’une histoire unique. Réalité que s’emploient à masquer les parades militaires, avec leurs attitudes, leurs costumes à la gloire de l’uniformité. Observez les visages sur la photo: chacun porte les traces de ses propres craintes, fiertés, sur-investissements, doutes, dénis. Et le champ de bataille est là pour raconter la vérité qui les attend derrière les médailles.

*

un mardi de “bonne action”: celle de participer à un atelier (qui n’en est pas un), au sujet de la poésie (si l’on peut dire), dans un contexte inapproprié (un salon de thé, sur fond de conversations et de musique sans rapport avec les propos). Alors, pourquoi y aller ? Parce que j’y croise des personnes qui ne font pas partie de mon ‘univers’ habituel. C’est toujours une saine piqure de rappel de la variété ‘hors les murs’. Et puis, les autres m’intéressent. (Même les individus qui viennent à un “atelier de poésie” dans le but de distribuer le feuillet paroissial catholique ? Eh oui, de telles personnes existent vraiment. Quant au bulletin paroissial, il est sur papier glacé, en quadrichromie; le contenu diffuse le même climat de fausse bonhommie et d’amitié orchestrées par Jésus que “dans le bon vieux temps”.)

L’animatrice m’a demandé de lire quelque chose cet après-midi. Vu le contexte (le bruit, surtout), le choix est difficile. Je crois que je vais leur lire les brefs poèmes de À Uxmal (que j’avais recopiés ici, mais que wordpress ne daigne pas conserver. Bon, on peut les trouver ici, si on le souhaite.

*

Post-scriptum : je n’avais pas encore jeté un oeil sur les journaux quand j’ai écrit ces lignes. Et là, je tombe sur un article digne d’une nouvelle à la Daniil Harms: envoyée par son journal pour ‘couvrir’ une exécution dans un pénitencier en Alabama (parce qu’on y envoie des journalistes), elle se fait dire que sa jupe est trop courte; puis que ses chaussures qui laissent voir ses orteils sont inappropriées; finalement, elle assiste à l’exécution (où on mettra trois heures pour trouver une veine supportant l’injection létale), “vêtue” des cuissardes de pêcheur, retenues par des bretelles.)

Non, je ne chercherai même pas à comprendre; à l’impossible, nul n’est tenu.

*

Quant aux textes de l’atelier d’écriture, ils étaient tous sur le thème de vies ou de fragments de vie. Le premier, en date du 20 septembre 2021 s’intitule “Une journée dans la vie de l’Élégant Joachim” et se lit comme suit :

Ah, c’est très embêtant. Ahmed avait promis des lames de rasoir hier et il n’a pas tenu parole. Je ne pourrai pas faire du travail lisse et propre avec celle qui me reste. Mal rasé, ça part mal une journée, les jeunes ont beau en faire une mode, se balader avec une barbe de trois jours, ça fait négligé. Depuis mes premiers poils follets à 14 ans, j’ai toujours eu les joues aussi douces qu’une fesse de bébé, comme disait ma mère.

En plus de cet accroc à ma chaussure gauche; la semelle commence à se décoller; avec la colle à bois de l’atelier, ça devrait tenir. Mais il faut que je me hâte avant l’arrivée des ouvriers. Et Ahmed qui tarde encore…ah, ça y est ! Il ouvre la cantine et la douche. 

Attention, le terrain est marécageux ce matin. Il a plu une partie de la nuit; il va falloir que je rafistole les bouts de tôle de la toiture, ça gouttait vers quatre ou cinq heures. Et comme j’ai promis à Cécilia que je me libérerais le temps d’écouter ces jérémiades à midi…  « est-ce que je dois vraiment te croire ? » qu’elle me dit. Mais je m’en fous, Cécilia, crois ce que tu veux, la question n’est pas là, les enfants sont grands, je ne te dois rien,  tu as refait ta vie, alors, hein? Le patron me file des contrats qui m’obligent à voyager partout, voilà.

Heureusement qu’il y en a pour qui la solidarité veut encore dire quelque chose. Bien. Attention, un clou qui dépasse dans la palissade, il ne s’agirait pas de me faire un accroc à ma veste…o mamma mia o ché tormento, o Bella ciaio…dieu que ma mère détestait cette chanson ! Mais quelle idée aussi, d’épouser un italien quand on est fille d’autrichiens qui n’ont jamais accepté le démembrement de l’empire austro-hongrois et clamaient toujours que Trieste était autrichienne. Helga Zimweller,,ronchonneuse épouse de Tonino Sanvernino, fallait le faire (hop, petit saut de côté, l’eau s’accumule toujours dans ce petit creux. Pause. Ahmed fait celui qui ne m’a pas vu, il se dirige vers la porte de l’atelier…bien, à moi la douche et un café rapide à la cantine.)

Jour de chance, vraiment. Lames de rasoir et un billet glissé sous la cafetière. Des mecs comme Ahmed ça se fait plus. Oui, il me doit une fière chandelle, mais d’habitude, la reconnaissance engendre  une sorte de rancune larvée, le fait de devoir quelque chose à quelqu’un. Mais pas chez Ahmed. Son billet…je vais pouvoir me payer une lessive, c’est pas trop tôt, laver à la main à l’usine, y a rien qui sèche ensuite dans ma cahute.

RER, me voilà, une petite promenade dans Paris avant le repas avec Cécilia pour écouter une autre version des engueulades entre elle et sa patronne. Promena…tiens, c’est quoi ça? Il m’a l’air bien jeune et bien propre cet SDF. On tourne un film? La bonne femme, là, et le photographe…ah, une interviou, on dirait. Eh oui, le petit – mais tout est impec ! Sweat tout neuf, basket aussi et le sac à dos, et les petites lunettes ! Et ça fait la manche. Y a des coups de pied au cul qui se perdent, tiens! … Quoi ? Qui ? Moi ? Mais je ne suis pas un sans-abri, madame ! Vous en voyez souvent, des sans-abri élégant comme moi ? Vous m’excuserez, je m’en vais justement chez le coiffeur pour une coupe de cheveux, non mais ! Joachim, madame, appelez-moi Joachim l’Elégant, si vous voulez. Je suis un ouvrier spécialisé à la retraite, voilà, et votre petit SDF, là, il couche chez maman-papa tous les soirs, c’est moi qui vous le dit ! Bien le bonjour chez-vous aussi, Madame !

Pfff. C’est du grand n’importe quoi. À 16 ans, moi, grand, costaud, comme lui, j’étais travailleur ’on verra la paperasse plus tard’ qu’il m’avait dit le vieux. À 16 ans, qui pense à des trucs comme la retraite, hein? (Je dis ça, mais je vois bien que les enfants que j’ai eu avec Cécilia, ils en parlaient déjà quand ils étaient ados. Sidérant). Mais bon. Quand j’y ai pensé à la retraite, le vieux était mort et le fils m’a fait des papiers comme s’il venait de m’embaucher. Et même ça, je n’en verrais pas un rond si la soeur d’Ahmed n’acceptait pas d’affirmer que j’habite chez elle. La poste ne livre pas à ma cahute. La somme  que sa soeur me remet ne va pas causer l’effondrement économique du pays mais je serais bien en peine si je devais m’en passer.

Ah oui, Helga, « eh Dieu, si j’eusse étudié au temps de ma jeunesse folle… » ben moi, je bossais, voilà. Et je me payais des beaux costumes, comme le paternel. Toujours sapé comme un monsieur, Tonino. « T’écoute personne, moi, je te dis, que l’habit fait le moine », qu’il disait. Il avait raison. Imaginer un président de la république, en hoodie sale et jeans déchirés, les fesses sur un bout de carton, il serait comme une crotte de chien contre le mur. Tu présentes bien, on se dit que tu es bien. C’est tout con. (À bien y penser, c’est comme ça que le paternel, il l’avait impressionné, son Helga, je parie.)

Et la propreté aussi, évidemment. Une bonne douche chaude le matin. Ma cahute n’est pas chauffée, évidemment et cette douche chaude à l’usine, c’est…franchement, ça et Ahmed, c’est la preuve de l’existence de Dieu.  Ah Ahmed, c’te rigolade la fois où des jeunes de l’usine m’ont surpris au sortir de la cantine.  « Ah vous ne connaissez pas le chargé de pouvoir du patron », qu’il leur dit. Et moi, rasé de frais, veste de tweed et cravate, de serrer quelques mains d’un air sérieux (mais affable). 

Et mes dents qui tiennent le coup. Cadeau des ancêtres Zimmerweller. Comme preuve de l’existence de l’Homo sapiens, on retrouvera mes dents en l’an 15 060. 

Je me croise dans une vitrine…enfin, mon alter ego, paraîtrait. Le mec qui fait les pubs pour Nespresso. C’est vrai, la ressemblance est là, mais moi, le cheveu est fourni et grisonnant. Y a des femmes qui trouve ça séduisant. Nécessairement, je ne les invite pas chez-moi, et pour ce qui est de se payer l’hôtel…Y en a une à qui j’ai fait le coup du gigolo vieillissant, elle a trouvé ça « chou », mais bon, dire que ça a valu la peine, ça serait mentir.

Bien bien bien. Métro métro métro, direction l’Unesco. Corvée. Essentielle, je sais. Je ne supporterais pas qu’elle porte un regard apitoyé sur moi; je préfère et de beaucoup, un regard furieux. À la rigueur, le mépris, mais pas la pitié.

Est-ce que Cécilia croit vraiment les salades que je lui raconte ? Je ne sais pas, entre elle et moi, on a toujours « fait comme si ». 26 ans à « faire comme si », on s’est quitté dans le même esprit. Pour ce que je sais d’elle, au fond, c’est peut-être que du « comme si » de son côté aussi…

— Monsieur ?

— …ça serait…C’est à moi que vous vous adressez, madame?

— Oui, excusez-moi. Je ne connais pas du tout Paris. On m’a donné rendez-vous devant l’Unesco. Est-ce que…

— Mais vous y êtes, madame. Enfin, presque. Vous empruntez l’esplanade. Tout droit, vous ne pouvez pas le rater.

— Merci, Monsieur. Bonne journée à vous.

Bonne journée…mais elle s’est vue ? Une apparence aussi débraillée, à son âge, c’est honteux. La chanson d’Aznavour, là « tu t’laisses aller, tu t’laisses aller… » Comment une femme peut être aussi indifférent à son apparence – vieux pull informe, pantalon tachée de peinture, pas la moindre trace de maquillage…Ça, je dois dire que Cécilia donne le change. En public, du moins, et c’est ce qui compte. Le désir de plaire, c’est la base de tout, non?

Le resto. Pourquoi Cécilia choisit toujours de manger ici – son biftek-frites avec haricots verts trop cuits – je ne sais pas. Et voilà la patronne qui me donne son regard noir habituel en retirant mon couvert, comme si je risquais de partir avec les cuillères…Elle ne me demande même plus si je compte manger. Suivi de l’oeil soupçonneux de Cécilia. Courage, patience, om mane padme et cetera…

Elle ouvre les hostilités avec un: « Encore perdu ton téléphone, je suppose ? »

— Non.Pourquoi tu dis ça ?

— Je t’ai sonné au moins quinze fois hier.

— Ah bon ? (Je pioche une frite dans son assiette.)

— Mais Joachim, enfin ! À quoi ça sert d’avoir un téléphone si tu ne réponds jamais !

— Ben, tu le sais, j’ai tendance à l’oublier. Quand j’étais gamin, on avait un téléphone et on ne le transportait pas partout. Je les vois, tous ces robots, les yeux collés sur leur écran. Ou, tu les entends ? Raconter leur vie à plein tube ? Je trouve ça dégoûtant. (Une pincée de haricots; je me lèche les doigts, vu que la patronne a fait place nette devant moi. Cécilia me tend sa serviette.)

— Donc, tu n’es pas encore au courant pour Pascale.

— Pascale…

— Notre fille, Joachim. Pascale, la cadette. Ça te dit quelque chose ?

— Ben oui, bien sûr, mais elle est pas la seule Pascale au monde. Qu’est-ce qu’elle a, Pascale ?

— Elle a qu’elle a quitté son emploi et qu’elle part vivre en Thaïlande !

— Ah bon ? Paraîtrait que c’est joli, là-bas. Mais ils ont des serpents, non ? Elle a pas peur des serpents, Pascale ? Il me semble…une histoire de couleuvre…

Cécilia ferme les yeux. Secoue lentement la tête. C’est ce qu’elle appelle ’prendre sur elle’. Elle ne le dit plus à voix haute, mais je sais qu’à l’intérieur d’elle-même, elle se demande ’mais comment j’ai pu épouser ce …’ (je ne sais pas où elle en est dans les termes injurieux à mon égard.)

— Joachim, dit-elle d’une voix tellement posée qu’on sent la tornade qui déferle en arrière-plan, je te signale que c’est la troisième fois en moins de six ans que Pascale quitte un emploi et part pour l’autre bout du monde; tu as oublié le rapatriement d’urgence  après sa chute sur un volcan en Islande ?

— Il y a des volcans en Thaïlande ?

Elle pose sa fourchette brusquement. Me détaille: cheveux, visage, veste, chemise, mains…  « Et ta chevalière ? »

— Quoi, ma chevalière ?

— Que tu ne portes plus ton alliance, je peux très bien le comprendre, mais ta chevalière ! Tu ne l’enlevais même pas pour prendre ta douche.

— Et bien, maintenant, je l’enlève, tu vois. Quel rapport avec Pascale ?

Une larme. Une seule. Perle. Hésite à tomber. Cécilia la balance furtivement vers sa tempe. Avec un seul doigt. Soupire. Reprend sa fourchette. « Alors, quoi de neuf dans ta vie si trépidante? »

C’est le signal habituel. L’équivalent pour Cécilia d’un : ’cause toujours mon lapin.’ Elle sait bien que je lui raconte des bobards, mais c’est comme un pacte entre nous: raconte-moi ce que tu veux. Tout, absolument tout, à condition que ça ne soit pas la vérité. J’ai un don inné pour ça et il faut croire que ça lui manque, depuis notre séparation.

Alors, tout en piochant dans ses frites, j’invente ma plus récente aventure à Cahors à titre de représentant du patron sur le dernier en ligne des chantiers de construction de la boîte. Des imbéciles qui ne sauraient pas assembler un meuble en vrac livré avec instructions. Il étaient sur le point de poser la toiture à l’envers, si tu peux le croire. Et ainsi de suite.

La patronne repasse alors que je termine les haricots de Cécilia. Regard noir. Elle dégage l’assiette. Cécilia commande deux cafés. 

À mon tour d’écouter l’écoulement de la jérémiade habituelle au sujet de l’imbécile de délégué allemand (mais parfois c’est un roumain ou un bulgare) qui n’a pas fourni son texte à l’avance et qu’il faut tenter de traduire au fur et à mesure, ’à l’aveugle’ dans l’une des langues officielles. Ah, pardon: aujourd’hui, c’est un imbécile de délégué qui a remis son texte juste avant le repas et qui sera le premier à intervenir en après-midi.

Ensuite (oui, après tout, elle prendra bien le flan au caramel avec son café, dit-elle à la patronne), elle en revient brièvement à Pascale, avant de reprendre la saga de la vente de la maison. Oui, parce que l’acheteur qui devait d’abord vendre sa propre maison avait omis de préciser qu’il avait mis cette propriété au nom de sa femme qui, elle, a filé avec le fils du notaire. Lequel notaire, grande ponte et elle en passe, avait omis de finaliser les papiers concernant la propriété si bien qu’on ne sait plus très bien qui est propriétaire de quoi, ni à qui il faut remettre le dessous de table. 

Le flanc caramel de Cécilia arrive avec les cafés; je pioche dedans à petites bouchées, avec ma cuillère à café. Le flan… »C’est du fait maison, d’après toi ? Franchement, Cécilia, c’est ta chef de service qui a des parts dans ce resto ? Elle te rembourse pas si tu manges ailleurs ? »

— Je ne vois pas de quoi tu te plains. Tu ne commandes jamais rien.

— Justement. Parce que c’est pas bon. Je n’ai jamais compris ton peu d’intérêt pour ce que tu appelles « l’acte de nutrition ».

— Arrête de chipoter dans mon assiette, alors!

— C’est une marque d’affection, Cécilia. Tu sais bien que j’ai jamais cessé de t’adorer.

— C’est ça, oui…Tu m’as pas répondu au sujet de ta chevalière.

— Quoi, ma chevalière. Ah, elle commençait à me donner de l’eczéma, voilà.

— Montre voir. Ton doigt.

— Ah, mais, tu m’agaces à la fin ! (J’empoche la dosette de sucre sur son café en faisant mine de chercher mon porte-monnaie. Je me tapote les poches. « Mais… »)

Cécilia lève les yeux au plafond.  « Laisse-moi deviner: tu l’as oublié à la maison. Un pickpocket dans le métro. Tombé dans une grille dégout. »

— Tu peux bien te moquer. Juste parce que je suis distrait…

— Et comment tu as fait pour venir jusqu’ici alors ?

— Tu sais bien que je garde toujours ma carte du métro dans ma poche…Non, j’ai dû l’oublier chez moi encore.

Ce qu’elle sait. Ce qu’elle ne sait pas. Sans intérêt. Elle me file un billet de vingt ’à mettre dans la même poche’, qu’elle me dit. Je promets de la rembourser, comme d’habitude. Je demande des nouvelles de nos deux autres enfants. Ils vont bien. Tant mieux. Elle doit filer préparer son interprétation du texte du l’imbécile de délégué allemand. Je lui répète à quel point je l’admire. Rendez-vous ici dans deux semaines ? Trois ? Disons deux.

Je traîne aussi longtemps que possible à Paris – chose de plus en plus difficile à faire sans dépenser d’argent. Puis, métro et RER. Je réfléchis à la fuite dans mon toit de fortune.

Façon de ne pas réfléchir au panneau annonçant le début des travaux de  construction d’un ensemble pavillonnaire sur ce bout de marécage.

*

One of the two apple trees in the garden is very ill. A simple pressure on the trunk and you feel the roots letting go.

I’ll need help in removing it, turning the soil. I intend to plant a fig tree there.

No, I don’t think things have reached that point in the American political system, but that the rot is well advanced, no one can doubt any longer. Once it reaches a certain point, it seems to feed on itself (and on the kind of tetanization it provokes on incredulous minds.)

In fact, it’s the whole paradox between fragility and resilience in the face of a destructive phenomenon.

*

each body is the record of a unique story. A reality military parades attempt to hide with their attitudes, their costumes to the glory of uniformity. Observe the faces on the photo: each one carries the traces of its own fears, pride, over-investment, doubt, denials. The battlefield awaits them all with the truth behind the medals.

*

A ‘good deed’ Tuesday: where I participate in a workshop (that isn’t one), concerning poetry (sort of), in an inappropriate context (a tea room, to a background of conversations and music unrelated to the words). So, why go? Because I meet people that do not belong to my usual “universe”. Always a healthy reminder of the variety ‘out there’. Also, other people interest me. (Even individuals who show up to a “poetry workshop” in order to hand out the Catholic parish bulletin? Yes, such a person really and truly exists. As for the parish bulletin, it is printed on glossy paper, in the four-colour process; the content provides the same atmosphere of phony affability and friendship orchestrated by Jesus, as in “the good old days”.)

The group leader asked me to read something this afternoon. Given the context (the noise, mainly), the choice is difficult. I’ve decided to read to them the short poems making up Octabio Paz’ En Uxmal (the Spanish original and English translation are available here.)

*

PS : I hadn’t looked at the news before writing these lines. And now, I come across an article worthy of a short story by Daniil Harms; dispatched by her paper to cover an execution in a penitentiary in Alabama (because journalists get dispatched to these things), she is told her skirt is too short; then, that her open-toed shoes are inappropriate; she finally witnesses the execution (it took three hours to find a vein withstanding the lethal injection), “dressed’ in fishing waders, held up with suspenders.)

No, I won’t even try to understand; it would prove impossible.

(The short story above is from the workshop on September 20 2021. Each workshop was based on the theme of lives or fragments of lives, producing a different short story (or draft of same) at each day-long session.)

Leave a comment