
Première évidence: chaque jour, sur une plateforme comme facebook, près de deux milliards de personnes monologuent pendant que d’autres réagissent (ou pas) à ce qu’elles disent ou montrent. Personne ne semble le moindrement étonné qu’il semble normal et évident à quelques deux milliards d’humains de monologuer ainsi, chacun, chacune sur sa petite plate-forme (comme je le fais ici). C’est quand même curieux comme phénomène, non ?
Deuxième évidence: apparemment, un nombre suffisant de ces monologuistes aspirent au rôle et aux avantages supposés du statut “d’influenceur” pour s’inscrire à un masterclass comme celui offert par le journal The Guardian où une jeune femme, tout sourire, propose ce masterclass “comment transformer votre blog en marque de commerce”. Au moment où l’économie libérale atteint des apogées dans ses ravages mondiaux, je ne peux pas être la seule à demeurer sans voix devant pareille énormité.
Troisième évidence : plus longtemps dure la guerre en Ukraine, moins elle occupe d’espace sur les premières pages de ces mêmes journaux (oui, parce qu’elle ‘mérite’ encore la première page, pas comme la guerre au Yemen, par exemple.) Personne ne sera donc offusqué de découvrir que l’article le plus lu dans ce même The Guardian ce matin est au sujet du diamant rose découvert en Angola qui serait le plus gros jamais trouvé depuis 300 ans. (Les risques du déclenchement d’une guerre nucléaire occupe la troisième place et ne me demandez pas ce que vient faire un diamant rose dans cette histoire.)
Bref, la capacité humaine de jouer à la banalité du quotidien ne cesse jamais de m’étonner. “Comme d’habitude” étant tout ce qui a pu provoquer la remise en question de votre perspective sur le monde se glissant dans le rôle de la nouvelle normalité. Une évidence, en fait. Guerre en Ukraine ? Ah oui, le truc là-bas. Risque de nucléarisation ? horrible n’est-ce pas, et comment vont vos tomates ?
Tout ceci étant parfaitement évident, apparemment. Moi, je trouve ça étrange au-delà du possible.
(La focale de l’appareil photo semble avoir besoin d’une paire de lunette. L’âge.)
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First obvious fact: every day, on a platform such as facebook, close to two billion people monologue while others react (or don’t) to what they say or show. No one seems the slightest bit surprised that it seems normal and obvious for some two billion humans to monologue this way, each on his her little platform (as I am doing here). It’s an odd phenomenon nonetheless, no?
Second obvious fact: apparently, a sufficient number of these monologuists aspire to the role and presumed advantages of the status of “influencer” to sign up for a masterclass such as the one offered by The Guardian where a smiling young woman offers a masterclass on “How to turn your blog into a brand”. At a time when the liberal economy is reaching peaks in its world-wide destructions, I can’t possibly be the only one left voiceless by such an enormity.
Third obvious fact : the longer the war goes on in Ukraine, the less space it takes up on the front pages of these same newspapers (yes, because it still ‘deserves’ the front page, not like the war in Yemen, for example.) I suppose no one will be offended to discover that the most read article on this same The Guardian this morning is about the discovery in an Angola mine of the biggest pink diamon found in some 300 years. (The risks of the launching of a nuclear war comes in third place and don’t ask me what the pink diamond has to do in this matter.)
In short, the human capacity to play at “business as usual” never ceases to astound me. “As usual” being whatever happens to have upended your world view slipping into the role the new normal. Obvious, really. War in Ukraine? Oh yes, that business over there. Risk of nuclearization? Horrible, isn’t it, and how are your tomatoes doing?
All of which is perfectly obvious, it seems; I happen to find it odd beyond the possible.
(The focus on the camera seems in need of glasses. Age.)