19 mai 2022

La même préfecture. Les mêmes fonctionnaires devant lesquels j’ai accompagné des jeunes maliens, une famille Rom…Cette fois, une amie accompagne deux ukrainiennes. On dirait une autre scène dans une pièce de théâtre. Les mêmes lieux, les mêmes fonctionnaires. Mais cette fois, sourires, amabilité, et efficacité sont au rendez-vous. Deux interprètes aussi – l’une pour le russe, l’autre pour l’ukrainien.

Bien sûr, je suis ravie que ces jeunes femmes aient vu le périple administratif bouclé en deux heures – inscription à la pref, inscription des enfants à l’école, des mères à Pôle Emploi, CAF, supplément pour femmes divorcées avec enfants…Elles ont bien d’autres problèmes à surmonter, dont celui de l’apprentissage de la langue.

Mais le contraste dans l’accueil, lui, demeure indécent. Le traitement accordé à ces deux femmes est celui que méritent toute personne fuyant guerre et misère sur les routes de l’exil. Evidemment, quand l’exil n’est rien d’autre qu’un sujet de conversation parmi d’autres, avant de discuter de la dernière série sur Netflix, la prise de conscience ne pénètre pas très loin.

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Les pénuries alimentaires ne sont pas du tout sévères en France. Mais le supermarché ‘discount’ local affiche dorénavant un avis permanent devant le rayon vide d’huile de tournesol. Je suppose que les arrivages disponibles sont dirigés vers des centres plus ‘désirables’ que celui-ci.

(Mais l’huile d’olive ? Illimité, donc nous ne sommes pas exactement en situation désespérée ici…)

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Révision: je l’avais oublié mais le personnage principal fait référence à un conte breton portant sur les enfants échangés*, sujet qui lui “parle” beaucoup; il s’agit d’un conte que j’ai découvert chez Françoise Morvan.*

Le personnage ne cite pas le passage suivant, que j’aime beaucoup: “L’indulgence des fées est terrible : elles tombent toujours dans le monde épais des mortels en répandant leurs bienfaits. Et qu’en attendent-elles en échange ? Une loyauté qui ne soit qu’un simple écho de la leur.”**

Je crois que le personnage serait du genre à le comprendre.

et vogue la galère

*Françoise Morvan, Vie et Moeurs des Lutins Bretons, Babel, Actes Sud 1998

**Françoise Morvan, La Douce Vie des Fées des Eaux, Babel, Actes Sud 1999

The same préfecture. The same civil servants in front of whom I accompanied young men from Mali, a Rom family…This time, a friend accompanies two Ukrainian women. The whole thing is like another scene in the same play. Same location, same civil servants. But this time, with smiles, courtesy and efficiency being displayed. Two interpreters also – one for Russian, the other for Ukrainian.

Of course, I’m delighted that these young women saw their administrative journey settled in two hours – registration with the prefecture, school registration for the children, and with the Work Center for the mothers, social aid, supplement for divorced women with children…They have more than enough problems to handle, including that of language acquisition.

But the contrast in the greeting remains indecent nonetheless. The treatment given to these two women is the one deserved by every person fleeing war and misery on the roads of exile. Of course, when exile is nothing but a conversational topic among others, prior to talking about the latest series on Netflix, awareness doesn’t take root very deeply.

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In no way are food shortages severe in France at this point. But at the local discount supermarket, there’s now a permanently affixed sign over the empty shelf usually offering sunflower oil. I guess those supplies available go to the chain’s supermarkets in more « desirable » locations.

(Olive oil? Unlimited supplies, so matters are not exactly at the hardship level over here…)

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Revision: I had forgotten that the main character, at one point, refers to a tale from Brittany about foundlings – a topic she finds most meaningful; it’s a tale I discovered in Françoise Morvan’s books about goblins and fairies in Brittany. The character does not quote what follows, which I like very much: “L’indulgence des fées est terrible : elles tombent toujours dans le monde épais des mortels en répandant leurs bienfaits. Et qu’en attendent-elles en échange ? Une loyauté qui ne soit qu’un simple écho de la leur.” (The fairies’ indulgence is terrible: they constantly fall into the thick world of mortals, spreading their blessings there. And what do they expect in return? A loyalty that would be a simple echo to their own.”

The character is someone who could understand that, I think.

and down the stream we go

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