
J’écris le mot “offshore”. Evidemment, vous pensez immédiatement aux diverses sociétés gérant des fortunes depuis des boîtes postales à l’étranger. Sachez que, dorénavant, le mot s’applique aussi à ce qu’il serait plus juste de qualifier de “dumping”, la Grande Bretagne annonçant marcher dans les pas d’Israel qui avait déjà commencé le bal des exclus expédiés au Rwanda.
Le Rwanda, oui, le pays où le décompte officiel des morts dans le génocide des Tutsi en 1994 s’est arrêté à 800 000. Le Rwanda que le ministre britannique décrit comme “l’un des pays les plus sûrs au monde, mondialement reconnu pour son bilan d’accueil et d’intégration des migrants.” et où les “transférés” pourront entreprendre une “vie pleinement prospère”, tout en donnant le coup de grâce au “business model” des traffiquants en vies humaines. La Suède trouve que c’est une excellent idée, qui renvoie déjà des syriens en Syrie où “il y a des endroits plutôt calmes.” Et depuis des années, l’Union européenne paie la Turquie et la Libye pour maintenir éloignés les demandeurs d’asile.
Ni vu ni connu, loin des yeux, loin du coeur, un mur, ça se construit aussi dans les têtes, d’autant plus facilement que le malheur n’est pas là à vous dévisager. Mais…en quoi est-ce différent du traffic qu’ils sont tous à dénoncer dans un choeur ‘démocratique’ ? Je te vends tant de réfugiés, tu en feras ce que bon te semblera, c’est “pas pareil” que de dire au réfugié en question je te prends 2 000 € pour te mettre à bord d’un zodiak pourri ?
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Hier, un journaliste russophone du New York Times, visitant la Transnistrie (partie de la Moldovie sous contrôle russe) nous a donné l’occasion de voir un peu de la télé diffusée par Moscou. Imaginez un pays où vous n’auriez accès qu’à Fox News et BFM-TV et vous auriez le genre “d’information” dont les transnistriens (et l’ensemble des russes de la fédération) sont arrosés à longueur de journée.
Pendant ce temps, aux Etats-Unis, un imbécile avec trop d’argent veut se lancer dans le “business de la liberté de dire la première connerie qui te passe par la tête” en achetant l’une des plateformes sur lesquelles les gens s’insultent et s’invectivent de la même manière qu’une grenouille continue de se trémousser, même une fois décérébrée. Je devrais peut-être jeter un oeil sur Les ingénieurs du chaos de Emiliano Da Empoli ? Ah, la rage. Marché lucratif entre tous, semblerait-il.
Je retourne à mes traductions zé écritures.
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I write the word ‘offshore’. Of course, you immediately think of those companies managing fortunes out of post office boxes in foreign lands. Know that, henceforth, the word also applies to what would better be described as ‘dumping’, with Great Britain announcing it is following in the footsteps of Israel who started the ball of the excluded by shipping the unwanted to Rwanda.
Rwanda, yes, the country where official figures for the genocide of Tutsis in 1994 stopped at 800 000. Rwanda the British Home Office Minister describes as ’one of the safest countries in the world, well known for its welcoming attitude » where the dumped – sorry, the ’transferred » would be able to embark on « fully prosperous » lives, according to Home Office minister Tom Pursglove who added this would « crush » the business model of people smugglers. Sweden considers this a grand idea since it is already sending Syrians back to Syria ‘where there are quiet zones’; and the European Union has been paying Turkey and Libya for years in order to keep asylum seekers out of sight and out of mind.
Absence makes the heart forgetful and walls can be built in minds that much more easily when misery isn’t right there, staring you in the eye. But… how is this any different from the trafficking they are denouncing in their ‘democratic’ chorus? I’ll sell you so many refugees and you do what you want with them is “not the same” as telling a refugee I’ll take 2 000€ to load you on a leaky rubber dinghie?
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Yesterday a Russian-speaking journalist from The New York Times visiting Transnistria (the part of Moldova under Russian control) gave us a look at the television broadcast by Moscow. Imagine a country where you would have no other choice than watching Fox News and the French BFM TV all day long and you’ll understand what kind of “information” Transnistrians (and all of the people in the Russian Federation) are forced to ingurgitate all day long.
Whereas, in the US of A, a fool with way too much money wants to take over the business of “freedom of saying whatever blips through your head” by buying up one of the platforms on which people rant and rave the way frogs twitch away even when decerebrated. Maybe I should take a look at Giuliano Da Empoli’s Les ingénieurs du chaos. Rage. A most profitable market apparently.
Back to translating and writing.
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