12 avril 2022

L’autre jour, quelqu’un m’a dit: “Je n’ai plus souvenir de la dernière fois où j’ai voté “pour” un candidat et son programme. On nous réduit à des machines à voter “contre” le ou la plus détestable.” Et vraiment, après le mépris dont il a fait preuve, comment voter “pour” lui quand on est enseignante, infirmière, aide-soignante, jeune privé de ressources, vieux ou vieille à la retraite insuffisante…en se faisant accuser d’être responsable de leur pauvreté et un poids sur la société (apparemment, la “société” existe dans une autre dimension). Et comment s’abstenir alors que l’extrême-droite reprend l’antienne du voile “symbole de l’islamisme.” Quand je pense à toutes les femmes voilées qui suivaient assidûment mes cours de français au centre social – on se croise et on se salue tous les jours encore. Prétendre diriger la vindicte des imbéciles contre ces femmes, c’est carrément dégoûtant. Sans même parler du “faire comme si” la France existait à l’intérieur d’une bulle, dans un monde parallèle dont tout étranger devrait être exclus…

Mesdames et Messieurs, faites vos jeux: Fieffé menteur contre fieffée menteuse…Bref, une campagne du deuxième tour sous le signe du dégoût.

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Devant chez moi, les ouvriers sont à planter des arbres par grand vent. Au marché discount, les pénuries commencent à apparaître sur les rayons – ce matin, ni pâtes ni huile sauf pour une seule bouteille abandonnée. “J’en aurai encore,” me dit la personne qui garnit les rayons, “mais pas aussi rapidement que d’habitude. Vous devriez venir les mardis en fin de journée,” ajoute-il. Alors, en lieu et place de victuailles, j’ai fait provision de cahiers et de stylos bille. Avec les hausses de prix, premières légères égratignures de ce qui vient, pendant qu’en Ukraine, les civils plongent en enfer. Apparemment, tout ce que Poutine et ses sbires ont appris des malheurs de leur pays, c’est comment diriger la méchanceté contre les autres.

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Malgré la vague grossissante des ukrainiennes exilées de leur pays, très peu d’entre elles se retrouvent ici. En l’absence d’argent à fournir aux organismes d’aide, et avec sa bonne volonté comme seul outil, il ne reste que la lecture, la traduction et l’écriture lorsqu’on est privé de tout autre moyen d’exprimer une certaine conception de la vie et des liens avec d’autres. Ou, à défaut, des contacts humains corrects avec son entourage, bref, out ce qui peut servir à résister contre l’impuissance et l’apathie – toutes deux des affirmations puissantes d’une résignation qui est en elle-même une attitude politique, quoiqu’on en dise.

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The other day, someone said to: “I can’t remember the last time I voted “for” a candidate and his or her programme. We’re reduced to behaving like machines voting “against” the most detestable one.” And really, after the contempt he has demonstrated, how can one vote “for” him if one is a teacher, a nurse, a nurse’s aid, a youth deprived of resources, an old person with an insufficient pension…while being responsible for one’s poverty and a drain on society ( apparently ‘society’ exists in another dimension). And how to abstain when the extreme right picks up the tune of the veil “a symbol of islamism”. When I think of all the veiled women who took my French classes at the social center – we run into each other and greet each other every day. – To aim the vindictiveness of the imbeciles against them is thoroughly disgusting. This without even mentioning the “let’s pretend” France exists in a bubble set in a parallel world from which all strangers must be excluded…

Ladies and Gentlemen, place your bets: a humdinger of a male liar, vs a humdinger of female liar. In short, a campaign for the second round under the sign of disgust.

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Across the street, the workers are planting trees in a strong wind. At the low-cost supermarket, shortages are starting to appear on some shelves – no pasta nor and one lonely bottle of oil, this morning. “I’ll be getting some more,” says the shelver, “but not as quickly as usual. You should come on Tuesdays in late afternoon,” he says. So I stocked up on copybooks and ballpoint pens. With the rise in prices, the first slight scratches of what is to come, while in Ukraine, civilians are plunged in hell. Apparently, the only thing Putin and his henchmen have learned from the sorrows inflicted on their own country, is how to practice evil against others.

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Despite the ongoing swell in exile from their country for Ukrainians, hardly a dribble of people have arrived here. With no money to offer as aid, and with nothing but goodwill at hand, there remains reading, translating and writing when all other means are unavailable with which to express a certain viewpoint on life and on relationships with others. Failing which, respectful human contacts with one’s neighbors, in short whatever serves to resist powerlessness and apathy – both being powerful affirmations of resignation, in itself a political attitude, notwithstanding what people say about it.

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