au 20e jour de l’invasion de l’Ukraine/On the 20th day of Ukraine’s invasion

Nous voilà bien servis.

Dans la catégorie: Mieux vaut tard que jamais ?

Tel le saint Paul des écritures saintes chrétiennes, terrassé par la vérité sur la route de Damas, un certain Boris Johnson – jusqu’alors empêtré dans des pitreries sordides – vient d’être frappé par la Grâce. Il comprend tout maintenant. Fort de cette révélation selon laquelle les leaders occidentaux se sont laissés berner par le grand criminel et tueur Poutine, il part en mission pour libérer la Grande Bretagne de son “addiction” au gaz et au pétrole russe. Direction : non pas Damas mais Riyad pour une rencontre avec le grand criminel de guerre et tueur le prince Mohammed bin Salman.

(D’après monsieur Johnson, tout le mal vient du fait que les leaders ont laissé faire lorsque Poutine a annexé la Crimée en 2014. À l’époque, monsieur Johnson était surtout occupé à ses âneries alors qu’il était maire de Londres à préparer sa campagne du Brexit. Il n’aura certainement pas eu l’occasion de remarquer l’afflux d’argent sale avec lequel petits et grands oligarches payaient comptant leurs luxueuses propriétés londoniennes, argent sale qui dégoulinait comme du purin sur des champs en jachère. )

Parlant d’oligarches présents et passés: je ne sais pas ce qui a motivé Sergeï Pougatchev à se confier ainsi à Médiapart. (Pour situer le personnage: “Oligarque de la première heure, propriétaire d’une banque dès 1991, Sergueï Pougatchev s’est hissé au plus haut des milieux économiques russes avant d’en être chassé par Vladimir Poutine à partir de 2010...” après avoir été l’un des artisans de sa succession à Eltsine, et de sa victoire électorale en 1996.)

Bref, depuis sa propriété à Nice, il décrit un système de gouvernment dans lequel un petit nombre de personnes, autour de Poutine, ont opéré une ‘usurpation totale” de tous les leviers de contrôle politiques, économique et militaire. Il décrit aussi les “récompenses pour services rendus” avec lesquelles personnalités politiques et autres sont payés. (Il ne faudrait pas oublier que, dans le système inculqué à un ancien lieutenant colonel du KGB, pareilles “récompenses” sont toujours le “choix judicieux” vu les perspectives plus désagréables évoquées en contrepartie – révélations infâmantes et autres gentillesses.) Financer une Marine Le Pen, un ex-chancelier allemand ou un Loukachenko, fait partie du ‘business as usual’.

Quant à Emmanuel Macron, Pougatchev s’étonne de sa “naïveté” : “Appeler Poutine pour lui dire d’arrêter la guerre, c’est grotesque. Et c’est pathétique…Quand Macron l’appelle (Poutine) pour la 25e fois et nous dit qu’il essaie de convaincre Volodia d’arrêter de tuer des enfants, c’est ridicule. Avant la guerre, on pouvait encore parler. Il le fallait. Chaque jour. 24 heures sur 24. Mais aujourd’hui ?”

(Et il était où, Macron, en 2014 lors de l’annexion de la Crimée ? Il était ministre de l’Economie, se prétendait “socialiste” et s’apprêtait à faire financer sa campagne présidentielle par la fine fleur de la ploutocratie française. Valeurs, valeurs, quand vous nous tenez… )

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Pendant ce temps, au ras des pâquerettes :

Elle enseigne à une classe mixte combinant des CM-1 et des CM-2 – soit des filles et des garçons de 10 et 11 ans. Parmi eux, deux enfants d’origine russe, bien intégrés jusqu’à maintenant, et qui sont maintenant la cible d’insultes et de harcèlement de la part d’autres enfants répétant les injures qu’ils ont entendues à la maison. Comme si ces deux enfants avaient quelque chose à voir avec les crimes de Poutine et de sa clique qui “s’amuse” en plus à agiter la menace nucléaire, pendant qu’un de son cercle reconnait que l’avancée des troupes n’est pas celle prévue à l’origine.

Si vous avez perdu le fil du prétexte initial de Poutine, pour consommation publique, il s’agissait pour lui de ramener ses frères et soeurs ukrainiens dans le giron de maman-Russie. Valeurs, précieuses valeurs…C’est beau et aussi crédible qu’un missile ballistique.

(Illustration: le rêve duquel Boris Johnson s’est réveillé pour se découvrir investi de la mission de “sauver le monde de son addiction au gaz et au pétrole russes”.)

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Aren’t we well served.

In the Better Late than Never? category:

Like saint Paul in the christian holy scriptures, felled by truth on the road to Damascus, a certain Boris Johnson – until recently embroiled in his sordid monkeying around – has just been struck by the Light. He now understands everything. On the strength of this revelation that Western leaders let themselves be fooled by the great criminal and killer Putin, he is off on a mission to liberate Great Britain of its “addiction” to Russian gas and oil. Direction: no, not Damascus, but Riyad for a meeting with the great war criminal and killer Prince Mohammed bin Salman.

(According to Mr. Johnson, all the evil flows from the fact leaders did not intervene when Putin annexed Crimea 2014. At the time, Mr. Johnson was mainly occupied by his tomfooleries while London mayor, and preparing his Brexit campaign. He certainly had no opportunity to notice the influx of dirty money with which big and small oligarchs paid cash for their luxurious London homes, dirty money flowing like manure on fallow fields.)

Speaking of past and present oligarchs: I have no idea what possessed Sergey Pugatchev to confide in this way to Mediapart. (To give some background on the man: “An oligarch from the first, owner of a bank as early as 1991, Sergey Pugatchev rose to the highest Russian economic ranks from where he was evicted by Vladimir Putin, beginning in 2010…” this, after having been one of Putin’s allies in the succession to Eltsin and having worked at his first electoral victory in 1996.)

Well, from his property in Nice, he describes a system of government in which Putin and a small number of individuals around him have “totally usurped” all levers of political, economic and military control. He also describes the “rewards for services rendered” with which political personalities and others receive their due. (One must bear in mind that in the system taught to one former KGB lieutenant colonel, such “rewards” are always the “judicious choice” , given the more unpleasant perspectives suggested as their countermeasure – ignominious revelations and other such kindnesses.) Financing a Marine Le Pen, a former German Chancellor or a Lukachenko? All part of the “business as usual”.

As for Emmanuel Macron, Pugatchev says he’s amazed by his “naïveté” : “Calling Putin to tell him to stop the war, this is grotesque. And it’s pathetic…Macron, calling for the 25th time and telling us he’s attempting to convince Volodia to stop killing children, is ridiculous…What is the aim of these calls?…Before the war, you could still talk. You had to. Every day. 24 hours out of 24. But now?”

(And where was Macron in 2014 at the time of the annexation of Crimea? He was the French minister of Economy, claimed to be a “socialist” and was gearing up to have his presidential campaign financed by the cream of the crop of French plutocrats. Ah values, precious values…)

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Meanwhile, down where the daisies grow:

She teaches a mixed class of first and second level middle school children – meaning girls and boys aged 10 and 11. Among them, two children of Russian origin, who were well integrated until now and who have now become the targets of insults and harassment from other classmates repeating the slurs they heard at home. As if these two children had anything to do with the crimes commited by Putin and his allies who “play” at brandishing the nuclear threat, while some in his circle acknowledge his troops are not advancing as originally planned.

If you’ve lost track of Putin’s initial narrative for public consumption, this was all supposed to be about bringing his Ukrainian brothers and sisters back into the loving fold of Mother Russia. Values, precious values… As beautiful and believable as a ballistic missile.

(Illustration: the dream from which Boris Johnson awoke, invested with the mission of “saving the world of its addiction to Russian gas and oil”.)

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