“…mais pas une seconde de plus !”/”…but not a second longer!”

Le titre : c’est l’annonce des dirigeants chinois hier, vouant une “amitié éternelle” à la Russie qui m’a remis en mémoire cet ajout au fameux “Avec l’union soviétique pour l’éternité!” qu’inscrivaient sur les murs les tagueurs à Prague lorsque le “grand frère” est venu les envahir “pour leur bien” en 1968.

Je suppose que l’éternité est une voie à sens unique vers le futur car je me rappelle très bien une période sous Mao et Staline lorsque l’amitié était tombée à un très bas niveau dans le réservoir à essence. M’enfin, comme chacun sait, l’éternité des ‘amour-toujours” est à dimension variable. Quant au futur, comme nous n’y arrivons jamais, je suppose que “l’amitié éternelle” se déplace dans le futur comme la promesse de la reine assurant Alice (au pays des merveilles) de confiture dans le jour qui vient – le jour qui vient étant toujours, et bien, le jour à venir, oui ?

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Elle se tient très droite, regarde le journaliste étranger et dit : “Je connais la vérité, Monsieur. Nous avons connu la guerre; croyez-vous que nous irions faire la guerre dans un autre pays? L’Ukraine nous a attaqués, voilà la vérité.” Et, comme le prétend de plus en plus la propagande gouvernementale en Russie, il fallait absolument se défendre et arrêter l’Ukraine de sa fabrication d’armes nucléaires et biologiques.

L’effet-miroir, en somme. Puisque ce gouvernement fabrique des armes nucléaires et biologiques (et les utilise contre ses propres citoyens, comme à l’étranger), les autres font certainement la même chose.

Et ainsi de suite. Apparemment, un deuxième général russe aurait trouvé la mort en Ukraine, comme le veut l’expression. “Trouver la mort“, comme s’il était nécessaire de lui courir après et d’en faire généreusement profiter tout le monde autour de lui. Vous auriez pu mourir tranquillement dans votre sommeil, général. La mort vous aurait trouvé quand même, vous savez.Ni gloire ni opprobre “éternelles”, c’est vrai. Mais vous n’en auriez rien su, d’une façon ou d’une autre.

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Pendant ce temps, journée de la Femme (mais laquelle?) oblige, nous sommes conviées à une marche populaire ici en fin d’après-midi. La convocation, distribuée sur la marché dimanche dernier, comporte un texte grandiloquent dans le style de L’Internationale, texte disposé comme un poème (apparemment, il suffit que ça ressemble à un poème pour en être un). Ce texte nous invite, “femmes esclaves” à “briser nos entraves“.

J’ai horreur de la grandiloquence. Je veux bien que la marche en question soit “pour les droits des femmes”, et non pas pour les droits de la Femme (mais laquelle ?). Mais tout de même, je crains fort d’être occupée à profiter de l’arrivée des deux volumes de nouvelles de Ursula K. Le Guin. Le premier s’intitule Where on Earth et le second Outer Space, Inner Lands. Je lis de façon aléatoire et dans l’un et dans l’autre, tout au plaisir de croiser une âme soeur. (Sa façon de décrire le “genre” en littérature dans son introduction au deuxième volume vaut le prix d’achat des deux livres):

“Le genre, un concept qui aurait pu avoir une fonction utile pour distinguer diverses sortes de fiction, a été rabaissée en une façon de déguiser des jugements de valeur. Les divers “genres” sont dorénavant surtout des étiquetages commerciaux de produits pour simplifier la vie des lecteurs paresseux, des critiques paresseux et des services de ventes chez les éditeurs.”

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Et pour ceux et celles qui lisent l’anglais et veulent des informations directement d’Ukraine, il y a The Kyiv Independent (qui organise aussi une collecte pour soutenir les médias et journalistes indépendants en Ukraine).

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The title: It’s the announcement made yesterday by the Chinese leaders declaring their “eternal friendship” with Russia that brought back to mind that addition to the famous “With the Soviet Union for eternity!” taggers in Prague added on the walls when the “big brother” invaded them in 1968 “for their own good”.

I guess eternity is a one-way street into the future because I distinctly remember a period under Mao Tse Toung and Stalin when friendship was running on very low tank indeed. Anyway, as everyone knows, the eternity of ‘love-forever’ has varying dimensions. As for the future, we never get there so I guess the “forever friendship” moves along in the future like the Queen’s promise to Alice (in Wonderland) of jam every other day – the other day always being, well, the other day, yes?

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She stands very straight, looks the foreign journalist in the eye and says: “I know the truth, Sir. We have known war; do you think we would go and make war to another country? Ukraine attacked us, that’s the truth of the matter.” And as her government propaganda claims ever more loudly, there was absolute need for Russia to defend itself, since Ukraine was busy making nuclear and biological weapons.

It’s called the mirror effect. Since this government makes and uses nuclear and biological weapons (including against its own citizens and as well as abroad) others are necessarily doing the exact same thing.

And so on. Apparently, a second Russian general “met his death” in Ukraine, as the expression goes. “Met his death”, as if there was any need to run after it, and share it generously with everyone in the vicinity. You could have died quietly in your sleep, general. Death would have found you just as easily, you know. True, there would have been no “eternal” glory nor opprobrium. But you wouldn’t have known a thing about it either way.

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Meanwhile, this being International Woman’s Day (but which woman?) we are invited to join a march late this afternoon. The convocation distributed at the Sunday market, bears a bombastic text in the style of the International, a text laid out as a poem (apparently, if it looks like a poem, then, that’s what it is.) The text invites us “enslaved women” to “break our shackles”.

I loathe grandiloquence. And yes, the march may well be “for women’s rights”, and not for the rights of Woman (but which one?). Still, I’ll be busy, I’m afraid – taking advantage of the receipt of Ursula K. Le Guin’s two-volume set of short stories. The first is titled Where on Earth, and the second, Outer Space, Inner Lands. I’m reading randomly from both, it’s always so good to run into kindred spirits. (Her take on literary “genres” in the Introduction to the second volume? In itself, already worth the price of the books):*

Genre, a concept which could have served as a useful distinction of various kinds of fiction, has been degraded into a disguise for mere value-judgment. The various “genres” are now mainly commercial product-labels to make life easy for lazy readers, lazy critics, and the Sales Departments of publishers.”

*Ursula K. Le Guin, The Unreal & the Real, Selected Stories, volumes 1 and 2, Gollancz, Orion Publishing Group, 2015

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And for English readers who wish to get their news from the source: The Kyiv Independent (the paper is also running a campaign to fund independent media and journalists in Ukraine.)

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