
J’avais neuf ou dix ans – nous sommes donc en 1955 ou 1956. Dans les bandes dessinées du samedi, il y a Dick Tracy, le détective au profil en lame de couteau, L’il Orphan Annie aux grands yeux aussi hallucinés que ceux des manga actuels, mon cher Pogo dans le marécage qui ressemble à certaines plages du monde contemporain, et d’autres. Puis, dans les pages dites “féminines”, on trouve la chère Abby ou encore, sa soeur Ann Landers qui faisaient office de confessionnal anonyme pour des femmes tout aussi anonymes – ou imaginaires – qui les consultaient, qui pour un chagrin d’amour, qui pour un problème familial ou les éternels mon-mari ceci et mon-mari cela…
Abby et sa soeur ont maintenant été remplacées par de nouvelles oracles qui répondent à des questions signées de pseudos tels “poly-amoureuse en détresse” ou, bien sûr l’éternel “m’aime-t-il vraiment ?” À l’époque, la teneur générale de la réponse était toujours la même. Qu’il s’agisse de “Coeur brisé en Louisiane”, d'”Incomprise en Virginie” ou de “Me trompe-t-il avec la comptable au Colorado,” toutes recevaient un encouragement à “mettre l’accent sur le positif” – un de perdu, dix de retrouvés, davantage de gentillesse adoucirait la féroce belle-mère, ou “mais votre mari se lave régulièrement maintenant et il a cessé de boire ! Estimez-vous chanceuse, madame !” Maintenant, il est question d’Affirmation de Soi comme d’une sorte de voie royale vers…euh…ben le prochain épisode de qui suis-je, que veux-je, où vais-je et que fais-je. Régime bio et yoga devraient nous mener à bon port.
Et roule la boule bleue dans l’espace fait de…euh…
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L’autre soir, je lisais (ou tentais de lire) l’un des romans de Frank Herbert faisant suite à Dune et je tombais sans cesse sur des passages sur l’espace-temps, la préscience, l’avenir connu, l’avenir inconnu, et le fait de connaître le futur nous condamnant à vivre dans le passé, et cetera…avec nettement l’impression d’essayer de suivre la pensée de quelqu’un sur hallucinogène. Un bref regard sur wikipedia me confirmant qu’effectivement, le monsieur avait exploré divers états de transe induite par des substances. L’ennui, c’est que la pensée de quelqu’un en vol plané dans ses espaces intérieurs devient plutôt difficile à suivre, alors ça ne m’apprend pas grand chose sur la nature du temps ou du vide inter-sidéral en dehors du cerveau de Frank Herbert.
Par contre, j’ai retenu un passage que j’aurais dû souligner où il parle du fameux adage selon lequel le pouvoir absolu corrompt absolument où il écrit que le problème réside plutôt dans le fait que le pouvoir politique attire un certain type de personnalité, elle-même encline à la psychopathie ou fortement influençable par des psychopathes dans son entourage. Hum… me dis-je. (Mais je ne me suis pas rendue plus loin que ‘hum…’ Demain, peut-être ? )
Voyons . Chère Abby: je suis perplexe quant à l’avenir de mon espèce et, surtout, sur comment traiter avec des chefs présentant des signes d’addiction extrême au pouvoir. Que me recommandez-vous ? Perplexe à Trifouillis-les-deux-oies.
Silence – passé, présent et à venir….
…
… Esprit de Chère Abby, êtes-vous ici ? Là ?
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I was nine or ten years old – so we are in 1955 or 1956. In the newspaper’s Saturday comics you found Dick Tracy with his knife-edge profile, L’il Orphan Annie with her big eyes, as hallucinated as those in current manga, my dear Pogo in the swamp resembling some of the beaches in today’s world, and others. Then, in the so-called “Women’s Pages”, you found dearest Abby or her sister Ann Landers who performed as anonymous confessionals for women just as anonymous – or imaginary – as they were, consulting, this one for a broken heart, that one for a family problem or for those eternal my-husband this and my-husband that…
Abby and her sister have now been replaced by contemporary oracles who answer questions from pseudos such as “distressed poly-amorous” or of course, the eternal “does he really love me?” The general tenor of the reply was always the same. Whether it was to “Heartbroken in Louisiana”, or “Misunderstood in Virginia” or “Is he cheating on me with the accountant, in Colorado”, all were encouraged to “make the best of it” – plenty more fish in the sea, kindness would soothe the savage heart of the mother-in-law, and “he washes regularly now and doesn’t drink anymore ? Count your blessings!” Now, the talk is all of Self-Affirmation as being the Royal Road to…uh…well, the next episode of who am I, what do I want, where am I going and what am I doing. Organic foods and yoga should lead us to a safe harbor.
While the blue ball rolls through a space made up of…uh…
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The other evening, I was reading – or attempting to read – one of Frank Herbert’s sequels to Dune and constantly coming across passages about space-time, past knowledge, foreknowledge, the known and the unknown future and how knowing the future just locked you into currently living in the past, etc… with the strong impression of trying to follow the thoughts of someone on hallucinogens. A quick look at wikipedia confirmed the man had explored various transe states induced by various substances. The problem being even attempting to follow the thought pattterns of someone who is flying in his inner spaces is very difficult, so this didn’t teach me much about the nature of time or of spaces outside Frank Herbert’s mind.
However, one passage I failed to note down was about the famous quote about absolute power corrupting absolutely where he writes that the problem resides rather in the fact that political power attracts a certain type of personality inclined toward psychopathic tendencies or easily influenced by psychopaths in his or her surrounding. Hm…thought I. (But I got no further than ‘hm…’ Tomorrow maybe ?)
Let’s see. Dear Abby: I am sorely perplexed over the future of my species and, mainly, about how to deal with leaders showing signs of extreme addiction to power. What do you recommend ? Dismayed in Appalachicola.
…
Ghost of Dear Abby, are you here? There ?