
dire les choses correctement. Tout est là. Trop d’emphase, on tombe dans le mélodrame. Pas assez, on rate le coeur du propos. Et quand il s’agit de souvenirs personnels, les risques sont démultipliés – d’où l’intérêt des personnages fictifs, chargés de transmettre divers aspects d’une histoire toujours plus complexe qu’on ne le pense. Au détour d’un article en français, je tombe sur une référence à un essai de George Orwell sur la langue anglaise. Je suis certaine qu’il me sera tout aussi utile pour la langue française aussi.
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La loi contre l’avortement adoptée par le Texas (avec le concours du silence honteux de la Cour Suprême du pays) est détestable dans tous ces aspects, auxquels s’ajoute la notion révoltante de récompense offerte (10 000 $) à celui ou celle qui dénoncera un médecin ou une clinique ou même un citoyen ayant véhiculé quelqu’un vers une clinique pratiquant les interruptions de grossesse.
Dix mille dollars. Hourra pour les chasseurs de primes. Apparemment, la vie n’est sacrée qu’entre le moment du premier battement de coeur du foetus et la première goulée d’air du nouveau-né. Ensuite, c’est chacun pour soi.
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Euh…les afghans qui étaient encore à l’aéroport après le départ du dernier vol d’évacuation, ou qui n’y sont jamais parvenus ? Qu’est-ce que…oh, pardon, le récit s’est maintenant déplacé vers ceux qui ont réussi à prendre place dans l’un des vols. Et vers des questions fascinantes comme: oui ou non, faut-il faire affaire avec les Talibans ? Ben voyons. Les pharmaceutiques ont-ils encore besoin de pavots ? Le lapis-lazuli est-il encore commercialisable ?
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Et cette phrase que je retiens d’un article dans Médiapart: “Combattre les spectres, c’est une des fonctions de la littérature.” Les spectres exercent une influence déterminante, surtout lorsqu’on les nie. La question, encore et toujours, étant de les saisir correctement. Ah, ils sont malins, les spectres. Et nous, bien paresseux et distraits, parfois.
saying things correctly. Everything depends on it. Too much emphasis leads to melodrama. Not enough, you miss the heart of the matter. And when personal recollections are involved, the risks increase tenfold – which is where fictitious characters come in handy, to bear some of the load of stories that are always more complex than one thought. While reading an article in French, I come across a reference to an essay by George Orwell on the English language; I’m sure it will prove just as useful for the French language also.
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The law against abortion adopted in Texas (with the shameful silence of the country’s Supreme Court) is detestable in its every aspect, to which must be added the revolting notion of a prize offered ($10 000) to anyone denouncing a doctor or a clinic or even a citizen having driven someone to a clinic practicing the interruption of pregnancies.
Ten thousand dollars. Hurray for the bounty hunters. Apparently, life is only sacred between the moment of the first fetal heartbeat and the first gulp of air by the new-born. After that, it’s everyone for himself.
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Uh…the Afghanis who remained in Kabul airport after the last departure of the planes or never made it there? What…oh, sorry, the story has moved on to those who managed to board one of the flights. And fascinating questions such as: yes or no, should we do business with the Taliban? Now really, I ask you, do the pharmas still need poppies ? Is lapis-lazuli still marketable?
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And the sentence I retain from an article on Médiapart: “fighting spectres is one of the functions of literature.” Spectres exercise a decisive influence, especially when negated. Here again, as always, it is a question of grasping them correctly. Oh, spectres are clever, and we are often distracted and lazy.