
J’ai failli cessé d’écrire cet article lorsque j’ai constaté qu’il serait publié le 8 mars. Ah oui, le 8 mars, journée internationale des droits de LA femme (mais…laquelle???). Journée où certains patrons offrent une rose à leur secrétaire (rose cueillie par une autre femme dans un environnement pourri de pesticides divers) ou encore un soutien-gorge pigeonnant à leur “petite chérie.” L’idée même qu’il faille encore se battre pour faire accepter l’évidence de l’inanité d’une supposée hiérarchie faisant de l’homme le roi et maître de la création, y compris de sa fidèle compagne tirée de l’une de ses côtes…désolée mais je n’en peux plus de constater que chaque pas en avant se transforme en trois pas en arrière comme si l’on tentait de monter dans un escalier roulant se dirigeant vers le bas. (Je vois, par exemple, que le nombre de mariages de filles mineures s’accroit avec la pauvreté induite par le Covid ou ces vies de misère dans les camps de réfugiés ou encore, tel qu’observé ici, la promesse de papiers en règle pour la fille mineure d’une famille donnée en mariage au fils d’une famille ayant obtenu son titre de séjour.)
Mais j’étais justement à relire Françoise Héritier (et notamment Masculin/Féminin II Dissoudre la hiérarchie ) lorsque s’est présenté l’article à traduire au sujet de JinNews sur Kedistan. Cette agence de nouvelles s’emploie justement à “dissoudre la hiérarchie” dans un contexte et un climat politique particulièrement chargés. Quand il s’agit de main-mise patriarcale sur l’ensemble de la société, on ne badine pas en Turquie.
Alors…encore un tour de piste ?
Nos lointains ancêtres n’étaient pas des imbéciles. Mais ils n’avaient pas le bénéfice de microscopes et autres trouvailles permettant de mieux appréhender des vérités cachées. Alors, ils ont cherché des explications à ce mystère voulant que les hommes ne fabriquent pas de bébés du tout, pendant que les femmes, elles, en fabriquaient et des deux sexes ! Ce qui, bien sûr, rendait les femmes indispensables, mais…mais…et les hommes alors ? Et bien, pas bêtes, ils ont aussi remarqué que les femmes ne pouvaient rien produire du tout avant et après leur période de menstrues et sans l’intervention essentielle d’une éjaculation de leur part. De là, sans doute, a dérivé la notion que “la femme” était certes un bien précieux, indispensable même, mais que les mâles détenaient l’ingrédient magique et essentiel à leur fécondité. De plus, en s’échangeant ce bien précieux d’un groupe à l’autre, on pouvait s’assurer la paix avec le voisin (et un accroissement de son cheptel animal, en plus. Combien tu m’en donnes pour ma soeur? 7 chèvres ? Pas question. On m’en offre le double de l’autre côté de la rivière). Et cetera. Allez hop, les femmes, croissez-nous et reproduisez-nous (et, s’il-vous-plaît, ne nous imposez pas la naissance de trop de filles , on n’arrive pas toujours à toutes les caser.)
Et comme la race humaine dans son ensemble n’est ni plus brillante ni plus bête que ses ancêtres, elle reproduit, bon an, mal an, des situations dans lesquelles les bébés garçons sont accueillis dans l’allégresse et les bébés filles…ben, dans le meilleur des cas, ça dépend.
Et puis franchement, d’en être encore à considérer les femmes comme essentiellement rien d’autres que des machines à reproduction, après tant de millénaires, ça devient lassant, non?
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I almost stopped writing this article when I realized it would be published on March 8. Ah yes, March 8th, the international day of woman’s rights (which woman, exactly??). A day when some bosses offer their secretary a rose (hand-picked by another woman far away, in a field made toxic by assorted pesticides) or a breast enhancing bra for their “little sweetheart.” The very notion that we still have to fight to have the obvious fact dismissed of a supposed hierarchy making man the lord and master of all creation, including his helper fashioned out of one of his ribs… sorry but I’m fed up with observing that each step forward comes with three steps back, as if we were attempting to walk up a down escalator. (I see, for instance, that child marriages are on the upswing as a consequence of increased poverty under Covid and of lives wasting away in refugee camps. Or, as witnessed here, one family holding out the promise of papers for another family’s underage daughter as a bride for their son with official residence papers.)
But I so happened to be re-reading Françoise Héritier (and notably her study on Masculine and Feminine and the question of dissolving the hierarchy) when this article showed up for translation on Kedistan. This news agency is precisely involved in “dissolving the hierarchy” in a political context and climate that are particularly loaded. When it comes to a patriarchal stronghold on all of society, they don’t fool around in Turkey.
So…once more with feeling?
Our early ancestors were not idiots. But they did not have the benefit of microscopes and other implements allowing for a closer look at hidden truths. So they attempted to explain the mystery by which men produced no babies while women produced babies of both genders! Of course, this rendered women indispensable but…but…what did that mean for men? Well, since they were not idiots, they also noticed that women could only produce babies during their menstruating years and only if a man had provided the essential ejaculation. No doubt this led to the derivative notion that the woman was indeed a precious commodity, indispensable even, but that the males possessed the magical ingredient essential to their fecundity. Moreover, by exchanging this precious female commodity from one group to another, you could insure peaceful relationships with your neighbor (and an increase in your own heads of cattle, in the bargain. How much you give me for my sister? 7 goats? No way. I can get double that on the other side of the river. Etc.) Come on, get to work, women, thrive us and increase us but, please, don’t give us too many girl babies, we can’t always manage to find takers for all of them.)
And as a whole, the human race being neither brighter nor dumber than its ancestors, it goes on perpetuating, year after year, situations in which baby boys are greeted with rejoicing and baby girls…well, in the best cases, that depends.
And frankly, after all these millenia, to still be considering women as essentially nothing but reproduction machines, gets tiring, no?