
Je ne possède pas un jeu de jonchets (qu’on appelle aussi Mikado). Mais les feutres en illustration serviront pour les besoins de la cause.
Ils serviront à illustrer un nombre d’enchevêtrements “administratifs” – “l’ administratif” étant la meilleure barrière molle imaginable pour immobiliser les gens et les diriger sur la voie de l’impuissance permanente.
En quelques mots: un jeune homme, dorénavant muni d’un emploi à long terme (mais englué comme tant d’autres dans le marécage des “récépissés” pour sa demande de titre de séjour à long terme aussi), souhaite que sa fiancée puisse le rejoindre. Elle habite en Côte d’Ivoire, a son bac et souhaite faire des études d’infirmière ici en France. Tout le monde sait que les infirmières sont très en demande en ce moment à cause de la pandémie et on pourrait croire que cela réduirait les enchevêtrements “administratifs” qui la retiennent. On aurait bien tort de le croire. Car, je le répète: “l’administratif” est l’instrument de choix lorsqu’il s’agit d’appliquer des politiques tout en se dédouanant de toute responsabilité dans leur … administration.
Un exemple parmi des centaines: après sa nuit de garde en hôpital, un anesthésiste reçoit une rémunération de 1 200 €. S’il est citoyen français, s’entend. S’il est étranger et en demande de statut, il reçoit 1 200 € comme salaire mensuel…et se tape des appels incessants et des heures d’attente pour un rendez-vous où l’on traitera enfin sa demande de titre de séjour. Sans garantie de résultat positif.
Je m’adonne à relire Contre tout espoir de Nadejda Mandelstam en ce moment dans lequel elle parle du sentiment d’étouffement et d’impuissance vécu sous le règne de la terreur stalinienne et de ses retombées. Les habitants de nombre de pays connaissent ce même type de paralysie induite. D’autres, dans des pays “avancés” ont droit à l’étouffade-guimauve causée par des couches successives d’enchevêtrements “administratifs” menant à une paralysie de la volonté et le haussement d’épaule sur le sort des autres avec un “ben oui, c’est comme ça, on n’y peut rien.”
Ce qui est, justement, le but de tout l’exercice.
Alors, encore et encore, il faut trouver les failles et relancer les jonchets. Parce que dès qu’on entend les mots “en principe, l’administration…” il est clair qu’il existe des voies parallèles en-dehors du principe régissant les treize sous-paragraphes de l’article XZ414-B20 et les amendements proposés à l’article R-3426 de 1892.
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I do not own a game of pick-up-sticks (also known as Mikado). But the felt-points in the illustration will serve as stand-ins.
As stand-ins for one in any number of “administrative” entanglements – “administrative” serving as the most effective, cushionny barrier imaginable, when it comes to immobilizing people and setting them on the road to permanent helplessness.
Briefly stated: a young man, now equiped with a full-time job (but caught like so many others in the morass of “temporary receipts” on his application for long-term residency) wishes his fiancée to join him here. She resides in the Ivory Coast, has completed her B.A. and wishes to study nursing here in France. As everyone knows, nurses are in tremendous demand right now because of the pandemic and you might think this would reduce the “administrative” entanglements standing in her way. How wrong you would be. For, I repeat: the “administrative” is the instrument of choice when it comes to applying policies while relinquishing all responsibility in their … administration.
One example among hundreds: after a night on guard in a hospital, an anesthesist receives 1 200€, if he’s a French citizen. If he is a foreigner awaiting final papers, he is paid 1 200 € as his monthly salary, while multiplying phone calls and sessions of waiting in line for an appointment to finalize his request for residency status. With no guarantees of a positive outcome.
I happen to be re-reading Nadezhda Mandelstam’s Hope Abandoned at the moment in which she talks of the stifling feeling of helplessness experienced during the Stalinist reign of terror and its aftermath. Inhabitants in a number of countries experience this kind of paralysis. Others, in “advanced countries” get the marshmallow-like smothering in layer upon layer of “administrative” entanglements leading to paralysis of the will and a shrug of the shoulders over other people’s fates along with a “yeah well, that’s how it goes”.
Which is precisely the aim of the whole exercise.
And so, over and over again, one must recast the pick-up-sticks and look for the flaws. Because as soon as we hear the words “in principle, the administration…”, we have a clear indication that other ways exist outside the principle overseing the thirteen sub-paragraphs in article XZ414-B20 and the amendments proposed to article R-3426 from 1892.