Beaufort 3 –
Au 3 de l’échelle de Beaufort, sur terre, les feuilles et les petites branches s’agitent constamment; dans un ciel bleu, de petits nuages filent allégrement vers de plus gros.
C’est le cas aujourd’hui.
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Cette première semaine de dé-confinement n’annonce en rien l’arrivée de jours meilleurs, peu s’en faut. Il n’est qu’à voir l’empressement que met le gouvernement à rendre plus précaire encore le sort des personnes en contrats de courtes durées pour savoir qu’ici comme ailleurs les braves “héros” qu’on a salués et applaudis continueront à être les sacrifiés d’un système littéralement impuissant à remettre en cause le moteur même de son fonctionnement. Je persiste à croire que nous n’assistons pas au délitement du monde, comme on aime bien nous faire croire, mais au délitement d’un monde bien précis – ce qui n’est certainement pas un motif de réjouissance pour ceux et celles qui en subissent les conséquences, mais ne ressemble en rien aux discours apocalyptiques de ceux et celles que ce système a récompensé au centuple et qui prétendent que rien, mais rien, ne saurait remplacer le profit comme aspiration ultime au salut – nécessitant des sacrifiés, bien sûr et malheureusement, une médaille et un bon mot pour elles et eux.
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Retour en classe – ah lala. Dans une école que je connais très bien, des 5 élèves parmi les 22 qui devaient se présenter à l’école, 2 l’ont fait. Avec leur enseignante masquée, ils ont passé la matinée à apprendre les règles de distanciation, à se laver les mains (avant et après chaque activité) et à jouer à distance pendant la récréation. Puis, ils ont mangé leur pique-nique, assis à leur bureau, avant de rentrer à la maison pour que l’enseignante puisse faire de l’enseignement “distanciel” avec les autres (ou, du moins, ceux et celles qui ont une connection internet).
“Et qu’as-tu appris à l’école aujourd’hui, mon cher petit…”
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La nouvelle que j’étais en train d’écrire s’est terminée aussi abruptement qu’elle avait commencé. Il y aura de la re-lecture, mais, de toute évidence, le jeune homme de 21 ans restera assis sur son banc jusqu’au moment où il se lèvera pour aller acheter un cahier en remplacement de celui à couverture orange qu’il avait piqué au travail. Qui sera-t-il à 40 ans? à 60 ou 70 ? Je n’en ai pas la moindre idée (et lui, encore moins que moi, bien sûr).
Beaufort 3 –
At the third level of the Beaufort scale on land, leaves and small branches move constantly; in a blue sky, tiny clouds move along cheerfully to join up with bigger ones.
This is the case today.
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This first week of de-confinement does not augur well for the arrival of better days, far from it. One only needs to see the speed with which the government rendered more precarious still the fate of people hired on short-term contracts, to know that, over here as everywhere else, those brave “heros” hailed and applauded will continue to be sacrificed to a system litterally powerless in reconsidering the very motor at the heart of its functioning. I persist in believing that we are not witnessing the unraveling of the world, as some like to make us think, but to the unraveling of a world, a very specific one – which is no cause for rejoicing for those subjected to its consequences, but has nothing to do with the apocalyptic speeches of those the system has richly rewarded and who claim that nothing, but nothing, can replace profit as the ultimate goal of salvation – requiring some to sacrifice themselves, of course and unfortunately. Let’s have a medal and a good word for them.
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Back to school – oy oy oy. In one school I know very well, out of the 5 children out of a group of 22 who were to show up in one class, 2 finally did. With their masked teacher, they spent the morning learning all the distancing rules, washing their hands (before and after every activity) and playing at a distance from one another during recess. They ate their picnic lunch sitting at their desk and then went home so that the teacher could do the distance teaching with the others (at least, those with an internet connection).
“What did you learn in school today, dear little boy of mine…”
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The short story I was writing ended as abruptly as it had started. There will be some re-reading involved, of course but, clearly, the young man aged 21 will sit on his bench until the moment he will get up to go buy a new notebook to replace the one with an orange cover he had lifted at work. Who will he be at age 40? at 60 or 70? I don’t have the faintest idea (and he, even less than I, obviously.)