
Conversations –
Ma soeur aînée habite au Mexique. Ces derniers jours, elle a appris que le confinement des vieux se prolongerait au moins jusqu’au début juin, en raison de leur très grande “fragilité” et “susceptibilité face à la contamination.” Comme elle me l’a écrit en termes moins policés, les vieux sont relégués à la “fosse commune sociale” puisque, de toute façon, leur fin de vie approche, n’est-ce pas ? Autant qu’ils s’y préparent…
Or, on sait bien que le problème n’est pas tant celui de cette “fragilité” de personnes qui ont tout de même réussi à tenir 70, 75, ou 93 ans dans des conditions qui n’avaient rien d’idylliques. On leur demande tout simplement d’assumer l’impréparation des gouvernements, alors qu’on “découvre” soudainement que les travailleuses et les travailleurs dans les “services” c’est-à-dire, les secteurs “improductifs” sont quand même essentiels, voyez-vous ça. Mais les vieux, vous savez, ces “improductifs” par définition, qu’ils se tiennent tranquilles et ne viennent pas nous embêter dans une heure si grave.
Et la plupart des vieux respecteront la consigne parce des vies entières consacrées à “faire avec” et à “endurer, on n’a pas le choix” leur auront appris à grommeler à voix basse, pour le meilleur et pour le pire.
Pour ce qui est de la valeur des rapports inter-générationnels, du caractère unique des échanges en présence les uns des autres, des conversations qui ne consistent pas en bouteilles jetées dans l’océan internet, et recueillies des heures plus tard…Encore faut-il avoir une connexion internet et une certaine facilité pour les échanges épistolaires. Et à la condition d’avoir quelqu’un à l’autre bout pour qui l’échange est aussi important qu’il l’est pour soi.
Quant à la “valeur ajoutée” que procure la présence physique de l’autre…elle n’a pas de cotation en bourse, dans la logique marchande, ça doit vouloir dire qu’elle n’en a pas qui vaille. Un émoji ou deux devraient faire l’affaire.
L’heure est trop grave pour ces considérations ‘humanistes’, voyez-vous. Il me semble entendre depuis l’enfance que “l’heure est trop grave pour…” et qu’on “verra plus tard, mais d’abord…”
Et tous le savent bien, depuis l’enfance, justement, ce “qu’on verra plus tard” veut dire en vrai.
Conversations –
My eldest sister lives in Mexico. A few days ago, she learned that confinement for the elderly would be extended at least until the beginning of June, due to their great “fragility” and “susceptibility when facing contamination”. In less politically polished words, she said the old were relegated to the “social common grave” since, in any case, their end of life was approaching, yes? They might as well prepare for it…
We all know full well that the problem is not so much that of the “fragility” of individuals who, after all, managed to survive 70, 75 or 93 years in conditions that were less than idyllic. They are simply expected to assume governmental unpreparedness, while those same governments suddenly “discover” that people working in “services”, meaning “non-productive” sectors are nonetheless essential, who ever knew such a thing. But the eldery, you know, those “unproductive” ones by definition, please, let them keep quiet and refrain from bothering us during these dramatic times.
And most of them will do just that because lives spent “making do” and “putting up with” have taught most of them to mutter under their breath, for better or worse.
As for the value of inter-generational exchanges, the unique aspect of exchanges in the presence of the other, of conversations that do not consist in bottles thrown into the digital sea and recovered hours later…Conditional on having an internet connection and a certain facility for written exchanges. Conditional on having someone at the other end who values the exchange as much as you do.
As for the “added value” provided by the physical presence of the other…it has no Stock Market quotation, so, in merchandising logic, that must mean it has no value worth mentioning. An emoji or two should do the trick.
The times are too fraught for such ‘humanistic’ considerations, you see. It seems to me I’ve heard since childhood that “the times are too serious for…” and that “we’ll see about it later, but first…”
And everyone knows since childhood, precisely, what “we’ll see about it later” truly means.