
“le travail du poème…est l’écoute de l’ordinaire.”
“ce n’est pas la hauteur du langage qui fait qu’il y a du sublime dans le poème, c’est la dose de l’inexprimable , qui fait que le poème commence quand on ne peut plus parler.” Henri Meschonnic dans Le poème commence quand on ne peut plus parler, dans Apulée #4 Traduire le monde, pp 333-336
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image restante d’un rêve:
Le tableau représentait trois personnes vues de dos, assises à une table pour un repas. L’homme était sur la gauche, la mère au milieu et le fils d’environ 11 ans, à droite. La table était devant des portes ouvertes donnant sur un balcon à balustrades en pierre donnant sur la mer.
Le visage de la mère était tourné vers l’homme. Les trois visages étaient recouverts d’un enduit un peu plus clair que le reste de leur peau, oblitérant complètement leurs traits. Il n’était pas évident si cet enduit avait été posé par le peintre lui-même ou rajouté plus tard. Un peu comme l’absence de bouche sur le personnage de Bécassine.
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Dans la bibliothèque:
Sénèque. Un petit fascicule des années 70 de la collection Classique en Poche bilingue contenant La Vie heureuseet La Providence en latin et en français. Textes que les “bonnes sœurs” ne nous auraient pas confiés ni en thème ni en version puisque le philosophe y fait l’éloge du suicide.
Pas plus qu’elles ne nous auraient informé que Sénèque était un milliardaire, qu’il fut le précepteur de Néron et que ce dernier ordonna le suicide en question (qui fut long, douloureux et compliqué). L’épouse de Sénèque, Pauline, voulut mourir avec lui. On la comprend, considérant ce qui l’attendait sinon. Les sbires de Néron firent de leur mieux pour la garder en vie (pour ce qui l’attendait au gré de leur patron, nul doute), mais comme l’auteur de la note d’introduction perd ensuite tout intérêt dans le sort de Pauline pour en revenir à Sénèque, je reste sur ma faim la concernant.
A la lecture d’extraits de La Vie heureuse, je vois que le stoïcisme du monsieur ne l’empêchait nullement d’assumer pleinement le fait qu’il préférait être riche et en santé, plutôt que pauvre et malade. Ce qui coule de source quand on est milliardaire, je suppose; philosopher sur la gestion stoïque d’une fortune doit largement suffire à occuper son homme, surtout quand il doit gérer les crimes, foucades et divers états d’âme d’un Néron, de surcroît. Je ne m’étonne pas que le stoïcisme y acquiert de drôles de relents.
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Autres faits sans rapport, cette fois tirés d’un texte de Marc Petit dans Apulée #4 Traduire le monde:* “…les Bretons ne connaissent qu’un mot, glaz, pour dire tout à la fois “gris”, “bleu”, “vert” et “violet”, autrement dit les couleurs changeantes de l’océan ! Il n’y a pas, en grec, de mot pour dire “bleu”, couleur omniprésente dans le paysage de l’Égée, couleur du drapeau – le grec recourt à des emprunts au français (blè) et à l’italien (galazio).”
(Je vois une certaine ressemblance entre galazio et glaz, mais c’est peut-être purement accidentel.)
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Ecrire. Quand deux langues s’offrent comme voie d’accès à l’exploration. Est-ce la même forêt dans les deux cas? Je ne sais pas.
*Apulée #4 Traduire le monde, Zulma, les auteurs, 2019 http://www.zulma.fr