El derecho de vivir en paz* –
*Le droit de vivre en paix
Pour la plupart des nord-américains, mention de la date du 11 septembre évoque immédiatement l’attaque terroriste contre les Etats-Unis en 2001. Comme je suis plus âgée, cette date s’était déjà inscrite dans mon souvenir en 1973 avec le coup d’état contre le président de la république socialiste du Chili, Salvador Allende. J’habitais Montréal à l’époque et, conséquence de la répression féroce contre le peuple, de nombreux chiliens vinrent rajouter leurs voix et leurs expériences à celles d’autres militants plus locaux oeuvrant dans les quartiers populaires de la ville. Coops alimentaires, cliniques et crèches populaires, les journées n’étaient pas tristes, et les nuits non plus.
En 2019, je découvre les foules chiliennes reprenant en choeur (et en coeur) les chansons de Victor Jara, auteur compositeur, homme de théâtre, résistant, torturé et assassiné à l’époque par les partisans de Pinochet. L’un de ses meurtriers habitent toujours aux Etats-Unis.
El pueblo unido jamas sera vencido…Où que ce soit dans le monde, lorsque ces paroles sont prises au sérieux, dans quelque langue que ce soit, il s’ensuit des conséquences. A première vue, elles sont souvent si horribles qu’on se dit, “cette fois-ci, il n’y aura pas de lendemains.”
Et pourtant. Le droit de vivre. Le droit de vivre en paix. Où que ce soit dans le monde, c’est l’expression fondamentale de la vie. Elle n’est pas bête, la vie. Elle est persistante. Elle en a vu d’autres. Elle n’abandonne pas facilement.
Alors, comme le dit si bien Zehra Dogan dans ses écrits de prison, plutôt que de se triturer les méninges au sujet du mal, il vaut mieux se demander: “Comment le ‘bien’ s’organise-t-il?” *
Et chanter. Dans la langue qui vous convient le mieux. Que cela plaise ou non aux geôliers.
*Zehra Dogan, Nous aurons aussi de beaux jours – écrits de prison, édition des femmes-Antoinette Fouque, 2019
Illustration: lors d’un atelier de chants du sud italien
El derecho de vivir en paz* –
*The right to live in peace
For most North-Americans, a mention of September 11 immediately brings to mind the terrorist attacks against the United States in 2001. Since I’m somewhat older, that date had already imprinted itself on my memory in 1973 following the coup against Salvador Allende, President of the Socialist Republic of Chili. I lived in Montreal in those days and, as a consequence of the ferocious repression against the people, many Chileans left their country and joined their voices and their experiences to those of other more local activists then at work in the working-class districts of the city. Food coops, people’s clinics and day-care centers… The days weren’t gloomy and nor were the nights.
In 2019, I discover Chilean crowds singing with all their heart the songs of Victor Jara, songwriter, theater director, activist, tortured and assassinated in September 1973 by Pinochet’s partisans. One of his murderers is still living in the United States.
El pueblo unido jamas sera vencido…Wherever it may be in the world when those words are taken seriously, in any language, they have consequences. At first sight, some of those consequences are often so horrible we tell ourselves, “this time, there will be no tomorrows”.
And yet. The right to live. The right to live in peace. No matter where you are in the world, this is the basic expression of life. And life is no fool. It is persistent. It has seen a lot. It doesn’t give up easily.
So as Zehra Dogan says so well in her prison writing, rather than rack our brains over the existence of evil, the time is better spent asking ourselves: “How does the good organize itself?”*
And sing. In whatever language suits you best. Whether the jailers like it or not.
*Zehra Dogan, Nous aurons aussi de beaux jours – écrits de prison, édition des femmes-Antoinette Fouque, 2019
Illustration: during a workshop on songs from Southern Italy