11.8.19

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“J’ai grandi avec une bible ouverte sur la commode dans ma chambre. Une idée de ma mère. Pas religieuse, comme telle. Elle avait le sentiment qu’une bible ouverte, c’était comme un guide lumineux, une protection, une veilleuse pour l’âme. Je la lisais, de temps en temps. Mais surtout, je la laissais me guider. Qui sait où se trouve cette bible, maintenant? Ce que j’ai à sa place, c’est un des romans de Toni Morrison, près de mon lit, que je sois à le lire ou non. Une veilleuse pour mon âme. Et de toutes les façons imaginables, un Bon Livre.”Wesley Morris, “Toni Morrison Taught Me How to Think”, The New York Times, 8.8.19

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Toni Morrison et Edouard Glissant dans une interview des Inrockuptibles en 2006 :

Edouard Glissant:“…Une fois, losque nous vivions en Louisiane, je suis allé dans une banque et la personne derrière le guichet s’est adressée à moi sur un ton très agressif: “What do you want?” Je lui ai répondu en français très poliment: “Pardon, excusez-moi”… Alors tout a changé, elle m’a dit: “Oh you’re french? Comment allez-vous?”  Cette personne m’a traité comme un esclave jusqu’à ce qu’elle se rende compte que j’étais un étranger ! L’étranger, c’est toujours relatif.”

Toni Morrison: “J’ai toujours été choquée par le fait que l’on décrivait les pays africains et les Caraïbes comme pauvres. Mais ils ont toutes les ressources du monde ! Les pierres précieuses, les diamants, le pétrole. La France a le Louvre, mais n’a jamais cultivé le thé ou le cacao. Et où a-t-elle pris son or ? Ces pays sont pauvres parce que les Européens ont exploité leurs richesses naturelles depuis des siècles.

Edouard Glissant:Autre erreur : considérer l’Afrique comme un bloc monolithique alors qu’elle est si diverse.

Toni Morrison: Imaginez que l’Afrique ait eu besoin d’esclaves européens et soit venu voler des gens en Suède et en Pologne, qu’elle aurait appelés les “Blancs”. Elle se serait appropriée toutes leurs ressources. Vous pourriez imaginer ce que serait l’Europe aujourd’hui après deux siècles d’exploitation : une terre dévastée, épuisée. Pauvre.

Edouard Glissant: Si Hannibal avait pris Rome … un autre monde.

(Le texte complet: ici)

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“I grew up with a Bible open on a dresser in my bedroom. My mother’s idea. Not a religious one, per se. She felt that an open Bible was an illuminating guide, a protectant, this night light for the soul. From time to time, I read it. But mostly, I let it guide me. Who knows where that Bible is now? What I have instead is some novel by Toni Morrison, kept near my bed, whether or not I’m reading it. A night light for my soul. And, in every way, a Good Book.” Wesley Morris, “Toni Morrison Taught Me How to Think”, The New York Times, 8.8.19

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Excerpt from an interview with Toni Morrison and Edouard Glissant in les inrockuptibles, 2006:

Edouard Glissant:Once while we were living in Louisiana, I went to the bank and the person behind the counter spoke to me in a very aggressive way: “What do you want?” I answered her in French, very politely: “Pardon, excusez-moi…” And everything changed, she said: “Oh, you’re french? Comment allez-vous?”  This person treated me as if I were a slave until she realized I was a foreigner! Being a foreigner is always a relative thing.”

Toni Morrison:”I was always angered by the fact African countries and the Caribbeans were described as poor. But they have all the resources in the world! The precious stones, the diamonds, the oil. France has the Louvre, but it never cultivated the tea or the cacao beans. And where did it find its gold? Those countries are poor because Europeans exploited their natural resources for centuries.

Edouard Glissant:Another mistake: considering Africa like a monolith whereas it is so diverse.

Toni Morrison:Imagine if Africa had needed European slaves and had come to steal folks in Sweden and in Poland she had called “whites”.  It would have grabbed all their resources. You can imagine what Europe would be today, after two centuries of exploitation: a devastated, exhausted land. Poor.

Edouard Glissant– Had Hannibal conquered Rome…another world.

Toni Morrison: We would be asking you the questions. You would be the writers.”

(The full interview – in French – here).

 

 

 

 

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