25 juillet 2019

25 juillet 2019 –

Hier après-midi, les chiffres “officiels” disaient qu’il faisait 37° ici. Dans ma cour, c’était plutôt 41°. Mais ‘l’officiel’ ces jours-ci… ça donne, à l’assemblée nationale, Greta Thunberg le matin, et vote en faveur de la CETA en après-midi (sans parler du “deal” Mercosur avec le Brésil la semaine dernière). Alors…disons qu’il y a un écart entre les projections et  la réalité.

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Je termine la lecture de The Life of the Mind d’Hannah Arendt. Son copyright date de 1971. Raison de plus de lire ce qui suit attentivement:

…”Du point de vue de la vérité scientifique, les spéculations des idéalistes étaient pseudo-scientifiques; maintenant, à l’extrémité opposée de l’éventail, il se passe quelque chose de similaire. Les matérialistes jouent au jeu de la spéculation à l’aide d’ordinateurs, de cybernétiques et d’automatisation; leurs extrapolations produisent, non pas des fantômes comme dans le jeu des idéalistes, mais des matérialisations semblables à celles des séances de spiritisme.  Ce qui est tellement frappant dans ces jeux matérialistes, c’est à quel point leurs concepts ressemblent à ceux des idéalistes.   Ainsi “l’âme du monde” de Hegel s’est récemment matérialisée dans la construction d’un “système nerveux” sur le modèle d’un ordinateur géant:    Lewis Thomas  se propose de comprendre la communauté humaine mondiale comme étant un Cerveau Géant, échangeant des pensées à une telle vitesse “que les cerveaux humains semblent souvent être en voie de fusionner”. Avec l’humanité en tant que “système nerveux”, la terre entière devient “…un organisme qui respire, constitué de fines parties intérreliées”, croissant sous “la membrane protectrice” de l’atmosphère terrestre.   

De telles notions ne sont ni de la science ni de la philosophie, mais de la science fiction: elles sont répandues et démontrent que les extravagances de la spéculation matérialiste sont à l’égal des folies de la métaphysique idéaliste.  Mis à part qu’elles soient toutes dérivées historiquement de la notion du Progrès et de la notion concomitante et invérifiable d’une entité dite “humanité”, le dénominateur commun de toutes ces erreurs  c’est qu’elles répondent à la même fonction émotionnelle. Dans les mots de  Lewis Thomas,  elles nous débarrassent de “cette chère vieille notion du Soi – la merveilleuse île isolée du Soi, à la volonté  et à la capacité d’entreprise individuelles,  autonome, indépendante,” qui n’est qu’un mythe. Le véritable nom du ce mythe qu’on nous incite de tout côté à abandonner, c’est la Liberté. 

Les penseurs professionnels, qu’ils soient philosophes ou scientifiques, ne se sont pas montrés “satisfaits de la liberté” et de son côté aléatoire inéluctable; ils n’ont pas souhaité payer le prix de la contingence en échange du cadeau douteux de la spontanéité, et de pouvoir faire ce qui pourrait tout aussi bien ne pas être fait. “

Arendt se propose alors d’examiner “les hommes d’action”. Malheureusement pour la liberté individuelle, elle n’y fera pas de trouvaille merveilleuse… Ce que tout regard sur l’actualité, qu’il soit superficiel ou en profondeur, ne fera que confirmer.

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Illustration: il s’agit d’un moment d’aléatoire individuel complet, aperçu au milieu d’un fouillis d’objets chez une amie.Et qui m’a plu. Il faudra que ça suffise à titre de contribution personnelle au “Grand Cerveau” de Lewis Thomas…

 July 25 2019 –

Yesterday afternoon, official figures said it was 37° (98,6F°) here. In my backyard, it was 41° (105,8°F).But official these days…it can mean greeting Greta Thunberg at the National Assembly in the morning, and voting for CETA in the afternoon (not to mention the Mercosur ‘deal’ with Brazil last week). So…let’s say there’s a certain spread between projections and reality.

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I’m finishing the reading of Hannah Arendt’s The Life of the Mind. The copyright on it dates back to 1971. More’s the reason to read what follows carefully:

…”From the point of view of scientific truth, the Idealists’ speculations were pseudo-scientific; now, at the opposite end of the spectrum, something similar seems to be going on. Materialists play the game of speculation with the help of computers, cybernetics, and automation; their extrapolations produce, not ghosts like the game of the Idealists, but materializations like those of spiritualist séances. What is so very striking in these materialist games is that their results resemble the concepts of the Idealists. Thus Hegel’s “World Spirit” has recently found materialization in the construction of a “nervous system” fashioned on the model of a Giant Computer: Lewis Thomas proposes to understand the world-wide community of human beings in the form of a Giant Brain, exchanging throughts so rapidly “that the brains of mankind often appear functionally to be undergoing fusion.” With mankind as  its “nervous system”, the whole earth thus “becomes …a breathing organism of finely meshed parts,” all growing under the “protective membrane” of the planet’s atmosphere.

Such notions are neither science nor philosophy, but science fiction; they are widespread and demonstrate that the extravagances of materialist speculation are quite equal to the follies of Idealist metaphysics. The common denominator of all these fallacies, materialist or Idealist, apart from being historically derived from the notion of Progress and its concomitant, the undemonstrable entity called Mankind, is that they fulfill the same emotional function. In Lewis Thomas’ words, they do away with “the whole dear notion of one’s own self – the marvelous old free-willed, free-enterprising, autonomous, independent, isolated island of a Self,” which is “a myth”. The proper name of this myth, which we are admonished from all sides to get rid of, is Freedom.

Professional thinkers, whether philosophers or scientists, have not been “pleased with freedom”, and its ineluctable randomness; they have been unwilling to pay the price of contingency for the questionable gift of spontaneity, of being able to do what could also be left undone.” 

Arendt then examines ” men of action”. Unfortunately as far as individual freedom goes, she will not make marvelous discoveries there…  as any look at current developments, be they at a glimpse or in-depth, will confirm.

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Illustration : this consists of a moment of complete individual randomness, the recording of something that caught my eye in a mess of objects at a friend’s place. I liked it. It will have to do as my contribution to Lewis Thomas’ “Great Brain”…

 

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