Voix –
Voix dans les cacophonies. Pour ne prêter l’oreille qu’à certaines des notes les plus rapprochées pour l’instant: Pendant que pleuvent les OQTF (Obligation de quitter le territoire français) – y compris sur une famille de réfugiés syriens, y compris sur des jeunes qui ont respecté toutes les obligations imposées par l’Etat – un membre d’un collectif de soutien en fustige d’autres pour leur manque de réactivité, d’intervention politique et que sais-je encore. Entre écriture, traduction, cours de lecture pour les uns et contact avec des avocats pour les autres, mon poil se hérisse à ce ton impérieux. Vu les temps difficiles, on me dira que le ton n’est pas l’essentiel. Quand même. Dites des bêtises à un chien sur un ton gentil et vous verrez comment il est content. Puis, dites-lui des gentillesses sur un ton agressif, et comparez le résultat. Faut croire que mon chien intérieur réagit de la même façon.
Samedi, longue, très longue conversation avec une militante de longue date, bien placée pour constater les dérives législatives et réglementaires dans l’histoire de l’accueil des réfugiés en France depuis la dernière guerre mondiale. Nous avons parlé de “cas” concrets, comme celui de la famille syrienne ou ceux de jeunes maliens et guinéens de notre connaissance, des contraintes de plus en plus astreignantes imposées aux demandeurs d’asile (et à ceux qui les aident), de l’ampleur d’un phénomène migratoire qu’on ne résoudra pas à coup de petites phrases sur les “bons” demandeurs d’asile et les “mauvais” réfugiés dit “économiques”. Nous avons parlé aussi de certains qui parlent haut et fort contre les migrants…tout en les exploitant en douce pour leur propre compte. Et enfin, nous avons parlé de la nécessité de fixer nos priorités en fonction de nos propres forces et faiblesses.
En ce qui concerne mes limites personnelles : j’entends mal quand on me crie après ou qu’on tente de me faire agir par sentiment de culpabilité. Et comme je considère qu’ ajouter plus de bruit et de fureur aux cacophonies existantes n’aide en rien, je préfère me tenir loin des réunions et faire ce que je peux, sans croire aux miracles et sans me prendre pour autre que celle que je suis.
Et si j’ose le dire: possiblement que dans la cacophonie globale, la valeur d’un fou-rire partagé durant une leçon de lecture française survivra, quels que soient les aléas que réserve l’avenir.
(L’illustration n’a rien à voir avec le texte? Faux. À la leçon de lecture, demain, j’ai l’intention d’utiliser le livre Funambule, de Jack Sendak, illustré par Maurice Sendak et traduit par Françoise Morvan.* Puis, nous reviendrons à ce que veulent dire des expressions telles bouquet garni pour un jeune qui n’attend que le feu vert de la préfecture pour entreprendre son apprentissage en cuisine.)
*Funambule, éditions MeMo 2017.
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Voices-
Voices in the cacophonies. To lend an ear to some of the closest notes for now: While the OQTFs rain down (Obligation to Leave the French Territory) – including for a family of Syrian refugees, including for young people who’ve respected all the obligations imposed by the State – a member of a solidarity collective comes out criticizing the group’s lack of reactivity, of political clout and lord knows what else. Between writing, translating, reading lessons for the ones and contacts with lawyers for the others, my hackles go up at the hectoring tone. Given these harsh times, you may tell me the tone isn’t the main thing. Still. Say nasty things to a dog in a friendly voice and you’ll see how glad he is. Then, say nice things to him on a violent tone, and compare the results. I guess my inner dog reacts the same way.
On Saturday, I participated in a long, very long conversation with a long-time activist who can well appreciate the legislative and regulatory drifts that have marked the history of aid to refugees in France following the second world war. We talked about concrete “cases” (such as the Syrians and young men from Mali and Guinea that we know), about the ever-tighter constraints on asylum seekers (and on those helping them), about the vastness of the migratory phenomenon that won’t get resolved by curt little pronouncements on “good” asylum seekers and “bad” so-called “economic” refugees. We also talked about those who supposedly stand tall against migrants…yet quietly exploit them to their own benefit. And, finally, we talked about the need to set our priorities according to our own strengths and weaknesses.
As pertains to mine: I don’t hear well when people scream at me or attempt to shame me into doing things. Since I consider that adding more sound and fury to the cacophonies is of no help whatsoever, I prefer to stay away from meetings and do what I can, without believing in miracles nor taking myself for anything other than who I am.
And if I dare say so: perhaps in the midst of the global cacophony, the value of a shared giggling fit during a French reading lesson might live on in time, no matter what the future might bring.
(The illustration has nothing to do with the text?Wrong. At tomorrow’s reading lesson, I intend to use the book Funambule* by Jack Sendak, illustrated by Maurice Sendak and translated by Françoise Morvan. Then, we’ll get back to the meaning of expressions such as bouquet garni for a young man who’s waiting for the green light from the préfecture to begin his apprenticeship as a cook.)
*Circus Girl in English. Harper Collins Children’s Books.