Messages –
J’habite une petite ville dans le sud-ouest. La plupart du temps, nul besoin de téléphone, de mails, de facebook ou autres messageries pour se transmettre les informations importantes. On se croise sur le marché, on se croise dans la rue, on se croise à la fenêtre. Ce qui doit être dit est dit, nul besoin que le monde entier en soit informé. Et puis, on sait à qui faire confiance et avec qui se contenter d’un sourire poli ou d’un regard évasif. C’est pratique. Moi, j’aime bien.
Je me tiens plutôt à carreau, ces jours-ci. Besoin de repos, et besoin de rassembler les énergies pour les combats bureaucratiques à long cours. Certains durent depuis plus de quatre ans maintenant, certains se soldent par des échecs et même ceux qui semblent être des “success stories” comportent tellement d’aléas que j’ai parfois l’impression de ces promenades hivernales dans la campagne québécoise, sur une croûte de neige cédant d’un coup sous les pas. On croyait la destination à portée de main et puis…et puis, non, encore des efforts à fournir. Je pense, notamment, à un jeune auquel son patron a signé un contrat en CDI et qui, normalement, aurait dû bénéficier d’un titre de séjour de 4 ans et s’en est vu octroyer un autre de douze mois seulement. Je ne parlerai pas ici de ceux à qui on vient de refuser le droit de travailler, bien qu’ils aient rempli toutes les conditions exigées d’eux, et qui se voient délivrer plutôt une OQTF (obligation de quitter le territoire français). Au jour le jour, à long cours…
*
Fenêtre ouverte hier soir, j’ai pu bénéficier d’un concert étonnant sans même quitter mon lit: les chanteurs et musiciens coréens invités par mon voisin, Ed Maurer, étaient arrivés dans la journée. De sa terrasse à quelques mètres de ma chambre, une voix féminine incroyablement puissante s’est élevée dans une mélopée étrange, envoutante. Ce matin, je fais connaissance avec la chanteuse à ma fenêtre du salon. Elle est toute menue, d’où sort-elle une voix pareille? Mystère.
*
Je reparlerai des concerts et autres activités du groupe coréen demain. Pour l’heure, je dois régler une question importante: l’ami d’une amie prête sa maison familiale de Concarneau à cette amie, laquelle m’invite à la partager avec elle pour une semaine. Je ne connais pas du tout la Bretagne et je suis ravie à l’idée de découvrir cette partie du pays. La question de grande importance porte sur les bagages, nécessairement restreints. Pas de connexion internet, donc papier et stylos pour l’écriture, évidemment. Mais dans le choix de lecture, est-ce que j’opte pour Vie et moeurs des lutins bretons* de Françoise Morvan ou pour La douce vie des fées des eaux** de la même? Vie et moeurs est légèrement plus mince – donc, plus léger, quoique les deux, finalement…
Bref, comme on peut le constater, j’aborde les considérations de fond en ce dimanche grisonnant. Les prises de tête bureaucratiques? C’est à cela que servent les lundis, non?
*
Messages
I live in a small town in the southwest. Most of the time, there’s no need for the phone, emails, facebook or any other communication system for the transmission of important information. We meet on the market place, we meet on the street, we meet at the window. What needs to be said gets said, no need to inform the whole world. Plus, we know who we can trust and with whom it’s best to stick to a polite smile or an evasive glance. Practical. I like it that way.
I’m keeping a rather low profile these days. Need to rest and need to gather up energy for the long-term bureaucratic struggles. Some of them have been going on for four years now, some end in failure and even those that seem to be “success stories” are filled with so many imponderables that I sometimes feel like I’m taking a wintertime walk in the Québec countryside on crusty snow that suddenly gives way under foot. You thought the goal was within reach and then… and then, no, there’s still work to be done. I’m thinking, among others, of a young man whose boss signed him up for a long term contract and who, normally, should have received a four-year residency permit but only received another twelve-month extension. I won’t go into details here about those who have just been denied work permits despite the fact they’ve met all required criteria, and who receive an OQTF instead (the document ordering them to leave the country). The long run, day after day…
*
Through my open window last night, I had the benefit of a surprising concert without even leaving my bed: the Korean singers and musicians invited by my neighbor Ed Maurer had arrived during the day. From his terrace a few meters from my window, a woman’s voice of incredible power rose in a strange and haunting chant. This morning, I meet the singer at my living room window. She is so tiny, where does she find such a voice? Mystère.
*
I’ll give more information about the concerts and others activities of the Korean group tomorrow. For the time being, I must settle an important question: a friend of a friend is lending his family home in Concarneau to this friend who has invited me to spend a week there in her company. I don’t know Brittany at all and I’m delighted at the thought of discovering that part of the country. The matter of great import hinges on the limited luggage allowance. There’s no internet connection where I’ll be staying, so pens and paper for writing, obviously. But as reading material, do I opt for Françoise Morvan’s Vie et moeurs des lutins bretons* (Life and Mores of Breton little folks – the ones the Irish call leprechauns) or her La douce vie des fées des eaux** (The gentle life of the water fairies)? Life and Mores is slightly slimmer – therefore lighter, although both of them together, finally…
In short, as anyone can see, I’m tackling fundamental considerations on this greying Sunday. Bureaucratic wranglings? That’s what Mondays are for, no?
*
*Françoise Morvan, Vie et moeurs des lutins bretons, Babel, Actes Sud 1998
** Françoise Morvan, La douce vie des fées des eaux, Babel, Actes Sud 1999