L’arme du non-sens/Nonsense as weapon

L’arme du non-sens

Dans ses versions ludique et poétique, le non-sens est une bénédiction, l’échappée d’une rationalité étouffante jusqu’à la démence. Dans ses incarnations étatiques, c’est autre chose. Les procès ubuesques en Turquie en sont un exemple où l’on voit le mensonge érigé en système de gouvernance. Le mensonge assumé, volontaire, arrogant, le mensonge comme outil de contrôle – et tant mieux s’il est absurde, son effet n’en sera que plus fort – quelque chose comme l’équivalent mental d’une décharge de taser.

Dans mes lectures régulières, c’est André Markowicz qui exprime le mieux cette réalité dans son commentaire sur facebook aujourd’hui (Russie, Gogol au centre, trois épisodes). Au retour d’un passage à Petersbourg, il y relate trois “gros mensonges” parmi tant d’autres. Et, comme il l’écrit, la question est bel et bien  « …que ces accusations soient délibérément stupides, parce qu’elles existent en tant que telles : pour montrer que la justice ou la vérité ne sont pas des données objectives, mais des objets que l’on fabrique au gré de ses besoins. »

Soit l’exact opposé du non-sens ludique ou poétique. Lequel constitue  peut-être la contre-offensive la plus efficace pour qui considère la liberté de conscience comme non-négotiable. Parce que l’indignation dans le mode action/réaction doit enchanter les marchands de la peur, et  les faire se bidonner pendant qu’ils préparent leur offensive suivante.

Ces remarques, après deux  journées d’ateliers sur le thème de la radicalisation et de la ré-intégration de personnes fortement marquées par des formes extrêmes de violence, où furent évoqués les pouvoirs transformateurs du récit et du théâtre comme modes de transformation de réalités d’un non-sens chaotique en …oserai-je dire une  “absurdité constructive”?

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Nonsense as weapon

In its playful and poetic versions, nonsense is a blessing, the escape from a rationality that stifles to the point of madness. In its State incarnations, it’s something else. The grotesque trials in Turkey supply one example among thousands of lying raised to the status of a system of governance. The self-assured, voluntary, arrogant lie as as weapon of control – the more absurd the better, its effect will be that much stronger. Lying as the mental equivalent of a discharge from a Taser.

In my habitual reading, André Markowicz is the one who expresses this best today in his Facebook commentary Russie, Gogol au centre, trois épisodes  (Russia, Gogol centre stage, three episodes). Returning from Petersburg, he relates “three big lies” among so many others. As he writes, the matter is truly that « … these accusations are deliberately stupid, because they exist for that purpose: to show that justice or truth are not objective data, but objects one fabricates according to one’s needs.”  

In other words, the exact opposite of playful or poetic nonsense. Which may constitute the most efficient counter-offensive for those who consider freedom of conscience non-negotiable. Because plain old indignation in action/reaction mode must delight the fear merchants and leave them laughing while they devise their next onslaught.

These remarks after two days of workshops on the themes of radicalization and re-integration of individuals marked by extreme forms of violence, where the transformative powers of narrative and theater were evoked as means of transforming chaotic non-sense into… dare I call it “constructive absurdity?”

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