Pendant que je suivais le déroulé du procès d’Asli Erdogan, Necmiye Alpay et les autres grâce au travail de Free Asli Erdogan sur Facebook, ma voisine du dessus accompagnait d’une voix de fausset qui fausse la chanson qu’elle fait tourner en boucle en ce moment et qui dit: je t’en supplie, laisses-moi t’oublier, je ne peux pas lui faire ça. Vu que je suis contre la violence, je contrôle, au mieux, mes pulsions meurtrières grâce à une paire d’écouteurs et un choix personnel d’accompagnement musical.
Pour en revenir à l’essentiel de mon propos. Donc, dans la plus pure tradition de laisser traîner pour que tout le monde s’en lasse: Bilge Contepe, membre du Parti des Verts en Turquie: relaxée. Inan Kizilkaya (que personne n’a vu à son propre procès, pour cause de “manque de véhicules” des autorités) demeure incarcéré. La raison en est peut-être tout simplement qu’il n’est pas “présentable” dans l’état où on l’aurait mis?
Et les autres? Asli Erdogan, Necmiye Alpay, Zana Kaya (d’autres dont j’ignore le nom?) En conditionnelle, jugement sera rendu le 14 mars. Circulez, plus rien à voir, merci. Les médias se chargeront de vous distraire avec autre chose.
Et les 443 “personnes du cinéma” poursuivis pour leur solidarité avec les 1128 universitaires signataires d’un texte intitulé “Universitaires pour la Paix”? On sait ce qu’il advient de l’enquête les concernant “pour apologie de crime et de criminels”?
(Vous ne trouverez pas grand chose au sujet de tout ça à moins de lire des publications comme Kedistan – “le petit magazine qui ne se laisse pas caresser dans le sens du poil”. Ce que je ne saurais assez vous recommander.)
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Souvenirs d’une autre époque – le Front de libération du Québec des années soixante et soixante-dix, je n’en étais pas. Je n’aime pas les lanceurs de bombes, quelle que soit l’étiquette qu’ils accolent à leur geste. Mais les “folles” du Front de libération des femmes, ça oui, j’en étais, même si je n’étais pas parmi “les folles” qui s’étaient enchaînées aux grilles du tribunal, et qui passaient en jugement ce jour-là. Un tribunal où les femmes pouvaient être jugées… mais n’avaient pas le droit de siéger dans un jury. Pensez: une folle qui a ses règles, elle pourrait décider d’innocenter un coupable, Monsieur! Ben oui! À cause que les z-hormones, ça les rend folles, tout l’monde sait ça (il faut l’accent québécois pour apprécier ce commentaire à sa juste valeur).
Moi, à l’époque, j’écrivais dans un journal de quartier, je militais pour des conditions meilleures pour des travailleuses d’une blanchisserie où les draps étaient plus propres que ne l’étaient les pratiques du patron. Et pour des crèches aussi, que nous appelions des “garderies populaires”. Paraîtrait que les places en “garderies populaires” font maintenant partie des petits avantages consentis aux copains qui souscrivent aux campagnes de financement des partis, mais bon, tout change, tout change…sauf la volonté de ne pas s’en laisser conter.