Au départ, il ne comprend pas. “Mais, ils sont blancs, Madame! Ils sont Européens!”Je dis: “Tu te souviens comment ils t’ont traité en Libye?” Oh que oui, il s’en souvient. Les noirs de peau n’ont pas la cote, en Libye. “Ils sont Roms. Il y en a ici pour les traiter aussi mal qu’ils t’ont traité là-bas.”
Il connaît bien la famille. Il est bien au courant de leurs galères. Pas plus que moi, il ne comprend les guerres de papier – ni les guerres tout court. N’y rien comprendre n’y change pas grand chose.
Papiers, papiers, identités croisées…Un malheureux imbécile se fait filmer en Turquie, à affirmer qu’il est prêt à mourir pour défendre sa “patrie bien-aimée” contre les Kurdes, les Juifs, et qui d’autre encore, j’oublie, mais je parie que les incroyants, les professeurs et les écrivains sont sur sa listes des “à proscrire et à combattre”. Les histoires de drapeaux sont le fond de commerce de l’Histoire. Pendant 15 ans, 30 ans, 3 siècles, des gens cohabitent, chacun avec ses coutumes, ses contes, ses histoires,et ses rancunes aussi. Et puis – paf! – un jour, de Très-Grands-Imbéciles-Plus-Imbéciles -que-les autres touillent et touillent les rancunes, et c’est parti pour un autre tour.
Allez. Ciseaux, papier, colle, crayons, nourriture, cadeaux: deux jours en compagnie de la famille. On fabriquera nos propres guirlandes. On rira et on mangera ensemble. On fera barrage aux tristesses ou on les évoquera, au besoin. C’est vrai que le papa n’est pas, mais pas du tout doué pour les papiers. Mais pour ce qui est de vivre le moment, ici, maintenant, tout de suite? Un génie. Il y en aurait un peu plus des comme lui que le papier servirait moins souvent à exclure les uns et à dénoncer les autres.
Allez. La pétition pour la libération d’Asli Erdogan. Signée déjà? Super. À partager, alors.